Cession d'entreprise ou d'activité (parfois dite plan de cession)
Une présentation du tronc commun des différentes cessions est sous le mot cessions
Quelques points de la définition
Les textes qui régissent les différentes situations et la primauté du plan
Procédure de dépôt des offres et contenu des offres
Le prix de cession : prix symbolique exclu
Contenu des offres et actifs cédés
Le périmètre légitime de l'offre
Les actifs incessibles : créances fiscales par exemple
Sort des biens non compris dans la cession
Qui ? Les incompatiblités
A qui faire l'offre ? Les professionnels obligatoirement désignés.
Peut-on retirer ou modifier une offre après son dépôt ?
L'offre peut-elle être limitée dans le temps ?
L'offre peut-elle comporter des conditions ?
Si le tribunal renvoie l'affaire que se passe-t-il : nouvelles offres ? Modification des offres ?
Une offre hors délai est-elle recevable ?
Les contrats
Généralités sur les contrats transférés
Contrats transférés : nature du contrat et intuitu personae
affectation d'une part du prix aux créanciers inscrits
Les droits d'enregistrement et la TVA
Gestion de la période entre le jugement et les actes de cession
Quand a lieu le transfert de propriété et des risques ?
pas de surenchère et donc pas de purge
pas de jeu des clauses d'agrément
vices cachés et questions approchantes (dol, absence d'information)
voies de recours et présentation d'offres en appel
inexécution de la cession et/ou refus de passer les actes de cession
Généralités
(cession d'entreprise ou d'activité = vente d'entreprise ou d'activité)
Parfois le texte évoque la cession de l’activité (c’est le cas de L626-2 CC quand il s’agit d’une cession dite partielle, en complément d’un plan), mais globalement c’est le terme de cession d’entreprise qui décrit le processus légal.
Le contexte :
Cession d’activité (ou cession partielle d’entreprise) en complément d’un plan de sauvegarde ou de redressement qui portera sur le maintien d’une autre partie de l’activité, cession d’entreprise en alternative d’un plan de redressement (on peut ici dire cession totale), cession d’entreprise en liquidation judiciaire si activité.
Comment savoir qu'une entreprise peut-être reprise ?
La loi organise la publicité de la vente des actifs L 642-22
« toute cession d’entreprise et toute réalisation d’actif doivent être précédées d’une publicité »
Il existe des sites Conseil National des administrateurs et mandataires judiciaires (CNAJMJ.fr), certains professionnels ont leurs propres sites (par exemple ce site)
Les jugements d’ouverture des procédures sont également publiés dans des journaux d’annonces légales, et certains dossiers justifient des publicités spécifiques dans des journaux professionnels.
Les professionnels contactent évidemment tous les candidats potentiels dont ils connaissent l’existence, et toute personne intéressée peut spontanément prendre contact avec eux.
Les textes qui organisent l'information préalable des salariés ne sont pas applicables
Les textes de droit commun prévoient que au plus tard 2 mois avant la conclusion du contrat de vente, les salariés sont informés au cours d’une réunion d’information. Cependant sont expressément exclues du champ d’application de cette disposition :
- les entreprises à partir de 250 salariés ( pour lesquelles d'autres dispositifs existent)
- les transmissions réalisées dans le cadre d’une succession, d’une liquidation du régime matrimonial ou d’une cession du fonds à l'époux(se) ou partenaire de Pacs, à un ascendant ou descendant ;
- les entreprises en cours de procédure de conciliation, de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire.
Les textes relatifs à la cession d'entreprise et la primauté du plan
Les textes principaux sont les articles L642-1 du code de commerce et s et R641-1, qui sont des textes de la liquidation, qui est la procédure de référence en matière de réalisation d’actif.
Pour les autres circonstances de cession de l’entreprise, le code de commerce fonctionne par renvoi :
- en accessoire d’un plan de sauvegarde ou de redressement, L626-1 et L631-19
L 626-1 « ce plan de sauvegarde comporte s’il y a lieu l’arrêt, l’adjonction ou la cession d’une ou plusieurs activités ». Comme déjà dit le texte parle d’activité, mais le processus légal est celui de la cession d’entreprise
Renvoi L631-19 pour procédure de RJ.
Dans ce cas le redressement judiciaire donner lieu à titre principal à un plan de sauvegarde ou de redressement cas à un paiement échelonné des créanciers
- En alternative au plan de redressement, en redressement judiciaire, L631-13 (en cas de rejet de celui-ci)
tout candidat peut adresser à tout moment son offre de cession L631-13 « dès l’ouverture de la procédure les tiers sont admis à soumettre à l’administrateur judiciaire des offres tendant au maintien de l’activité de l’entreprise par une cession totale ou partielle »
La cession peut être la solution si le tribunal refuse le plan ou s’il n’y a pas de plan possible. Les premières rédactions de L631-22 prévoyaient « à la demande de l’administrateur judiciaire le tribunal peut ordonner la cession totale ou partielle de l’entreprise si le débiteur est dans l’impossibilité d’en assurer lui-même le redressement »
Si un plan est proposé, la Cour de Cassation considère que la cession ne peut se faire qui si le tribunal a préalablement rejeté ce plan (Cass com 04.11.2014 n°13-21703 avec dans le même jugement le rejet du plan de redressement proposé et l'adoption de la cession).
Pour asseoir plus encore la primauté du plan sur la cession, l'article L631-22 du code de commerce tel qu'il résulte de l'ordonnance de 2014 dispose désormais "le tribunal peut ordonner la cession totale ou partielle de l'entreprise si le ou les plans proposés apparaissent manifestement insusceptibles de permettre le redressement de l'entreprise ou en l'absence de tels plans"
S’il y a cession en alternative d’un plan de redressement, tout est cédé et puisqu’il n’y a pas de plan de redressement, le code de commerce tire la conséquence du fait qu’après la cession totale de l’entreprise il n’y a plus d’activité dans l’entreprise,
L 631-22 al 3 « si l’arrêté d’un plan de redressement ne peut être obtenu, le tribunal prononce la liquidation judiciaire ».
Autrement dit, la cession totale de l’entreprise en redressement judiciaire va entraîner un jugement de liquidation judiciaire, immédiat ou à la suite des actes de cession.
La procédure de dépôt des offres de cession d’entreprise: contenu des offres
Contenu des offres et actifs inclus
L'article L642-2 du code de commerce fixe le contenu de l'offre :
"II.-Toute offre doit être écrite et comporter l'indication :
1° De la désignation précise des biens, des droits et des contrats inclus dans l'offre ;
2° Des prévisions d'activité et de financement ;
3° Du prix offert, des modalités de règlement, de la qualité des apporteurs de capitaux et, le cas échéant, de leurs garants. Si l'offre propose un recours à l'emprunt, elle doit en préciser les conditions, en particulier de durée ;
4° De la date de réalisation de la cession ;
5° Du niveau et des perspectives d'emploi justifiés par l'activité considérée ;
6° Des garanties souscrites en vue d'assurer l'exécution de l'offre ;
7° Des prévisions de cession d'actifs au cours des deux années suivant la cession ;
8° De la durée de chacun des engagements pris par l'auteur de l'offre ;"
A priori une offre incomplète peut être précisée à la demande de l'administrateur judiciaire, et n'est pas irrecevable. .Le tribunal peut également demander des compléments d'information en chambre du conseil.
Ceci étant, le candidat n'est pas tenu au delà de son offre Cass com 19 mai 2021 n°19-25916
Le prix de cession : prix symbolique exclu
La pratique qui consiste à proposer un prix dénué de toute réalité économique en contre partie d'engagements, notamment sociaux, est à bannir "que l'engagement par le cessionnaire de reprendre certains contrats de travail ne pouvait être considéré comme une contrepartie des biens cédés et en a déduit qu'en autorisant de telles cessions qui ne constituaient pas des ventes, le juge-commissaire avait statué hors la limite de ses attributions" Cass com 28 septembre 2004 n°02-11210
Le périmètre légitime de l'offre
Ce qui semble évident est qu'il s'agit d'assurer la poursuite de l'activité, et même une cession dite totale ne doit pas être confondue avec une transmission universelle de patrimoine : seuls les actifs nécessaires à la poursuite de l'activité doivent être inclus dans l'offre Cass. com., 11 juin 1996 n°94-15295. Cass. com., 26 nov. 2002, n° 99-13820 . Pour un cas issu de la précédente législation, parfaitement transposable "le plan de cession totale ou partielle de l'entreprise ne peut comprendre que les biens du débiteur qui sont affectés à l'activité de celle-ci" Cass com 22 avril 1997 n°94-19522
Le candidat ne saurait prétendre à la cession des actifs indifférents à l'activité (comme par exemple le compte client et des actifs sans incidence sur l'exploitation) comme par exemple des biens personnels du débiteur Cass com 3 mars 1992, n° 90-12602 "ne peuvent être compris dans le plan de cession de l'entreprise les biens qui ne sont pas affectés à l'activité de celle-ci" ou le "bas de bilan" à l'exception des stocks (créances clients, comptes courants associés, disponibilités bancaires, caisse ).
Le traitement de ces actifs est le même que dans une cession de fonds de commerce : ils sont normalement exclus (mais un accord peut être pris avec le cessionnaire pour le recouvrement du compte client).
La cession d'entreprise ne peut être utilisée pour céder des actifs qui ne relèvent pas de l'activité cédée et devraient être cédés dans les formes liquidatives, ou céder des créances qui viendront en fait diminuer le prix facial proposé, sans que cette cession soit nécessaire au maintien de l'activité.
Cependant force est de constater que le Tribunal ne peut modifier d'office la liste des biens énumérés dans l'offre et ne peut dans ce cas que rejeter une offre qui inclue des actifs dont la cession n'est pas légitime au regard de l'impératif de poursuite d'activité.
En ce sens l'offre est indivisible, c'est à dire que le candidat est fondé à solliciter la cession de tous les actifs visés à son offre sans restriction.
L'offre qui comprend un brevet permet au cessionnaire de résister à la demande d'attribution du salarié du cédant Cass com 5 janvier 2022 n°19-22030
Actifs exclus
Les actifs que la loi attribue exclusivement à la personne du débiteur, comme par exemple une créance fiscale de report en arrière des déficits, sont incessibles en raison de leur caractère inaliénable qui découle de l'article 220 quinquies du Code général des impôts (Cass. com., 15 déc. 2009, n°08-13419),
Bien entendu tout actif non mentionné est exclu Cass com 3 novembre 2009 n°08-19634
Sort des biens non compris dans la cession
L'article L631-22 prévoit que les biens non compris dans la cession sont cédés dans les formes de la liquidation (évidemment sauf le cas où la cession n'est que partielle, ce qui ménage la possibilité pour le débiteur de présenter un plan de redressement "complémentaire").
Qui peut faire une offre ?
Voir cession différents modes qui est commun à la cession d'entreprise et à la cession des biens et détaille les incompatibilités
A qui faire une offre ?
Au visa de l'article L631-21-1 du code de commerce il est considéré qu'en redressement judiciaire, dès lors qu'une cession d'entreprise est envisagée, le Tribunal désigne un administrateur judiciaire: c'est donc ce professionnel qui est destinataire de l'offre.
L'obligation de désignation d'un administrateur judiciaire n'est pas applicable en cas de liquidation judiciaire, l'article L642-2 du code de commerce désignant comme destinataire de l'offre le liquidateur ou l'administrateur judiciaire s'il en a été désigné un.
Quand une offre peut être déposée ?
1- Dès l’ouverture de la procédure de redressement judiciaire
Le principe posé par la loi est que, même si le redressement judiciaire a vocation à conduire à un plan de redressement (remboursement échelonné des créanciers), il est possible dès l’ouverture de la procédure de soumettre des offres de cession d’entreprises à l’administrateur judiciaire (L631-13 du code de commerce).
D’ailleurs la Cour de Cassation a jugé qu’il n’y avait pas lieu d’attendre l’issue de la période d’observation pour ordonner la cession (Cass com 3 mai 2016 n°14-24865)
2- Dans le délai fixé par l’administrateur judiciaire (ou par le tribunal en cas de liquidation avec poursuite d'activité)
En outre si l’administrateur judiciaire estime que la cession d’entreprise doit être envisagée, il communique au greffe les caractéristiques de l’entreprise, qu’il portera également à la connaissance des tiers intéressés, de telle manière qu’ils puissent rédiger une offre (R631-39) ;
En outre l’administrateur judiciaire fixe le délai à l’intérieur duquel les offres devront lui être adressées (R631-39).
Il doit se passer au minimum 15 jours entre l’expiration du délai et l’audience à laquelle le tribunal évoquera la cession, ce qui permet l’établissement des rapports des différents intervenants (R631-39), mais ce délai peut être écarté si le débiteur et les parties en sont d’accord.
Il convient de préciser qu'en liquidation judiciaire le délai est fixé par le Tribunal, et l'offre est remise à l'administrateur judiciaire s'il en a été désigné un et à défaut au liquidateur, le reste du processus est pratiquement identique. L642-2 du code de commerce y compris sur la recevabilité des modifications étant cependant précisé que dès lors qu'en liquidation judiciaire c'est le tribunal qui fixe le délai de dépot des offres, le délai de 15 jours prévu à l'article R631-39 n'est pas applicable.
L'article R 642-1 prévoit la possibilité de fixation d'un nouveau délai, par le Tribunal en cas de renvoi de l'affaire (et l'article R631-40 rend ce texte de la liquidation applicable au redressement judiciaire). Il n'est pas précisé si 'l'administrateur judiciaire peut, de lui même, repousser le délai initialement fixé s'il n'a pas reçu d'offre (c'est à dire si l'affaire n'est pas soumise au Tribunal et n'est pas renvoyée) : a priori cela ne semble pas exclu et on voit mal le grief qu'il y aurait.
Enfin dans les cas où au moment de la liquidation judiciaire les offres sont déjà existantes, le tribunal peut ne pas ouvrir de délai ni autoriser la poursuite d'activité, auquel cas les offres présentes sont examinées et de nouvelles offres sont admises dans les 8 jours qui précèdent l'audience (article R642-1 du code de commerce).
Il faut notamment savoir que si un plan est proposé, la Cour de Cassation considère que la cession ne peut se faire qui si le tribunal a préalablement rejeté ce plan (Cass com 04.11.2014 n°13-21703 avec dans le même jugement le rejet du plan de redressement proposé et l'adoption de la cession), et d'ailleurs l'article L631-22 du code de commerce tel qu'il résulte de l'ordonnance de 2014 dispose désormais "le tribunal peut ordonner la cession totale ou partielle de l'entreprise si le ou les plans proposés apparaissent manifestement insusceptibles de permettre le redressement de l'entreprise ou en l'absence de tels plans"
L’offre adressée à l’administrateur judiciaire peut-elle être retirée ou modifiée ?
Une fois remise à l’administrateur judiciaire, l’offre ne peut être retirée et est maintenue jusqu’à ce que le tribunal statue (mais pas en cas d’appel où seule l’offre retenue ne peut être retirée L642-2). Elle peut par contre être modifiée dans le sens de l’amélioration (L642-2), mais au plus tard deux jours ouvrés avant l’audience devant statuer sur le plan (R642-1).
Pour la définition d'un jour ouvrable voir le mot délai de procédure
Sur le retrait
En théorie le candidat ne peut retirer son offre avant que le Tribunal ait statué. Ceci étant, et dès lors que le Tribunal est tenu de s'assurer du caractère sérieux de son offre, il ne semble pas pertinent, même si c'est juridiquement possible, de retenir "de force" une offre retirée, qui nécessitera un exécution forcée, et il est sans doute bien plus adapté de prévoir une action en dommages intérêts.
Sur la notion de modification
Rappelons qu'au visa de l'article l642-1 du code de commerce "La cession de l'entreprise a pour but d'assurer le maintien d'activités susceptibles d'exploitation autonome, de tout ou partie des emplois qui y sont attachés et d'apurer le passif".
L'offre satisfait donc à ces trois critères.
La question peut se poser de savoir comment la notion d'amélioration s'apprécie : soit critère par critère soit dans la globalité de l'économie de l'offre. Par exemple une offre améliorée par exemple sur le nombre de salariés repris, mais diminuée sur le prix de cession peut-elle être considérée comme améliorative si les emplois supplémentaires font réaliser une économie (les licenciements) supérieure à la baisse de prix, ou au contraire l'amélioration de l'effectif est -il seul recevable, et la baisse du prix irrecevable ?
Le texte dispose exactement "L'offre ne peut être ni modifiée, sauf dans un sens plus favorable aux objectifs mentionnés au premier alinéa de l'article L. 642-1, ni retirée" et l'article L642-1 dispose : "La cession de l'entreprise a pour but d'assurer le maintien d'activités susceptibles d'exploitation autonome, de tout ou partie des emplois qui y sont attachés et d'apurer le passif".
En raison de cette formulation il semble que toute modification doive porter sur une amélioration au regard de l'un des trois critères posés par la loi : activité, emploi ou prix
Ce n'est donc pas au regard de l'économie l'économie globale de l'offre que la notion d'amélioration doive s'apprécier, mais au regard du critère concerné.
Ainsi un candidat peut augmenter le prix, augmenter l'effectif repris, mais ne devrait pas pouvoir par exemple diminuer le prix au motif qu'il reprend un effectif supérieur à celui mentionné à l'offre initiale. Un telle modification n'est pas, à notre avis, une amélioration.
Le texte est relativement imprécis sur le sort de l'offre modifiée dans des conditions qui ne répondent pas à ces critères, mais a priori elle est irrecevable, et le candidat reste tenu de l'offre initiale.
Le texte ne précise pas non plus si le Tribunal pourrait, dans une offre modifiée qui comporterait un aspect d'amélioration (par exemple le prix) et un aspect de diminution (par exemple l'effectif repris) opposer au candidat son offre initiale (ici l'effectif repris) et ne prenant en considération que l'aspect amélioratif de la modification (ici sur le prix amélioré).
Cela nous semble a priori périlleux, et à notre avis une offre est un ensemble indivisible : la modification qui comporte un aspect qui la rend irrecevable est globalement écartée.
Enfin il nous semble que l'amélioration de l'offre n'est pas une modification de son périmètre : à égalité de périmètre le candidat peut augmenter le prix ou l'effectif repris. A l'inverse l'ajout d'un actif qui n'était pas dans le périmètre initial ne nous semble pas être une amélioration, dès lors que ce qui caractérise l'offre est "1° la désignation précise des biens, des droits et des contrats inclus dans l'offre" (article L642-2 du code de commerce) : une modification de son périmètre n'est pas une amélioration mais bien une "autre" modification.
Enfin le texte indique "A peine d'irrecevabilité, aucune modification ne peut être apportée à une offre moins de deux jours ouvrés avant la date fixée pour l'audience d'examen des offres par le tribunal" (article R642-1 du code de commerce).
La notion de "deux jours ouvrés avant la date de l'audience" ne semble pas avoir donné lieu à un important contentieux.
A priori le jour de l'audience n'est pas pris en considération et si l'amélioration ne peut pas être formulée "moins de deux jours ouvrés avant l'audience, elle peut être, a contrario, formulée deux jours ouvrés avant l'audience.
Il convient de ne considérer que deux jours entiers (voir règles de computation des délais de procédure), ces deux jours étant nécessairement un lundi mardi mercredi jeudi ou vendredi. Donc l'offre ne peut être modifiée la veille de l'audience (un jour ouvré avant l'audience) mais peut à notre avis l'être l'avant veille (deux jours ouvrés avant l'audience) si c'est ces deux jours (veille et avant veille) sont ouvrables puisque dans ce cas l'avant veille n'est pas située "moins de deux jours ouvrés avant l'audience" mais exactement deux jours ouvrés avant l'audience. Le processus est conçu pour qu'il reste un jour ouvré avant l'audience.
(le processus est différent en cas de cession en liquidation)
Il n'est pas possible pour un candidat, de tirer argument d'un nouveau délai fixé par le Tribunal pour le dépôt des offres , pour retirer sa première offre et en déposer une nouvelle minorée, car évidement cela contrevient au texte.
L'offre peut-elle être limitée dans le temps ?
L'intangibilité de l'offre jusqu'à ce que le Tribunal statue ne peut pas priver le candidat d'organiser ses investissements comme il l'entend.
Il en découle que le candidat peut parfaitement préciser une date au delà de laquelle son offre ne sera plus valide.
Au delà il en sera délié
L'offre peut elle être conditionnée ?
Voir condition suspensive / résolutoire
Les offres qui portent sur plusieurs procédures collectives peuvent-elle être indivisibles entre elles ?
Il est communément admis que plusieurs offres, déposées par plusieurs candidats, peuvent se compléter et être présentées comme indivisibles au sein d'une même procédure collective. En effet, le Tribunal statue sur toutes les offres dans le même temps et la condition suspensive que chaque offre contient, que les autres offres soient réunies, est levée par le Tribunal.
La solution est fort différente si plusieurs offres présentées dans plusieurs procédures collectives par le même candidat sont présentées comme indivisibles.
La distinction entre les deux notions est parfaitement décrite par un arrêt de la Cour d'appel de PARIS CA Paris 7 décembre 2015 n°15/15957 :
- sur l'indivisibilité de plusieurs offres au sein de la même procédure collective, admise : "aucune disposition n'interdisant à des candidats repreneurs de regrouper leurs offres au sein d'une offre globale unique dont ils spécifient le caractère indivisible plutôt que de déposer des offres distinctes pour les seuls actifs les intéressant s'il la juge plus conforme à leurs intérêts, le tribunal étant libre de rejeter cette offre dans sa globalité, si elle ne lui apparaît pas en rapport avec les intérêts de la procédure collective, étant observé que l'offre s'inscrit dans le cadre d'une procédure collective unique ouverte sous patrimoine commun des neufs sociétés du groupe SF3I par un jugement du 19 mars 2014, dont le caractère définitif n'est pas contesté".
- sur l'indivisibilité de deux offres dans deux procédures collectives distinctes, écartée : "Le débat relatif à l'indivisibilité de l'offre avec celle présentée concomitamment dans la procédure collective de la Sci Cosand 2, autre société du groupe, propriétaire d'un ensemble immobilier jouxtant celui appartenant à la société Aubevoye, importe peu dès lors que le jugement du 5 août 2015 intervenu dans la procédure collective Cosand 2 a pris acte du retrait de la condition suspensive liant les deux offres et a définitivement arrêté le plan de cession des actifs de Cosand 2 en faveur de SLMB, Cosand 2 s'étant désistée de son appel, de sorte que tout aléa à cet égard a disparu et que l'offre ne sera donc pas jugée irrégulière sur ce point".
Pour appréhender cette solution, il convient de rappeler qu'au sens de l'article L642-1 du code de commerce "La cession de l'entreprise a pour but d'assurer le maintien d'activités susceptibles d'exploitation autonome, de tout ou partie des emplois qui y sont attachés et d'apurer le passif."
Cette appréciation est effectuée par le Tribunal au regard de l'entreprise cédée et pas d'autres du même groupe.
Etant précisé que le Tribunal ne peut imposer au candidat des charges non prévues à son offre, sauf à s'exposer à un appel du candidat retenu (L661-6 du code de commerce Le cessionnaire ne peut interjeter appel du jugement arrêtant le plan de cession que si ce dernier lui impose des charges autres que les engagements qu'il a souscrits au cours de la préparation du plan) (sur la notion de charges nouvelles voir les voies de recours)
Pour autant, le Tribunal n'est pas tenu d'adopter l'offre en bloc, et il dispose par exemple de son pouvoir de décider que des biens cédés seront inaliénables, même si le candidat ne l'a pas prévu (L642-10). Ce qui établit donc que le Tribunal n'est pas totalement lié par les termes de l'offre.
Mais surtout la question est de savoir si un candidat peut, en présence de plusieurs procédures collectives indépendantes (sans confusion des patrimoines) mais liées (par exemple un groupe de société) indiquer que les offres de reprises qu'il présente pour plusieurs de ces entités sont "indivisibles" entre elles ? Autrement dit, le candidat obligerait le Tribunal à retenir toutes ses offres (ou aucune d'entre elles) même si, pour certaines procédures collectives elles ne sont pas les mieux disantes (en réalité d'ailleurs dans ce cas le candidat présente une offre unique dont le prix est ventilé entre les procédures collectives concernées).
Le mécanisme est fréquent.
La réponse se trouve sans doute dans l'appréciation de la notion de "charges" imposées par le Tribunal : si le Tribunal retient, nonobstant l'indivisibilité affichée, un des offres de cession, dans l'une des procédures collectives, sans retenir, dans les autres procédures collectives, les autres offres du même candidat, lui impose-t-il des charges autres que celles qu'il a souscrit ? A priori, dans le cadre d'une appréciation procédure collective par procédure collective, la réponse est négative.
Ainsi, et même si le fait de ne pas tenir compte de l'indivisibilité de l'offre peut compliquer le projet économique du candidat, il semble que le Tribunal est libre de sa décision.
Admettre le contraire reviendrait à permettre à un candidat d'imposer au Tribunal, sans une procédure collective donnée, de retenir une offre moins disante que les offres concurrences, au motif que, dans une autre procédure collective, son offre est meilleure.
Ce procédé revient finalement à annihiler les effets de l'indépendance des procédures collectives.
Il revient également à considérer que le candidat ne présente qu'une offre globale, alors qu'en réalité il lui appartient de présenter autant d'offres que de procédures collectives distinctes : vu de cette manière l'offre globale indivisible est en réalité un conglomérat d'offres, chacune sous condition que les autres soient retenues ... or l'offre sous condition ne peut être retenue à notre sens, alors que la première que le Tribunal retiendrait le conduirait à arrêter un jugement sous condition - même non formulée - de ses jugements suivants.
Il est manifestement souhaitable de combattre ces pratiques, qui tendent à imposer un choix au Tribunal.
Deux modalités sont possibles :
- considérer que l'offre est irrecevable, car contraire à l'autonomie des procédures collectives et comportant, en réalité une condition suspensive. L'offre indivisible est en effet en réalité une ensemble de plusieurs offres, dans plusieurs procédures collectives, et la clause d'indivisibilité a en réalité pour effet que chaque offre est sous condition suspensive que l'autre soit retenue. Ce faisant, et dès lors que le Tribunal ne peut retenir une offre sous condition, il doit toutes les rejeter car elles sont toutes sous condition, y compris la première "sous offre" qu'il retiendrait.
Pour plus de détail voir condition suspensive / résolutoire
C'est notamment (mais c'est assez équivoque dans la décision) pour cette raison que le tribunal de commerce de QUIMPER, par jugement du 1er aout 2012, a rejeté les offres de cession indivisibles présentées pour un ensemble de sociétés en redressement judiciaire (distincts, c'est à dire sans confusion des patrimoines) en retenant "que par cette pratique (des clauses d'indivisibilité) à laquelle les offrants n'ont pas entendu renoncer, le tribunal ne peut statuer en toute liberté sur les plans de cession de chacune des procédures collectives en raison de l'indissociabilité revendiquée, qu'il s'agit là manifestement d'une position contraire à l'autonomie des procédures collectives distinctes de chacune des sociétés en redressement judiciaire", ce dont il a tiré qu'en réalité chaque offre, pour chaque société, était sous condition que l'autre soit retenue. Tenant le fait que les offres sous conditions sont irrecevables, le Tribunal les a écartées.
- passer outre : le Tribunal peut parfaitement retenir une offre du candidat, dans une procédure collective, et pas une autre offre du même candidat, même stipulée indivisible, dans une autre procédure collective, et on voit mal que l'appel du candidat prospère dans la cession pour laquelle il a été retenu, faute de justifier de "charge non souscrite". Cette seconde solution a l'avantage sur la première de permettre au tribunal de conserver une des offres du candidat, et pas les autres, et de retenir ainsi pour les autres procédures collectives des offres concurrentes mieux disantes.
Du point de vue de l'efficacité, cette seconde solution est donc plus pertinente, puisque la première conduit à écarter toutes les offres "indivisibles" du candidat alors que dans ce cas le Tribunal peut "panacher" différentes offres présentées comme indivisibles.
A priori les deux moyens sont sérieux, et le premier imparable.
La jurisprudence est rare, et il conviendrait que les tribunaux la développent pour reprendre la main et ne pas se laisser instrumentaliser par des offres indivisibles qui les privent de jouer pleinement leur rôle décisionnel
Après leur envoi à l’administrateur judiciaire, que deviennent les offres ? Sont-elles publiques ?
Pendant le délai de réception des offres, l’administrateur ne divulgue pas le contenu des offres reçues.
Ce n’est qu’à l’expiration du délai fixé pour la réception des offres, que l’administrateur judiciaire informe le mandataire judiciaire, le débiteur, le représentant des salariés et les contrôleurs (L642-2 IV), dépose les offres reçues au greffe où elles sont publiques (L642-2 qui précise que tout intéressé peur en prendre connaissance) et rédige le rapport qu’il présentera au Tribunal, qui est également déposé au greffe.
Il semble acquis que l'offre qui n'aurait pas été déposée au greffe n'est pas recevable, puisque le dépôt est destiné à l'information des tiers et à assurer la transparence du processus.
Concernant les offres modifiées, l'article R642-1 dispose "Les modifications des offres effectuées dans les conditions du V de l'article L. 642-2 sont communiquées par le liquidateur ou l'administrateur s'il en a été désigné, aux personnes mentionnées au IV de l'article L. 642-2". Or ce texte ne prévoit pas de "communication des offres, mais dispose "IV.- Le liquidateur ou l'administrateur lorsqu'il en a été désigné informe le débiteur, le représentant des salariés et les contrôleurs du contenu des offres reçues. Il les dépose au greffe où tout intéressé peut en prendre connaissance. Elles sont notifiées, le cas échéant, à l'ordre professionnel ou à l'autorité compétente dont le débiteur relève."
Il semble donc légitime, même si le texte ne le dit pas expressément, d'en tirer que les modifications des offres doivent être déposées au greffe à l'expiration du délai de modification, où elles doivent être publiques.
Calendrier procédural
L'article R631-39 du code de commerce prévoit que sauf si les parties y renoncent, il doit s'écouler un délai de 15 jours entre l'expiration du délai de réception des offres et l'audience.
Etant rappelé que les offres peuvent être modifiées dans le sens de l’amélioration (L642-2), mais au plus tard deux jours ouvrés avant l’audience devant statuer sur le plan (R642-1).
Si le tribunal décide de renvoyer l’affaire à une autre date, que se passe-t-il ?
L'audience à laquelle le tribunal a prévu d'évoquer la cession d'entreprise est fixée à l'avance, et le greffe adresse les convocations prévues par les textes (R642-3 du code de commerce). Il se peut qu'à cette date le tribunal décide de renvoyer l'affaire à une audience ultérieure dont il indique alors la date: les personnes présentes ne seront pas re-convoquées, l'indication de la date de la future audience leur étant donnée et il est donc important que cette date soit notée par eux.
Multiples raisons de renvoi
L''évocation de l'affaire peut être renvoyée à une audience ultérieure à celle initialement prévue: les raisons de ce renvoi peuvent être multiples :
- juridiques à connotation administrative (par exemple le juge commissaire fait partie de le formation du tribunal, alors que les textes ne lui permettent pas de siéger),
- de convenance de l'une ou l'autre des parties qui en fait la demande au Tribunal, lequel l'accepte (par exemple le débiteur ne peut être présent)
- dictées par la nécessité pour le tribunal de disposer de précisions sur le contenu des offres (par exemple permettre aux candidats de justifier de leur solvabilité)
- ou encore motivées par le souhait que les offres puissent être améliorées, voire même que de nouvelles offres puissent être prises en considération.
Aménagement des conséquences du renvoi par le tribunal
Le renvoi peut ne donner lieu qu'à une mention au plumitif et en marge du dossier.
Mais l'article R642-1 du code de commerce prend en considération la diversité de ces circonstances. Ce texte dispose en son alinéa 4 "En cas de renvoi de l'affaire à une audience ultérieure, le tribunal peut fixer un nouveau délai pour la présentation de nouvelles offres ou l'amélioration des offres préalablement déposées."
Ainsi, en fonction des raisons du renvoi, le tribunal peut, et à la lettre du texte cela ne semble être qu'une faculté, décider d'impartir un nouveau délai pour améliorer leurs offres aux candidats qui se sont déjà manifestés , et il peut également décider de fixer un nouveau délai à l'intérieur duquel de nouveaux candidats pourront se présenter (pour un exemple Cass com 13 octobre 2015 n°14-11983)
Le recours à un nouveau délai est en réalité fréquent:
- il s'avère que des offres proches et difficiles à départager sont susceptibles d'être améliorées,
- une offre est améliorée "hors délai" (moins de deux jours avant l'audience, voire sur l'audience) et le tribunal estime dommageable de devoir écarter cette amélioration,
- un candidat dépose une offre hors délai qui aurait été concurrentielle par rapport aux autres,
- il est probable que des offres n’ont pas pu être formalisées dans le premier délai, et il est de l’intérêt de l’entreprise d’ouvrir un nouveau délai.
La transparence peut ainsi jouer dans l'intérêt de tous et l'appréciation souveraine du tribunal en la matière repose sur le sentiment qui se dégagera du rapport des organes de la procédure et de la lecture des offres et intentions, adressées dans et hors les délai.
Il s’agit de permettre que les débats soient contradictoires et d’éviter que l’audience devienne le lieu de surenchères.
Comment interpréter un renvoi "imprécis" au regard de la lettre de l'article R642-1 alinéa 4 ? Le traitement des offres
Rappelons avant tout que les offres ne peuvent être retirées tant que le tribunal n'a pas statué sur la cession : autrement dit les candidats ne peuvent retirer leur offre à la faveur d'un nouveau délai fixé par le Tribunal.
Une question peut se poser si l'audience est renvoyée à d'autres fins que l'amélioration des offres ou la présentation de nouvelles offres, c'est à dire si le tribunal ne fixe pas de nouveau délai. Une nouvelle offre serait elle recevable pour autant qu'elle soit déposée plus de deux jours avant l'audience ? Une modification d'une offre dans le sens de l'amélioration serait-elle admissible, là encore à la condition de se situer plus de deux jours avant l'audience ?
Dans le même esprit, une autre question peut aussi se poser si le tribunal ne fixe qu'un délai d'amélioration d'une offre, une offre nouvelle est-elle possible ?
Et à l'inverse si le tribunal ne fixe qu'un délai de présentation de nouvelles offres, les offres déjà déposées peuvent-elles être améliorées ?
Ces questions ne semblent pas avoir été tranchées, et ce d'autant plus que les textes ont évolué plusieurs fois. La Cour de Cassation ne semble pas avoir été saisie dans des conditions lui permettant de statuer sur la question de droit.
A priori il nous semble légitime de se positionner en lecteur de la décision de renvoi au regard de la lettre de l'article R642-1: la formule "le tribunal peut fixer un nouveau délai ... " évoque bien une faculté et pas une obligation ni une prorogation d'office d'un délai antérieur: le délai n'existe que par la décision qui le fixe.
Ainsi, il semble raisonnable de soutenir que si le tribunal a renvoyé sans nouveau délai, il serait mal venu de prendre en considération l'amélioration de celui des candidats qui tente de passer en force, alors peut-être que d'autres n'ont pas modifié leur offre en pensant - légitimement - que cette faculté ne leur était pas expressément ouverte. On peut ajouter que l'alinéa 3 de l'article R642-1 du code de commerce prévoit la possibilité d'améliorer les offres jusqu'à deux jours de l'audience fixée pour l'examen des offres par le Tribunal : en cas de renvoi de l'audience, il n'en demeure pas mois que la date fixée pour l'examen des offres reste celle de la première audience.
De même il semble que si l'alinéa 4 de l'article R642-1 du code de commerce prend le soin de distinguer entre un délai d'amélioration des offres et un délai de dépôt de nouvelles offres, en laissant au tribunal la faculté d'ouvrir l'un ou l'autre, ou les deux, c'est qu'une nouvelle offre ne sera pas admise au prétexte que le tribunal a fixé un délai d'amélioration. Si le tribunal ne fixe qu'un délai d'amélioration, c'est pour départager deux ou plusieurs candidats déjà en lice, et pas pour en admettre de nouveaux.
Le seul cas où l'imprécision du tribunal est sans conséquence est celui où il fixerait un délai de présentation de nouvelles offres sans préciser que les améliorations sont également possibles: à notre avis, malgré cette imprécision, une amélioration sera toujours admissible, car elle peut être perçue comme une nouvelle offre. On peut observer que l'article R642-1 dans sa version antérieure à 2009 disposait "En cas de renvoi de l'affaire à une audience ultérieure, le tribunal peut fixer un nouveau délai pour la présentation de nouvelles offres." c'est à dire n'évoquait pas les améliorations: certains soutiendront que si le texte a ensuite été modifiée pour adjoindre les améliorations, c'est qu'elles étaient exclues antérieurement, nous pensons plutôt que le texte a voulu clarifier une situation acquise implicitement.
En jurisprudence, le seul arrêt de la Cour de Cassation qui semble faire référence à l'application de l'article R642-1 est dans un cas où le tribunal avait ouvert du délai d'amélioration des offres et avait in fine admis une offre nouvelle: c'est un arrêt de rejet, non pas au motif que la Cour de Cassation admet le procédé , mais au motif que le pourvoi n'était pas ouvert (Cass com 13 oct 2015 n°14-11983 statuant sur le pourvoi contre un arrêt de la Cour de RENNES du 5 nov 2013). On comprend de cet arrêt que l'excès de pouvoir aurait dû être invoqué, seul moyen susceptible de rendre admissible le pourvoi en cassation d'une partie (mais s'il semble évident que l'offre aurait dû être écartée, il n'est pas certain qu'il y ait excès de pouvoir, les juridictions pouvant alors "surfer" sur une mauvaise application du texte, mais évidemment heureusement en s'exposant aux recours ouverts au Parquet, qui, eux, ne sont pas conditionnés par l'excès de pouvoir (L661-6 et L661-7))
Ainsi, en tous les cas, un renvoi par simple mention au dossier ne devrait donner lieu qu'à examen de l'affaire très exactement dans l'état où elle se trouvait à la précédente audience, sans amélioration d'offre ni nouvelle offre.
Une solution inverse
- permettrait finalement à un candidat nouveau de se présenter 2 jours avant l'audience de renvoi, sans que son offre ait été analysée dans les rapports des organes de la procédure (mais il est vrai que le texte dit qu'ils sont "entendus") et surtout sans même que la consultation des représentants des salariés ait été effectuée (en violation de l'article L 642-5 si des licenciements sont prévus).
- aurait pour conséquence qu'une décision de renvoi simplement prononcée à l'audience, qui n'est donc pas matérialisée par un jugement au sens propre du terme, pourrait "profiter" à ceux qui en ont connaissance (soit officiellement parce qu'ils étaient à l'audience renvoyée, soit parce qu'ils sont informés par une partie) et à eux seuls: c'est l'inverse du courant actuel de transparence.
Une offre adressée à l’administrateur judiciaire au-delà du délai fixé est-elle recevable ?
L’organisation de la procédure repose sur une logique qui amène une transparence : les offres sont reçues dans un délai, puis sont déposées au greffe où elles sont publiques, ce qui permet aux candidats d’améliorer leur première offre après avoir pris connaissance de celle des autres candidats.
La question est de savoir si le processus permet à de nouvelles offres de s’immiscer dans cette organisation :
Les opinions sont partagées :
- La majorité des auteurs considèrent qu’une offre reçue hors délai est recevable si elle reste dans le délai de 15 jours avant l’audience (sauf s’il est renoncé à ce délai).
Dans cette interprétation, si l’administrateur n’a pas encore rédigé son rapport au moment de la réception de l’offre il la mentionne comme les autres en précisant qu’elle est hors délai, et la dépose au greffe. L’administrateur n’est en effet pas juge de la recevabilité de l’offre.
Si l’administrateur a déjà déposé son rapport, il en informe les destinataires de ce rapport.
Même dans ce schéma d’interprétation relativement souple, l’offre ne peut être présentée à l’audience ni reçue moins de 2 jours avant l’audience, ce qui permet aux autres candidats d’améliorer le cas échéant leur offre.
- D’autres auteurs pensent que l’offre reçue hors le délai fixé n’est pas recevable.
Cependant cela peut –être dommage pour les créanciers d’écarter une offre.
Donc dans les deux cas, le tribunal a la faculté de renvoyer l’audience et de fixer un nouveau délai, qui permettra à tous les candidats de présenter de nouvelles offres ou des améliorations des offres précédentes, dans un contexte de transparence et d’égalité entre eux.
En tout état le législateur a été guidé par un souci de transparence qu’il convient de concilier avec l’intérêt des créanciers : il serait logique dans cette optique qu’une offre nouvelle soit recevable, mais à la condition que les autres candidats qui avaient respecté les délais puissent améliorer leur propre proposition, connaissance prise de l’offre nouvelle.
Ainsi il nous semble logique que l’offre nouvelle soit reçue, mais soit soit portée à la connaissance des candidats dans les 2 jours pour qu’ils puissent améliorer leur offre, soit donne lieu, si c’est possible, à un renvoi de l’audience qui ouvrira un nouveau délai.
Mais dans le doute sur l’interprétation du texte, la bonne stratégie est de déposer une première offre dans le délai, puis de prendre connaissance au greffe des offres concurrentes, et d’améliorer si nécessaire la première offre.
(en liquidation judiciaire le délai de 15 jours n'est pas applicable)
Qui décide si l'offre doit être retenue ? Quels sont les critères de choix ? La procédure de cession d’entreprise
Déjà par principe ce n’est ni l’administrateur ni le mandataire judiciaire, ni le liquidateur qui va décider de la cession d'entreprise
En cas de « cession d’entreprise », l’administrateur qui va se charger de faire un rapport pour présenter l’offre et c’est le Tribunal qui décide
C’est en effet un jugement qui va arrêter la cession d'entreprise, et ainsi à la différence de l’acte de disposition en période d’observation, ce n’est pas le juge commissaire qui est compétent mais le tribunal
Concrètement le tribunal statue après une audience à laquelle sont appelés le débiteur, l’administrateur judiciaire, le mandataire judiciaire qui représente les intérêts des créanciers, le représentant des salariés et à laquelle le Procureur de la République fait des réquisitions .Le juge commissaire a préalablement fait un rapport au tribunal,
L'article L642-5 du code de commerce énumère en effet les personnes appelées à être entendues par le tribunal lors de l'audience du tribunal devant statuer sur la cession d'entreprise: "Après avoir recueilli l'avis du ministère public et entendu ou dûment appelé le débiteur, le liquidateur, l'administrateur lorsqu'il en a été désigné, les représentants du comité d'entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel et les contrôleurs" et précise que les débats ont lieu en chambre du conseil. Ainsi aucun texte ne prévoit l'audition des candidats (qui en tout état ne peuvent modifier leur offre), même s'il est de pratique courant qu'ils soient entendus. La Cour de Cassation précise d'ailleurs que "le tribunal n'est pas tenu de procéder à l'audition des candidats repreneurs et que ceux-ci, quand bien même seraient-ils entendus pour une bonne administration de la justice, n'ont pas de prétentions à soutenir au sens des articles 4 et 31 du nouveau Code de procédure civile ; que dès lors, .... qui n'était pas partie à l'instance et à l'encontre de laquelle aucune condamnation n'a été prononcée, est irrecevable à se pourvoir" Cass com 22 mars 1998 n°87-15902
L'article L642-5 du code de commerce précise la procédure d'avis et d'audition et l'organisation des débats:
"Après avoir recueilli l'avis du ministère public et entendu ou dûment appelé le débiteur, le liquidateur, l'administrateur lorsqu'il en a été désigné, les représentants du comité d'entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel et les contrôleurs, le tribunal retient l'offre qui permet dans les meilleures conditions d'assurer le plus durablement l'emploi attaché à l'ensemble cédé, le paiement des créanciers et qui présente les meilleures garanties d'exécution. Il arrête un ou plusieurs plans de cession.
Les débats doivent avoir lieu en présence du ministère public lorsque la procédure est ouverte au bénéfice d'un débiteur dont le nombre de salariés ou le chiffre d'affaires hors taxes est supérieur à un seuil fixé par décret en Conseil d'Etat."
L'article R642-3 du code de commerce précise ce texte en fixant les modalités de convocation :
"Les personnes appelées à l'audience au cours de laquelle il est débattu de l'arrêté du plan de cession sont convoquées selon les modalités prévues à l'article R. 626-17." c'est à dire "Dès le dépôt au greffe du projet de plan par le débiteur, le greffier convoque, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, le débiteur, les représentants du comité d'entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel et les contrôleurs."
Le ministère public ainsi que l'administrateur et le mandataire judiciaire sont avisés de la date de l'audience.
Ce même texte précise les documents à produire
Lorsque le plan de cession prévoit des licenciements pour motif économique, le liquidateur, ou l'administrateur lorsqu'il en a été désigné, produit à l'audience les documents mentionnés à l'article R. 631-36 (c'est à dire "Lorsqu'en application du III de l'article L. 631-19 l'administrateur ou le débiteur prévoit dans son projet de plan des licenciements pour motif économique, il joint au rapport déposé au greffe ou il produit à l'audience les documents suivants : 1° Le procès-verbal des délibérations du comité d'entreprise ou des délégués du personnel consultés en application de l'article L. 321-9 du code du travail ; 2° La copie de la lettre informant l'autorité administrative, en application de l'article L. 321-8 du code du travail, du projet de licenciement.")
Le contenu des offres dans la cession d’entreprise : c'est un véritable projet économique, social et financier (voir articles L 642-2 II + R 642-2)
Le choix du tribunal est dicté par plusieurs critères, et en cas de concurrence entre plusieurs candidats, le tribunal ne va pas se déterminer uniquement en fonction du prix proposé, et de la solvabilité du candidat c'est à dire de son aptitude à garantir le paiement du prix: la qualité du projet d'entreprise, et de l'aspect social (nombre de salariés maintenus, conditions proposées) sont déterminants. Ce n'est donc pas forcément le plus offrant en terme de prix qui sera retenu.
D'ailleurs l'article L642-1 du code de commerce (également applicable au redressement judiciaire) dispose "la cession de l'entreprise a pour but d'assurer le maintien d'activités susceptibles d'exploitation autonome, de tout ou partie des emplois qui y sont attachés et d'apurer le passif."
La plupart des commentateurs considèrent que le texte présente des objectifs par ordre d'importance: et d'ailleurs l'article L642-5 du code de commerce précise que " Après avoir recueilli l'avis du ministère public et entendu ou dûment appelé le débiteur, le liquidateur, l'administrateur lorsqu'il en a été désigné, les représentants du comité d'entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel et les contrôleurs, le tribunal retient l'offre qui permet dans les meilleures conditions d'assurer le plus durablement l'emploi attaché à l'ensemble cédé, le paiement des créanciers et qui présente les meilleures garanties d'exécution": le maintien de l'activité et des emplois passe incontestablement avant l'apurement du passif.
C'est la raison pour laquelle l'article L642-2 du code de commerce prévoit que l'offre contient des prévisions d'activité et de financement, des indications sur le niveau et les perspectives d'emploi (ce qui suppose à notre avis que si le candidat envisage à court terme de licencier certains salariés repris, il doit l'indiquer) et sur les prévisions de cession d'actif dans les deux années qui suivront la cession (si le candidat envisage de démanteler l'entreprise, son projet n'est pas un projet de cession d'entreprise) .
C'est dire l'importance du projet, de la pérennité de l'activité et de l'emploi dans le choix du tribunal.
Le jugement du tribunal ne vaut pas acte de cession, elle autorise l’administrateur judiciaire à signer l’acte de cession.
Les cessions concernées par le processus de cession d’entreprise :
Le terme d’entreprise est assez ambigu.
Concrètement on peut parler de branche d’activité ou de fonds de commerce en activité.
En activité car même en cas de liquidation la cession d’entreprise suppose la poursuite d’activité : L642-2 prévoit « lorsque le tribunal estime que la cession totale ou partielle de l’entreprise est envisageable, il autorise la poursuite de l’activité »)
Quelques règles à connaître dans le cadre de la cession d'entreprise et de la rédaction des offres: les particularités de la cession d’entreprise par rapport aux autres processus
C’est le mode de réalisation le plus élaboré et le plus complet : Reprendre une entreprise en activité, ça ne peut se limiter à un simple achat d’actif.
Pour que ça fonctionne il faudra aussi reprendre des salariés, des contrats, c'est-à-dire au-delà d’un actif purement matériel tout ce qui est nécessaire au maintien de l’activité.
Et ça ne suffit pas de vouloir reprendre des salariés ou des contrats, il faut être assuré, à l’autre bout de la relation contractuelle, que les salariés, les partenaires dans les contrats dont on a absolument besoin ne pourront pas se défiler.
Dans la cession d’entreprise il y a trois pièges qui sont le pendant de ces particularités (et ce sont des différences par rapport à la cession des actifs) , qu’il fait absolument maîtriser pour faire une offre: les salariés, les contrats et le prix
Les salariés transférés, licenciés et le sort particulier des salariés protégés à licencier
En cession d’entreprise, le candidat veut être certain que les salariés resteront dans l’entreprise.
La loi lui en donne les moyens.
Le code du travail a en partie régi depuis longtemps la question des transferts d’entreprise.
L'article L122-12 alinéa du code du travail devenu L’article L1224-1 dispose:« Lorsque survient une modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société de l'entreprise, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise »
La cession d’entreprise expose directement le cessionnaire au jeu de l’article 1224-1 puisque par hypothèse les salariés ne sont pas licenciés (par contre la cession des actifs du débiteur, en principe les salariés sont licenciés en raison de la liquidation judiciaire et de l'impératif de licencier les salariés dans les 15 jours du jugement : seul un risque de priorité de réembauche peut exister)
Or généralement une des causes des difficultés d’une entreprise est une masse salariale trop élevée et il faut bien concilier les nécessités de la protection des salariés avec celles du transfert d’entreprise.
Mais d'une part il faut être certain que les salariés resteront, mais d'autre part il ne faut pas non plus que la loi impose au cessionnaire de le garder tous.
Ce serait évidemment paradoxal que par l’effet de l’article L1224-1 du code du travail le cessionnaire s’expose à conserver tous les salariés, alors que bien souvent, comme indiqué ci dessus, une entreprise est en difficulté en raison d’une masse salariale trop élevée.
Certainement si la loi n’avait pas prévu quelque chose, la plupart des reprises seraient compromises.
Le code de commerce prévoit donc que le cessionnaire précise dans son offre le nombre de salariés qu’il envisage de reprendre et les postes concernés (et évidemment pas le nom des salariés, l’ordre légal des licenciements doit être respecté.)
Il y a donc dans la rédaction de l’offre une nécessité absolue de connaissance des données sociales pour ajuster l’offre.
Si le tribunal adopte la proposition de cession, il précisera dans son jugement qu'il autorise le licenciement des salariés non repris, en application de l'offre de cession et de l'ordre légal des licenciements.L642-5 al 5 le jugement précise les licenciements qui doivent intervenir dans le délai d’un mois, par simple notification de l’administrateur judiciaire s’il en est désigné un, à défaut du liquidateur.
Ainsi:
Les salariés dont les postes de travail ne sont pas repris pour lesquels l’article L1224-1 ne jouera pas,. seront licenciés pour motif économique par l'administrateur judiciaire.(même si, en conséquence de la cession, le tribunal prononce immédiatement la liquidation judiciaire, c'est bien à l'administrateur judiciaire qu'il incombe de licencier les salariés Cass soc 12 janvier 2016 n°14-13414). Pour plus de détail sur le licenciement voir le mot
Le jugement de cession détermine les activités et catégories professionnelles concernées Cass soc 18 mai 2022 n°20-10953
Les salariés dont les postes de travail sont repris seront transférés au nouvel employeur ( l'"acheteur" de l'entreprise) très exactement aux mêmes conditions de salaires, conditions de travait ... L'ancienneté acquise chez le précédent employeur est transférée au nouvel employeur.
Ces modalités de transfert s'imposent autant au salarié repris, qui ne peut pas refuser de changer d'employeur ( sauf à démissionner) qu'à l'employeur lui même qui ne peut pas modifier unilatéralement le contrat de travail.
Le code du travail organise très précisément ce transfert. L'article L 1224-1 du code du travail dispose:
« Lorsque survient une modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société de l'entreprise, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise »
Une particularité doit être connue pour les créanciers protégés : s'il était prévu le licenciement d'un salarié protégé, nécessitant l'autorisation de l'inspecteur du travail, et que cette autorisation est refusée, l'article L1224-1 jouera et le salarié pourra faire valoir son droit à réintégration auprès du cessionnaire, qui ne pourra s'abriter derrière la décision de cession et le contenu de son offre. Cass soc 16 octobre 2001 n°99-21586
Sauf précision chacun des employeurs successifs a la charge finale des congés payés acquis prorata temporis. Il est cependant fréquent que dans le cadre de l'offre de cession le candidat propose d'assumer en sus du prix la totalité des congés acquis, ce qui évite que chaque fois qu'un salarié part en congé le cédant soit appelé (ou l'AGS) à prendre en charge tout ou partie de ces congés.
Les contrats :
Les contrats transférés
Dans la cession de l’entreprise, le cessionnaire veut être certain que les contractants de l’entreprise, ceux dont il a impérativement besoin, ne vont pas résilier leurs contrats.
Pour un exemple simple on peut penser à l’abonnement téléphonique ou le site internet qui permettent aux clients de trouver l’entreprise. Ces "petits" contrats sont indispensables.
C’est évidemment un point très important quand on reprend une entreprise en activité que tous les contrats de fourniture de bien ou services, de crédit bail, de location.. qui seront jugés nécessaires à la poursuite de l’activité soient transférés avec un bon niveau de sécurité juridique.
C'est ce que prévoit la loi selon la procédure décrite ci dessous
Cela suppose évidemment que ces contrats soient encore en cours ( et ne soient donc pas résiliés)
La notion de contrat semble assez large dans le texte, et c'est à notre avis de manière critiquable que certaines Cours d'appel ont considéré que les chantiers en cours au profit de clients de l'entreprise pouvaient être cédé sans que le formalisme de la cession forcés soit respectée : il nous semble au contraire que tout contrat qui contribue à l'activité et qui lui est nécessaire, quelle que soit la position contractuelle du débiteur, doit être cédé dans le cadre du jugement de cession d'entreprise. La condition légale est double :
- contrat de crédit-bail, de location ou de fourniture de biens ou services
- nécessaires au maintien de l'activité
Certains auteurs soutiennent que seuls les contrats de fournitures de biens ou services dont bénéficient le débiteur peuvent faire l'objet d'une cession forcé, ce qui ne serait pas le cas des contrats passés avec les clients du débiteur. La solution se défend, même si le texte n'est pas aussi précis, et il n'est pas certain que les contrats passés avec les clients ne puissent pas faire l'objet d'une cession forcée, dès lors qu'ils sont, à l'évidence, nécessaires au maintien de l'activité.
Le débat n'est pas tranché en jurisprudence par la Cour de Cassation, et il est vrai que certaines cours d'appel considèrent que la cession ne peut porter que sur des contrats "fournisseurs" et pas sur des contrats "clients"
Par exemple un arrêt Cour d'appel de Bastia, 20 juin 2012, n° 11/00984 juge que l'article L642-7 est un mécanisme dérogatoire qui porte atteinte à la liberté contractuelle, qui ne saurait s'interpréter de manière extensive et ne permet pas de forcer les clients du débiteur à continuer à recourir à ses services, les contrats au sens de l'article L642-7 étant ceux qui procurent des biens ou des services au débiteur et non ceux qu'il exécute au profit de ses clients. Cette décision n'est pas totalement convaincante car elle ne correspond pas littéralement au texte. Mais à l'inverse la cession de marché public semble possible, alors que c'est finalement un contrat "client" comme un autre.
D'ailleurs il convient de relever qu'au visa du dernier alinéa de l'article L642-7 les contrats qui ne sont pas cédés peuvent être résiliés par le juge commissaire sur simple demande du contractant, si le liquidateur ne les poursuite pas, et ce texte s'adresse à l'évidence aux contrats étrangers à l'activité et pas, heureusement, aux contrats passés avec les clients.
Le doute est donc permis, et on ne voit pas ce qui empêche le tribunal d'ordonner la cession forcée d'un contrat de prestation de service au prétexte qu'il est passé avec un client et pas avec un fournisseur. En outre L'article L642-7 alinéa 3 prévoit que le contrat cédé doit être exécuté à ses clauses et conditions et on voit mal le préjudice pour le client.
En réalité, appliquer la cession forcée de contrat aux contrats passés avec les clients peut poser un problème pratique de nombre de personnes à convoquer par exemple, mais ce problème est plus pratique que juridique
Pour la cession d'entreprise la loi (L642-7 du code de commerce) organise donc la cession forcée des ) : le candidat va indiquer la liste des contrats qu’il estime nécessaires, et que le tribunal, s’il est en accord avec cette liste, va ordonner le transfert de ces contrats qui va s’imposer aux contractants. Il n'existe pas de dispositif comparable en cession des actifs du débiteur, encore que l'article 1216 du code civil permettent , mais avec l'accord du contractant, de céder la position contractuelle du cédant). Ce processus de cession forcée de contrat n’existe qu’en cession de l’entreprise.
Il faudra donc pour la rédaction de l’offre connaître le fonctionnement de l’entreprise, savoir ce qui est nécessaire.
On peut demander à l‘administrateur judiciaire la liste des contrats en cours avec leurs conditions . L'expression contrats de crédit bail, location, fourniture de biens ou services ne recoupe pas tous les contrats, et par exemple un contrat de prêt n'est pas transférable sur ce fondement. Pour les contrats avec une personne publique, voir le mot clause d'agrément
Pour les contrats publics voir ce mot
La cession forcée expose les contractants à poursuivre l'exécution du contrat, dans les conditions prévues, et sous la sanction de la résiliation, également dans les conditions contractuelles Cass com 2 mai 2024 n°23-10823
Les contrats concernés et le débat sur les contrats intuitu personae
Le débat peut exister pour des contrats à forte connotation personnelle (on dit intuitu personae) pour lesquels certains pensent que la cession forcée n'est pas possible, précisément en raison du fait que le contractant a été choisi en fonction de sa personne. C'est la raison pour laquelle le contractant concerné est convoqué par les soins du greffe au moins 15 jours avant l'audience devant statuer sur la cession (article R642-7)
A priori cette distinction entre la nature du contrat n'a pas véritablement lieu d'être, sauf des cas très marginaux où l'engagement du contractant repose véritablement sur sa personne.
Notamment certains auteurs - et certaines juridictions - pensent que le contrat de franchise ne pourrait pas faire l'objet d'une cession forcée ( voir revue l'Essentiel mai 2014 n°69 TGI de Strasbourg 20.12.2013 2013/003929 qui reprend des arrêts de Cour d'appel notamment Versailles 28 Mars 1996, CA Paris 15 décembre 1992, CA Orléans 14 Septembre 2000) mais en réalité ces décisions se comprennent plus en cas de procédure collective du franchiseur que du franchisé, la cession d'entreprise faisant échec par principe aux droits particuliers du contractant (préemption, surenchère ..). Il semble en outre que l'évolution tende à admettre la cession du contrat de franchise, si les conditions légales sont réunies, c'est à dire si le cession est nécessaire à la poursuite de l'activité ... ce qui est une évidence si c'est le franchiseur qui est cédé (voir JCP Entreprise 6.11.2014 page 19). Il en est de même des contrats par exemple de concession exclusive et autres contrats de distribution.
Certains considèrent d'ailleurs que ce n'est pas sur la notion d'intuitu personnae que porte en réalité le débat, mais sur le fait de savoir si le contrat est un contrat de fourniture de biens ou de services (domaine de l'article L642-7 du code de commerce), et si les obligations contractuelles peuvent ou pas, être réalisées par le contractant "cédé". Cela fait peu de doute concernant la franchise, qui devrait pouvoir, selon nous, faire l'objet d'une cession forcée dans le cadre d'une cession d'entreprise.
Mais par exemple on voit mal un écrivain, un compositeur ou un musicien en remplacer un autre, choisi spécifiquement pour son talent et ses particularités, et dans ce cas la cession du contrat sera impossible.
De même, la question d'un contrat de financement peut se poser : a priori ce n'est pas un contrat en cours et il n'est donc pas cessible (Cass com 9 février 2016 n°14-23229), mais la solution peut être différente pour une ligne de financement (par exemple un crédit stock) : dans ce cas à notre avis le caractère intuitu personnae est un obstacle au transfert, sauf évidemment accord de la banque
Les seules réserves qui existent concernent le bail rural, qui pourra être cédé s'il est l'élément essentiel de l'exploitation et ne pourra pas l'être à défaut ( L411-35 du code rural et Cass com 28 avril 1998 n°95-20682)
Enfin il convient de préciser que si le contrat est cédé, celles de ses clauses qui sont strictement consenties au profit de contractant cédé ne devraient pas profiter au cessionnaire. C'est par exemple le cas d'un pacte de préférence Cass com 13 février 2007 n°05-17296
Dans la cession d’entreprise la loi organise la cession forcée des contrats (on devrait plutôt dire cession forcée de la position contractuelle du débiteur dans le contrat)
Le texte L 642-2 prévoit que le candidat va indiquer la liste des contrats qu’il estime nécessaires, et que le tribunal, L642-7 s’il est en accord avec cette liste, va ordonner le transfert de ces contrats qui va s’imposer aux contractants. Le jugement doit énumérer les contrats cédés Cass com 13 octobre 2015 n°14-19157 et ne peut se contenter de faire référence à l'offre et/ou ses annexes (sauf si le contractant poursuite le contrat Cass com 27 octobre 1998 n°96-14666
La liste des contrats figurant dans l'offre du candidat apparait comme un bloc : le tribunal ne peut semble-t-il , sauf à imposer des charges supplémentaires au candidat, lui imposer de reprendre un contrat non listé (Cass com 15 décembre 2009 n°08-21235), ou écarter un contrat qu'il souhaitait reprendre sauf à s'exposer à un recours.
La décision du tribunal n'est pas entachée d'excès de pouvoir dès lors qu'elle inclue dans la cession une convention nécessaire à la poursuite d'activité (Cass com 23 septembre 2020 n°18-26280, cette décision étant assez obscure car on croit comprendre que le tribunal a ordonné le transfert de certaines obligations et pas d'autres, ce qui, si c'était le cas, serait injustifié)
Procéduralement l'article R642-7 prévoit que les contractants sont convoqués par le greffe, à l’audience du tribunal et le jugement emportera cession des contrats (ce qui pour autant ne leur donne pas qualité de partie pouvant relever appel Cass com 19 décembre 2018 n°17-17398), au moins quinze jours avant l'audience, par courrier recommandé avec accusé de réception
Pour la sanction du non respect de la convocation du contractant voir les voies de recours
Contrats non transférés
L'article L642-7 du code de commerce dispose "Le cocontractant dont le contrat n'a pas fait l'objet de la cession prévue par le deuxième alinéa peut demander au juge-commissaire qu'il en prononce la résiliation si la poursuite de son exécution n'en est pas demandée par le liquidateur"
Les contrats non cédés ne sont en tout état pas résiliés d'office par les effets du jugement de cession Cass com 6 octobre 2009 n°07-15325 ni d'ailleurs par le tribunal dans le jugement qui arrête la cession Cass com 10 mars 2009 n°07-16325
Le prix ou plus exactement les "compléments du prix" :
Il n’y a pas que des avantages à la cession d’entreprise. Et là on touche l’inconvénient majeur, les pièges principaux et donc la source principale de responsabilité si vous ignorez ces différences.
En cession de l’entreprise, la loi impose d’autres charges que le paiement du prix
Il est impératif de tenir compte de deux textes qui ne s’appliquent qu’en cession d’entreprise :
Transfert de la charge des prêts de financement des biens cédés, assortis de sûretés spéciales et pour les échéances à échoir à compter du transfert de propriété avec le cessionnaire
L'article L642-12 du code de commerce alinéa 4 dispose « la charge des sûretés immobilières et mobilières spéciales garantissant le remboursement d'un crédit consenti à l'entreprise pour lui permettre le financement d'un bien sur lequel portent ces sûretés est transmise au cessionnaire. Celui-ci est alors tenu d'acquitter entre les mains du créancier les échéances convenues avec lui et qui restent dues à compter du transfert de la propriété ……Il peut être dérogé aux dispositions du présent alinéa par accord entre le cessionnaire et les créanciers titulaires des sûretés »
Le texte de l'article L642-12 modifié, applicable pour les procédures ouvertes à compter du 1er Octobre 2021 ajoute que ka condition est que les créances correspondantes aient été régulièrement déclarées et dispose désormais
"Toutefois, la charge des sûretés réelles spéciales, garantissant le remboursement d'un crédit consenti à l'entreprise pour lui permettre le financement d'un bien sur lequel portent ces sûretés est transmise au cessionnaire. Celui-ci est alors tenu d'acquitter entre les mains du créancier, qui a régulièrement déclaré sa créance dans les délais prévus à l'article L. 622-24, les échéances convenues avec lui et qui restent dues à compter du transfert de la propriété ou, en cas de location-gérance, de la jouissance du bien sur lequel porte la garantie. Le débiteur est libéré de ces échéances. Il peut être dérogé aux dispositions du présent alinéa par accord entre le cessionnaire et les créanciers titulaires des sûretés."
Pour expliquer plus simplement le cessionnaire d’un fonds de commerce sur lequel une banque a un nantissement ou une hypothèque – sureté mobilière spéciale au sens du texte – et pour lequel au jour du jugement de redressement judiciaire ou de liquidation il reste des échéances à venir, s’expose, en cession d’entreprise, à payer ce qui est du sur le prêt (ou plus exactement ce qui restera du au jour du transfert de propriété Cass com 29 novembre 2016 n°15-11016 ce qui est évidemment inférieur à la déclaration de créance à échoir du créancier, qui englobe les échéances de la période d'observation).
Le texte pose une condition pour que le transfert de la charge du prêt s'impose: le crédit doit bénéficier d'une sûreté immobilière ou mobilière spéciale (par exemple une hypothèque ou un nantissement) et avoir été consenti pour financer le bien sur lequel porte la sûreté spéciale en question (par exemple l'immeuble sur lequel est prise hypothèque ou le fonds de commerce sur lequel porte le nantissement).
Le contrat de financement doit permettre de vérifier que les conditions sont réunies "le crédit devant être affecté, l'acte par lequel il est accordé doit préciser sa destination et prévoir la sûreté qui en garantira le remboursement " Cass com 23 novembre 2004 n°02-12982 et évidemment la sûreté spéciale (ou tout au moins la décision d'affectation) doit être concomitante avec le financement, et ne peut donc être prise a postériori ni être judiciaire.
Le contrat peut porter sur l'acquisition du bien ou son amélioration Cass com 17 mai 2011 n°10-17736. En effet, même si le texte est imprécis, il recouvre le financement stricto sensu de l'acquisition ou la construction du bien sur lequel porte la sûreté, mais également de sa rénovation ou de son amélioration, mais à la lettre du texte il ne porte pas sur le refinancement ou le financement a postériori de biens initialement auto-financés (par exemple Cass Com 23 novembre 2004 n°02-12982), et le texte ne s'appliquera pas non plus si le financement n'a pas été effectivement employé pour l'utilisation prévues au contrat lors du déblocage du prêt.
En outre le jugement arrêtant la cession ne préjuge pas de la validité de la garantie prise par le créancier, et si le jugement prévoit le transfert de la charge du prêt, une telle décision n'a pas autorité au regard de la possibilité dans le cadre de la vérification des créances, de contester la validité de ladite garantie qui peut donc être rejetée Cass com 7 novembre 2018 n°17-24233 et donner lieu à une admission chirographaire qui n'emportera donc aucun transfert de la charge du prêt.
A ce sujet les textes sont trompeurs car ils indiquent que les conditions sont vérifiées par le Tribunal lors de l'audience statuant sur la cession "Le tribunal vérifie que les conditions requises par l'article L. 642-12 sont remplies et constate dans le jugement arrêtant le plan les sûretés dont la charge est transmise. Un extrait du jugement est adressé par le greffier aux personnes mentionnées à l'article R. 642-7." (Article R642-19 du code de commerce) et l'article R642-7 prévoit que les contractants sont convoqués à l'audience 'lorsque le Tribunal est "appelé à constater le transfert", et a contrario il n'y a pas lieu à convocation si les conditions ne sont pas réunies
De sorte que si le texte n'évoque pas expressément la question du financement sur lequel existe un doute que les conditions soient réunies, il n'est pas prévu que ce créancier soit convoqué.
Etant ajouté qu'il faut en pratique éviter qu'il tire argument d'avoir été convoqué pour prétendre au transfert du contrat. Les pratiques hésitent donc, soit l'administrateur prend la responsabilité de ne pas solliciter la convocation des créanciers qui, bien qu'inscrits sur les biens cédés, ne remplissent pas, à son avis, les conditions, soit par précaution il sollicite leur convocation pour que le tribunal statue expressément sur le fait que la charge du prêt ne sera pas transférée ... mais le texte ne prévoit pas cette convocation puisque l'article R642-7 ne prévoit la convocation que pour permettre au tribunal de constater le transfert. A priori en cas de doute il semble préférable de solliciter une convocation)
On pourrait logiquement s'attendre à ce que ces mesures soient des protections du cessionnaire s'il advient qu'un financement ne soit pas révélé à ces étapes.
Mais la jurisprudence considère que même si personne n’en dit rien, et même si ce n’est pas dans le jugement, ni dans l’acte le cessionnaire s'expose à subir le transfert du prêt. Il suffit que le bien financé soit cédé pour que le transfert opère, même si le cessionnaire ignorait l'existence du prêt. Le transfert s'opère de plein droit Cass Com 19 octobre 2010 n°09-68377 Cass com 30 octobre 2012 n°11-12588
L'accord du cessionnaire n'est pas nécessaire Cass com 30 octobre 2012 n°11-12588 et il ne peut invoquer une charge nouvelle non prévue à son offre, dès lors que le transfert est légal.
Plus précisément est ponctuellement évoqué l'excès de pouvoir du tribunal qui ne statuerait pas dans le respect des textes, mais cela semble interprété très restrictivement (Cass com 18 janvier 2011 n°10-30024) et en tout état l'excès de pouvoir ne peut être constaté que dans le cadre de l'exercice de voies de recours, par hypothèse fermées ou brèves.
Donc il est impératif avant de faire une offre de savoir si des prêts soumis à l’article L642-12 existent – déjà a minima d’avoir un état des nantissements (greffe) ou des inscriptions d'hypothèques (service de la publicité foncière) et s’il y en a les déclarations de créance correspondantes- , et s’il y en a soit d’en tenir compte dans l’offre, soit de discuter avec le contractant pour trouver un accord sur une somme.
C’est en plus du prix (Cass com 23 novembre 1993 n°91-16846) , ça n’a pas à être mentionné dans l’offre, ça ne peut être écarté dans l’offre ni dans le jugement (Cass com 4 janvier 2005 n°02-19099), ça s’imposera (si la juridiction décide que le contrat ne remplit pas les conditions pour bénéficier de l'article L642-12, la Cour de Cassation refuse au créancier conservé la possibilité d'un appel nullité (Cass com 15 décembre 2009 n°08-21553)
Certains candidats ont pour pratique de préciser dans leur offre que si un prêt qu'ils n'ont pas prévu s'avère soumis à l'article L642-12, leur prix de cession sera diminué d'autant, ce qui semble admissible et éviter les désagrément de se voir transféré un prêt non prévu sans pouvoir critiquer la décision (si le prêt est effectivement transférable).
Le transfert jouera pour celles des échéances à échoir postérieurement à la cession (c'est à dire non pas le jugement de cession mais l'acte de cession ou plus exactement le transfert de propriété convenu Cass com 29 novembre 2016 n°15-11016 ) et d'ailleurs le texte vise les échéances qui restent dues, ce qui ne peut donc correspondre à une situation dans laquelle la déchéance du terme a été prononcée.
Les échéances transférées sont, le cas échéant celles qui avaient été renégociées par le débiteur avant la cession et pas dans ce cas les échéances du contrat initial Cass com 7 octobre 2020 n°19-13721
Il convient de préciser que, pour les procédures ouvertes avant le 1er octobre 2021, dans l'esprit que la délégation de l'article 1337 alinéa 2 du code civil, le transfert de la charge du prêt ne vaut pas novation (changement de débiteur) et ne décharge donc pas la caution sauf accord express des parties Cass com 9 février 2016 n°14-23229 et Cass com 31 janvier 2017 n°15-10021 . ou Cass com 8 janvier 2020 n°18-21925 ou accord du créancier pour un aménagement de la dette qui préjudicie à la caution Cass com 9 novembre 2022 n°20-18264
Ainsi non seulement le débiteur initial reste tenu des dettes transférées, mais le créancier inscrit sur le bien dispose d'un droit de suite sur le bien pour les échéances transférées et dispose donc d'un titre pour saisir le bien entre les mains du cessionnaire Cass com 20 mars 2019 n°17-29009
Le texte de l'article L642-12 modifié, applicable pour les procédures ouvertes à compter du 1er Octobre 2021 a modifié le sort du débiteur initial et dispose désormais que le débiteur est libéré des échéances transférées.
Il dispose en effet
"Toutefois, la charge des sûretés réelles spéciales, garantissant le remboursement d'un crédit consenti à l'entreprise pour lui permettre le financement d'un bien sur lequel portent ces sûretés est transmise au cessionnaire. Celui-ci est alors tenu d'acquitter entre les mains du créancier, qui a régulièrement déclaré sa créance dans les délais prévus à l'article L. 622-24, les échéances convenues avec lui et qui restent dues à compter du transfert de la propriété ou, en cas de location-gérance, de la jouissance du bien sur lequel porte la garantie. Le débiteur est libéré de ces échéances. Il peut être dérogé aux dispositions du présent alinéa par accord entre le cessionnaire et les créanciers titulaires des sûretés."
La question de savoir si la libération du débiteur pour les échéances transférées au cessionnaire, profite à la caution.
Après des hésitations, il semble que ce ne soit pas le cas, car l'article 2298 du code civil ne permet pas à la caution de se prévaloir des mesures légales dont bénéficie le débiteur en raison de sa défaillance, ce qui est bien le cas. Ce qui reviendrait à dire que si le cessionnaire et le créancier dérogent au transfert de la charge des suretés par un accord entre eux, non seulement le débiteur n'est pas nécessairement libéré des échéances (différence entre leur montant et le montant de l'accord), mais a fortiori la caution ne l'est pas ... et ce alors même que l'accord dérogatoire est pris hors sa présence. Ceci étant la caution sera subrogée dans les droits du créanciers - qui n'a pas renoncé vis à vis du débiteur à la totalité des échéances à échoir - et bénéficiera de la sureté spéciale, qui devrait, selon nous, s'exercer sur la quote part du prix fixée par le Tribunal (sauf si le créancier y a renoncé, ce que la caution lui reprochera - voir caution).
Pour décrire le processus de manière plus détaillée, en cession d'entreprise, le cessionnaire subit le transfert de la charge des suretés, ce qui libère le débiteur, mais a priori pas la caution (2298 alinéa 2 du code civil).
1. Dans ce cas la caution est tenue de ces échéances, a minima si elles ne sont pas payées (et dans ce cas elle pourra agir contre le cessionnaire).
2. La caution est par ailleurs tenue des échéances antérieures à la cession (avant même le jugement d'ouverture et le cas échéant de la période d'observation).
Pour cette dernière catégorie de créance, la subrogation s'exerce sur la quote-part du prix fixée dans le jugement de cession.
3. Et s'il advient que le créancier et le cessionnaire négocient un accord dérogatoire sur le montant du transfert de la charge, le débiteur n'est à notre avis, pas libéré de la différence entre les échéances qui auraient du être transmises au cessionnaire s'il n'y avait pas eu accord, et le montant de l'accord. A fortiori la caution ne l'est pas, et ce alors même qu'elle est étrangère à l'accord.
De sorte que la caution va être appelée pour cette différence, et, là encore, la subrogation va (à notre sens) s'exercer sur la quote-part de prix affectée au bien par le jugement de cession.
Autrement dit, pour ses deux chefs de subrogation, la caution va s'exercer sur la quote-part du prix fixée par le tribunal, en rang correspondant à la sureté spéciale.
Si le créancier croit utile, dans le cadre de l'accord dérogatoire, de donner main-levée de sa garantie, alors qu'il n'y est pas obligé, il fait perdre à la caution le bénéfice de cette sureté.
Précisons qu'en tout état le repreneur est exonéré du droit de suite par l'article L642-12 alinéa 3 , y compris si le prix n'est pas payé mais sauf, dans ce cas, en cas de revente du bien.
Enfin en cas de substitution de cessionnaire, autorisée dans le jugement, et sauf clause expresse, le candidat initialement retenu, qui reste tenu des engagements du plan, n'est pour autant pas tenu de payer les échéances des prêts transférés Cass com 30 janvier 2019 n°17-15036
Procéduralement, les créanciers titulaires de sûreté dont la charge est transféré sont convoqués comme les contractants (R642-7)
Il doit être précisé que le Tribunal n'a pas à se prononcer sur le transfert des engagements de caution, qui sont des garanties personnelles non concernées par le dispositif. Cass com 15 décembre 2021 n°17-28020
affectation d'une part du prix aux créanciers inscrits
Dans le cas où ils ne sont pas concernés par le transfert de la charge du financement de leur acquisition, c'est à dire où leur acquisition n'a pas été financée par le créancier titulaire d'un privilège spécial, il faut bien que la cession du bien qui fait l'objet de sureté spéciale, inclus dans la cession d'entreprise, soit pris en considération, d'une part pour que le cessionnaire soit affranchi du droit de suite, et d'autre part pour que le créancier inscrit puisse être payé à la mesure de la partie du prix qui correspond au bien en question.
Et même si la charge du financement du bien est transférée au cessionnaire, il faut bien que la créance garantie due au jour du transfert de propriété au cessionnaire (échéances échues au jour du jugement d'ouverture de la procédure + échéances de la période d'observation) puisse s'exercer sur une partie du prix. Enfin en cas d'accord dérogatoire (voir ci dessus) sur le transfert de la charge du financement au cessionnaire, cet accord ne libère pas le débiteur de la totalité de la somme due postérieurement à la cession, et, une fois encore, la sureté doit s'exercer ... sur la quote part du prix de cession.
Pour ces raisons :
Pour les procédures ouvertes avant le 1er octobre 2021 L'article L642-12 du code de commerce dispose donc
Lorsque la cession porte sur des biens grevés d'un privilège spécial, d'un gage, d'un nantissement ou d'une hypothèque, le tribunal affecte à chacun de ces biens, pour la répartition du prix et l'exercice du droit de préférence, la quote-part du prix, déterminée au vu de l'inventaire et de la prisée des actifs et correspondant au rapport entre la valeur de ce bien et la valeur totale des actifs cédés.
Le paiement du prix de cession fait obstacle à l'exercice à l'encontre du cessionnaire des droits des créanciers inscrits sur ces biens.
Jusqu'au paiement complet du prix qui emporte purge des inscriptions grevant les biens compris dans la cession, les créanciers bénéficiant d'un droit de suite ne peuvent l'exercer qu'en cas d'aliénation du bien cédé par le cessionnaire.
Autrement dit, le créancier inscrit peut recevoir une somme inférieure à celle qui lui est dû, et perdra son droit de suite. C'est bien souvent la caution qui fait les frais de cette opération
Pour les procédures ouvertes à compter du 1er octobre 2021
Le nouvel article L642-12 ajoute que le créancier doit avoir déclaré créance pour bénéficier du transfert de la charge des suretés.
Dans le cas d'un bien dont la charge du financement est transmise au cessionnaire, les deux dispositifs semblent complémentaires : les échéances post cession seront transférées au cessionnaire, et celles qui sont antérieures s'exerceront sur la part de prix affectée par le Tribunal (et donc la caution sera le cas échéant subrogée dans la sûreté spéciale). L'aménagement conventionnel entre le cessionnaire et le créancier de la charge du transfert n'a pas d'effet sur la sureté spéciale, qui a vocation à perdurer ... de sorte que si le créancier en donne main levée il s'expose à ce que la caution lui en fasse le reproche.
En tout état
Etant précisé que le Tribunal n'est pas tenu de suivre la valorisation proposée par le repreneur dans son offre, et que celui-ci ne pourrait tirer argument d'une valorisation différente pour exercer des recours, dès lors évidemment que globalement le prix proposé reste identique.
La question est différente en cas de droit de rétention (manifestement avec ou sans dépossession) , le texte de l'article L642-12, qui précise Les dispositions du présent article n'affectent pas le droit de rétention acquis par un créancier sur des biens compris dans la cession" ne pouvant imposer au titulaire du droit de rétention de perdre ce droit contre un paiement simplement partiel au prétexte d'un simple report de son droit sur une quote-part du prix Cass com 20 mai 1997 n°95-12925 "Attendu que la cession de l'entreprise, par suite de l'adoption d'un plan de redressement, ne peut porter atteinte au droit de rétention issu du gage avec dépossession qu'un créancier a régulièrement acquis sur des éléments compris dans l'actif cédé ; qu'en l'absence de disposition légale en ce sens le créancier rétenteur ne peut être contraint de se dessaisir du bien qu'il retient légitimement que par le paiement du montant de la créance qu'il a déclarée, et non par celui d'une quote-part du prix de cession qui serait affectée à ce bien pour l'exercice du droit de préférence" ou "le commissaire à l'exécution du plan de cession d'un débiteur, ayant constitué un gage avec dépossession sur un meuble, ne peut, à moins que le détenteur du gage n'en abuse, en réclamer la restitution qu'après avoir entièrement payé, tant en principal qu'intérêts et frais la dette pour sûreté de laquelle le gage a été donné" Cass com 3 mai 2011 n°10-16146. L'alinéa 5 de l'article L642-12 dispose d'ailleurs "Les dispositions du présent article n'affectent pas le droit de rétention acquis par un créancier sur des biens compris dans la cession."
Ainsi en cas de cession d'entreprise, le jugement ne porte pas atteinte au droit de rétention (article L642-12 alinéa 5), de telle manière que le cessionnaire qui voudra conserver le bien devra régler le créancier, indépendamment du prix de cession.
Il est donc très important pour un candidat à la cession de vérifier le registre des gages sans dépossession: à défaut il pourrait croire qu'un bien fait partie des actifs de l'entreprise et est donc inclus dans les biens qui lui seront transférés contre paiement du prix de cession, alors qu'en réalité le créancier pourra exiger la restitution du bien ou un paiement qui s'ajoutera au prix.
Procéduralement, le créancier inscrit n'a pas à être convoqué à l'audience statuant sur le plan et, par voie de conséquence fixant la quote part de prix sur laquelle s'exercera sa créance.
Il semble que si le Tribunal omet de statuer sur la quote-part du prix, il y ait matière à requête en omission de statuer, encore que la question soit controversée ( sauf si le bien cédé est le seul, auquel cas l'affectation est inutile Cass com 14 juin 2023 n°21-15864)
Le créancier n'a pas de voie de recours sauf excès de pouvoir (et encore ce n'est pas certain) par tierce opposition.
- Cass com 15 décembre 2009 n°08-21553 pour l'appel , dès lors que le créancier n'est pas partie à la décision.
- La voie de la tierce opposition, qui serait la plus logique, semble également fermée sauf peut être en cas d'excès de pouvoir.
Certains auteurs considèrent que, dès lors que l'article L642-12 précise que la quote-part du prix est fixée "au vu de l'inventaire et de la prisée des actifs et correspondant au rapport entre la valeur de ce bien et la valeur totale des actifs cédés", le bien ne doit pas subir plus de décote que les autres actifs, et qu'à défaut le Tribunal commettrait un excès de pouvoir.
Levée d'option des crédits baux
L'article L642-7 du code de commerce dispose " En cas de cession d'un contrat de crédit-bail, le crédit-preneur ne peut lever l'option d'achat qu'en cas de paiement des sommes restant dues dans la limite de la valeur du bien fixée d'un commun accord entre les parties ou, à défaut, par le tribunal à la date de la cession »
On peut avoir une cession forcée de crédit bail en cession de l’entreprise (sur les conséquences voir Cass com 20 septembre 2017 n°16-14065)
Là encore pour expliquer simplement le cessionnaire qui demande le transfert d’un contrat de crédit bail, ne pourra lever l’option en fin de contrat qu’en payant non pas seulement le montant de la levée d’option prévue au contrat, mais aussi la totalité de la créance échue du crédit bailleur, c’est-à-dire l’arriéré au jour du redressement judiciaire, et dans la limite de la valeur du bien.
C’est la conséquence de l’économie du contrat de crédit bail qui est à la fois une location et une vente à crédit
Là encore le cessionnaire a intérêt pour éviter les mauvaises surprises à trouver un accord sur la valeur du bien.
Surtout que les juridictions ne fixent en principe pas de valeur de levée d'option, de sorte qu'en réalité le cessionnaire ne pourra lever l'option qu'en réglant la totalité de l'arriéré.
Les droits d'enregistrement et/ou la TVA
Le droit commun s'applique. voir notamment la TVA
Il convient de préciser qu'en cession d'entreprise, les droits sont assis non seulement sur le prix de cession stricto sensu, mais également sur les charges augmentatives du prix (qu'il s'agisse de la reprise de congés payés, du transfert de la charge d'un prêt, ou de la levée d'option d'un crédit bail (Cass com 27 mai 2015 n°14-14744)
Le prix "net vendeur" un prix hors taxes et droits
Cass com 24 Janvier 2018 n°16-22301
Enfin attention aux clauses de solidarité
Voir le mot "solidarité" du lexique: pour résumer certaines clauses sont écartées la loi ( par exemple la clause par laquelle le cédant reste garant du cessionnaire) mais d'autres ne le sont pas (par exemple la clause par laquelle le cessionnaire est solidaire du cédant, ce qui peut l'exposer à un complément de prix indirect puisqu'il assume les obligations du cédant.
Les suites de la décision du tribunal arrêtant la cession d'entreprise
Le déroulement de la cession :
Il faut un acte de cession.
Un acte de cession : qui le rédige ?
On rebascule dans le droit commun ou tout au moins les usages communs
Cet acte est en principe rédigé par le conseil de l’acheteur.
L’administrateur judiciaire peut imposer un conseil en « double minute », mais n’a pas à imposer son rédacteur.
Un acte de cession qui le signe ?
L'article L631-22 du code de commerce précise que l'administrateur reste en fonction pour passer tous les actes nécessaires à la réalisation de la cession. Il signe donc les actes.
L'administrateur judiciaire n'a que cette mission, et n'a pas qualité par exemple pour "discuter" du périmètre de la cession Cass com 5 février 2020 n°18-19576. Cette décision est assez singulière car l'administrateur qui est sur le point de signer un acte de cession devrait pouvoir saisir le tribunal en interprétation de sa décision, même s'il n'a pas de voie de recours (et c'est sans doute sur l'absence de voie de recours qu'il faut interpréter la décision)
Gestion de la période entre le jugement et les actes de cession
L'article L642-8 du code de commerce permet au tribunal ( et ce n'est donc pas l'administrateur judiciaire qui en décide par différence avec les anciens textes) de confier la gestion de l'entreprise au cessionnaire retenu dans l'attente de l'accomplissement des actes de cession et sur justification de la consignation du prix.
Dans ce cas le cessionnaire devient contractant des partenaires du débiteur (Cass com 6 janvier 1998 n°95-15407) et employeur des salariés au visa de l'article L1224-1 du code du travail (Cass soc 26 novembre 1996 n°95-42006)
Le tribunal peut également autoriser la conclusion d'un contrat de location gérance au profit du cessionnaire le temps que les actes soient passés (L642-13)
Quand a lieu le transfert de propriété et des risques ?-
Pour les cessions d'entreprise, le transfert de propriété s'opère par l'acte de cession ( Cass com 6 décembre 1994 n°91-17684 Cass com 26 janvier 1993 n°91-40308 sauf si le tribunal prévoit un transfert à la prise de possession Cass com 6 janvier 1998 n°95-1407): l'acte est en tout état nécessaire (L642-8 du code de commerce)
l'article L642-8 du code de commerce prévoit en effet que le tribunal dans sa décision peut confier la gestion de l'entreprise au cessionnaire, dans l'attente de la passation des actes (et sous justification de la consignation du prix ou d'une garantie): il en découle donc que c'est l'acte de cession qui opérera transfert de propriété mais peut en assumer préalablement les risques.
Le cessionnaire ne peut évidemment refuser de signer l'acte, et à défaut il pourra être actionné en exécution forcée.
Un acte de cession: qui signe pour le vendeur ?
L’administrateur judiciaire, c’est la loi qui le dit, article L631-22 (ex L621-89)
Que devient le prix de cession ?
La suite des opérations sera dans tous les cas une liquidation judiciaire si la cession est "totale"
En cession d’entreprise, la loi tire la juste conséquence du fait que dès lors qu’en redressement judiciaire on a cédé ce qui constituait l’activité de l’entreprise, on se trouve en situation qui justifie la liquidation judiciaire.
Le Tribunal qui ordonne la cession va donc par la même occasion prononcer la liquidation et le redressement judiciaire prend fin (ou le cas échéant dans un jugement ultérieur, quand les actes auront été passés).
Le liquidateur va prendre le relais de l’administrateur judiciaire.
L’administrateur judiciaire qui a signé l’acte peut percevoir le prix et le transmettre au liquidateur, ou même plus logiquement faire libeller directement le règlement à l’ordre du liquidateur.
(si la cession est "partielle", c'est à dire ne porte que sur une branche d'activité de l'entreprise en redressement judiciaire, l'article R631-42 précise que le prix est remis au mandataire judiciaire qui le remet au commissaire à l'exécution du plan une fois que le plan est adopté)
Substitution de cessionnaire
L'offre peut prévoir une substitution de cessionnaire: c'est généralement le cas si une personne physique présente une offre et prévoit de constituer une société si son offre venait à être retenue: il prévoit une clause de substitution au profit de la société à constituer.
Il peut également y avoir des substitutions pour d'autres raisons.
Dans tous les cas l'article L642-9 prévoit que le Tribunal doit autoriser la substitution (sous la sanction de la nullité pendant trois ans à compter de l'acte ou de sa publicité s'il y est soumis), et que l'auteur de l'offre reste garant solidaire des obligations qu'il a souscrites (par exemple le paiement des échéances de la période d'observation d'un contrat poursuivi Cass com 20 septembre 2017 n°16-14065
Le cessionnaire "initial" reste donc garant, ce qui
- n'englobe pas la garantie de la bonne exécution des contrats cédés en exécution du plan, mais celle de la poursuite du contrat Cass com 27 septembre 2011 n°10-24836 ce qui n'a pas pour effet que le contractant ne peut agir en paiement que contre lui : cessionnaire initial et cessionnaire substitué devront être condamnés solidairement
- ne peut aller au delà des engagements du candidats substitué Cass com 2 février 2022 n°19-19525 pour un engagement de reprise d'un effectif déterminé
Le candidat retenu, tenu des engagements de la cession, n'est pas, sauf clause contraire, tenu des échéances du prêt transféré Cass com 30 Janvier 2019 n°17-15036 ou des conséquences de la non exécution d'un contrat continué par le cessionnaire substitué (pour un contrat de location financière Cass com 12 juillet 2016 n°15-16389 : le candidat est strictement tenu dans le cadre de l'article L642-9. Autant la décision de 2019 se comprend, puisque le transfert du prêt ne découle pas d'un engagement du candidat mais de la loi, celle de 2016 se comprend moins s'agissant de la poursuite d'un contrat.
Le candidat n'est pas non plus tenu du paiement des loyers dus par le cessionnaire substitué Cass com 7 octobre 2020 n°19-11759
Quelles formalités ? Purge, préemption, agréments, solidarité fiscale
On reste toujours dans le droit commun pour les mentions obligatoires dans l’acte. En particulier mention du chiffre d’affaires et du résultat d’exploitation des 3 dernières années, … ventilation du prix entre les éléments corporels et incorporels …
Cependant on n’est pas dans le droit commun pour tout.
La cession d’entreprise est la conséquence de la décision du tribunal de céder une entreprise en activité à un repreneur désigné et choisi en raison de son projet de poursuite d’activité, de ses compétences professionnelles, de perspectives sociales
Le candidat est choisi pour sa compétence, pour sa solvabilité … on peut presque parler d’intuitu personnae dans le choix
Des textes de droit commun ne doivent pas interférer sur ce choix et changer la décision.
Ainsi schématiquement la cession d'entreprise est totalement dérogatoire par rapport au droit commun, le choix du candidat est fait par le tribunal sur la base d'un projet d'entreprise: pour cette raison la plupart des règles de droit commun sont écartées :
pas de préemption, ou de droit de préférence
Il existe en droit commun des possibilités de préemptions, par exemple préemption légale de la commune, ou préemption conventionnelle du bailleur …
Pour plus de précisions voir le mot préemption
pas de surenchère (voir le mot SAFER pour la question de la préemption prévue au code rural),
Il existe aussi en droit commun des possibilités de surenchère, du créancier hypothécaire ou nanti sur le fonds de commerce (10ème, la loi MACRON a supprimé la surenchère du 6ème pour le créancier nanti)
Il n'y a pas lieu à surenchère des créanciers inscrits (par exemple nantis sur le fonds de commerce) en cession d’entreprise (L642-8 alinéa 2)
La conséquence pratique est qu’il n’y a pas l’insertion légale prévue par le code de commerce pour la cession de droit commun (L141-12 journal d’annonces légales –supprimé par la loi Macron et rétabli par la loi du 14 novembre 2016, et BODACC) qui sert à déclencher le processus d’opposition et de surenchère: le texte prévoit d’ailleurs une dispense.
Par contre il y a mention d’office par le greffe au RCS du cédant (article 36-1 du décret du 30 mai 1984 relatif au RCS + BODACC + journal d’annonces légales (oubli de la loi MACRON sans doute R642-4 qui renvoie à R621-8)
Dès lors qu’il n’y a pas de surenchère , logiquement les inscriptions, par exemple le nantissement, peuvent être radiées sans purge. Le texte dit que le paiement du prix emporte purge, (L642-12)
Faute de droit de suite les inscriptions peuvent être radiées sans purge. Les inscriptions peuvent donc être radiées sur ordonnance du juge commissaire, sur requête du cessionnaire R642-10 Voir le mot radiationI
pas de jeu des clauses d'agrément (et a priori même les agréments légaux dans un intêret privé sont écartés)
Par exemple Cass com 6 décembre 1994 n°91-17927
Voir également contrats publics
pas de dérogation pour le jeu de la solidarité fiscale entre cédant et cessionnaire: notamment du délai de solidarité fiscale (voir ce mot) de l'article 1684 du CGI (solidarité du cessionnaire avec le cédant dans le paiement des impositions de l'année en cours et de l'exercice précédent, avec responsabilité à concurrence du prix de cession, avec possible invocation par l'administration fiscale pendant 90 jours - éventuellement 30 jours dans certains cas - à compter de la déclaration fiscale de mutation)
Vices cachés et autres difficultés
voir vices cachés
Le rejet de la cession: quel jugement ?
Voir la liquidation judiciaire
Les voies de recours et la présentation d'offres en appel
Les voies de recours sont un sujet sensible en matière de procédure collective, car il faut aller vite. Quand il y a une cession d’entreprise on ne peut pas attendre 6 mois qu’un recours soit évacué avant de redémarrer une usine, sinon ça ne vaut plus rien.
Il a fallu concilier les impératifs de rapidité avec les nécessités de ménager un certain contrôle sur les décisions
Pour plus de précisions voir les voies de recours
Modification de la cession
L'article L642-6 envisage la possibilité d'une modification de la cession à la demande du cessionnaire, étant précisé que le prix ne peut être modifié
A contrario les autres obligations du cessionnaire peuvent être modifiées, et s'il advient que des licenciements soient opérés ils seront garantis par l'AGS, le jugement modificatif faisant corps avec le jugement arrêtant la cession Cass soc 17 octobre 1990 n° 88-42713
(voir également l'article R642-5 et R642-6 sur les modalités procédurales)
Inexécution de la cession et/ou refus de passer les actes de cession
Le refus du cessionnaire de régulariser les actes de cession peut donner lieu à exécution forcée (comme en matière de cession de biens) et/ou à dommages intérêts Cass com 26 octobre 1999 n°96-19156 Cass com 28 novembre 2000 n°97-21442
Il peut également donner lieu à résolution de la cession.
Voir résolution (qu'il s'agisse d'actes de cession non passés ou d'autres engagements inexécutés)