Contrats interdépendants (nullité, résolution et résiliation du contrat interdépendant, conséquences sur les autres contrats)

Voir résolution et résiliation

Quelques points de la définition

Généralités et postulat de résiliation, résolutions ou annulation du contrat interdépendant

Domaine des contrats interdépendants

Intérêt de la question des contrats interdépendants

Le code de la consommation n'est pas applicable : résolution, résiliation ou annulation du contrat interdépendant et sort des autres contrats notamment contrat de prêt contrat de crédit bail : résolution / nullité du contrat lié mais plus probablement caducité

Effet de la résolution, résiliation ou nullité du contrat interdépendant sur les autres contrats : la caducité, en suite de décisions plus anciennes qui avaient retenu celle de la résiliation, résolution ou l'annulation du contrat lié

Solution abandonnée: la résiliation des autres contrats interdépendants

Les conséquences de la résiliation

Solution en droit positif : la caducité des autres contrats

Effet de la caducité des autres contrats interdépendants : pas d'application des clauses contractuelles de résiliation ou clauses pénales et mise à l'écart des clauses incompatibles avec l'interdépendance des conventions

Effet de la caducité: dommages intérêts

Le code de la consommation est applicable : résolution ou nullité du contrat interdépendant et résolution ou annulation des autres contrats interdépendants

Domaine d'application du code de la consommation et circonstances retenues pour la nullité du contrat

La nullité ou la résolution du contrat principal ou interdépendant entraine nullité ou résolution des autres contrats.

Les conséquences pratiques : les restitutions et paiements

Généralités et postulat : résiliation / résolution / annulation du contrat interdépendant

En premier lieu en cas de contrats inter- dépendants consistant en un prêt et un contrat de fourniture, le préteur doit s'assurer que le contrat principal est correctement exécuté (par exemple pour une contrat portant sur des panneaux photovoltaïques qui n'ont pas été correctement installés Cass civ 1ère 23 janvier 2019 n°17-27956 )

Mais c'est sur les conséquences de la fin d'un contrat sur l'autre contrat que la question a le plus d'intérêt.

La résiliation et la résolution sont des modes de rupture d'un contrat pour défaut d'exécution des obligations.

La réforme du droit des obligations est venue modifier ces deux dispositifs, et la résiliation est maintenant une variété de résolution, quand il n'y a pas lieu à remise en état rétroactif (voir le mot résolution)

(le droit des obligations tel qu'il découle de l'ordonnance du 10 février 2016 qui a modifié le code civil n'est pas applicable aux contrats conclus avant le 1er octobre 2016 (article 9 de l'ordonnance)

L'article 1229 du code civil dispose en effet:

"La résolution met fin au contrat.

La résolution prend effet, selon les cas, soit dans les conditions prévues par la clause résolutoire, soit à la date de la réception par le débiteur de la notification faite par le créancier, soit à la date fixée par le juge ou, à défaut, au jour de l'assignation en justice.

Lorsque les prestations échangées ne pouvaient trouver leur utilité que par l'exécution complète du contrat résolu, les parties doivent restituer l'intégralité de ce qu'elles se sont procuré l'une à l'autre. Lorsque les prestations échangées ont trouvé leur utilité au fur et à mesure de l'exécution réciproque du contrat, il n'y a pas lieu à restitution pour la période antérieure à la dernière prestation n'ayant pas reçu sa contrepartie ; dans ce cas, la résolution est qualifiée de résiliation.

Les restitutions ont lieu dans les conditions prévues aux articles 1352 à 1352-9."

Domaine des contrats dits inter-dépendants

Les contrats dits "interdépendants" au sens que donne la Cour de Cassation à ce terme sont des contrats qui s'inscrivent, au moment où ils ont été conclus, dans une opération unique "clé en main" :ils n'ont individuellement de sens et/ou de raison d'être qu'au regard du groupe de contrats, que les parties ont entendu contracter globalement. Le fait que, concrètement, un des contrats aurait pu être contracté séparément, avec un autre partenaire, est indifférent, si, au moment où l'ensemble a été mis en place, les parties ont précisément choisi, pour des questions de facilité, économiques, technique ou autre, que ces contrats se négocient ensemble, et que leurs prestations soient liées (et là encore, peu important le fait qu'elles auraient pu, dans d'autres circonstances, ne pas l'être.

"les contrats concomitants ou successifs qui s'inscrivent dans une opération incluant une location financière, sont interdépendants ; que sont réputées non écrites les clauses des contrats inconciliables avec cette interdépendance" Cass Mixte 17 mai 2013 n°11-22768 Cass com 7 janvier 2014 n°13-10887 Cass com 24 septembre 2013 n°12-25103 Cass com 26 novembre 2013 n°12-25191 

Cass com 24 avril 2007 n°06-12443 qui évoque l'indivisibilité qui résulte de l'économie générale de l'opération, Cass civ 1ère 28 mai 2008 n°07-10786 qui évoque le fait que le crédit bail n'a de sens qu'au vu du contrat de maintenance et d'installation, Cass com 4 avril 1995 n°93-14585 qui approuve une cour d'appel qui "a fondé sa décision relative à l'indivisibilité des conventions sur la considération de chacune d'entre elles par les parties comme une condition de l'existence des autres"

La circonstance est la suivante: "c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain que la cour d'appel a constaté que les deux actes de vente et de prêt, qui avaient été passés le même jour par-devant le même notaire, étaient intimement liés, et en a déduit que les parties avaient entendu subordonner l'existence du prêt à la réalisation de la vente en vue de laquelle il avait été conclu, de sorte que les deux contrats répondaient à une cause unique ; qu'elle a donc retenu à bon droit, non que l'obligation de l'emprunteur était dépourvue de cause, mais que l'annulation du contrat de vente avait entraîné la caducité du prêt" Cass civ 1ère 1er Juillet 1997 n°95-15642

Voir également Cass civ 1ère 20 février 2019 n°18-11279

Intérêt de la question

L'intérêt de la question réside dans les cas où un des contrats interdépendants est nul/ résilié / résolu alors que les autres ne le sont pas directement eux mêmes : notamment en procédure collective le juge commissaire peut constater la résiliation d'un contrat en cours (par exemple un contrat de maintenance ou de location) mais ne peut évidemment agir sur un contrat qui n'est plus en cours, même s'il est lié à un contrat en cours (par exemple un contrat de vente lié avec un contrat de maintenance)

(il est rappelé que la liquidation judiciaire n'emporte pas en elle même résiliation ou anéantissement du contrat de telle manière qu'elle est sans conséquence sur le contrat interdépendant Cass com 25 septembre 2019 n°18-15162

Dans ce cas la nullité / résiliation /nullité du contrat interdépendant sera utilisée pour qu'il en soit tiré des conséquences sur les contrats interdépendants, c'est à dire qui n'auraient pas existé ou n'ont plus de raison de subsister.

L'intérêt est d'autant plus grand que le contrat annulé / résilié / résolu qui génèrera des conséquences sur les autres, n'est pas, dans ce mécanisme le contrat "principal", il suffit qu'il fasse partie de l'ensemble contractuel qui n'aurait pas existé sans lui.

Par exemple la résiliation d' un contrat de maintenance d'un matériel par ailleurs objet d'un contrat de location ou de crédit bail consenti simultanément et de manière liée, aura des conséquences sur le contrat de location ou de crédit bail, alors même qu'objectivement le locataire pourrait faire assurer la maintenance auprès d'un autre prestataire. 

La décision consistant à anéantir le contrat interdépendant ne peut se prendre sans le contradictoire du contractant correspondant Cass com 9 juillet 2019 n°18-14031

Les conséquences de la résiliation / résolution (ou même de l'annulation) d'un contrat sur les autres contrats interdépendants seront examinées suivant que le droit de la consommation est ou pas applicable à la cause.

Ces conséquences sont les mêmes en cas de résiliation en suite de l'inexécution dans le cadre de la liquidation judiciaire, c'est à dire sans que les conditions dans lesquelles les conventions ont été passées soient en elles mêmes critiquables. La résiliation peut donc découler d'une décision du juge commissaire ou d'un mandataire de justice (pour la procédure voir le mot contrat en cours).

Dans ces cas, l'option de solliciter le juge commissaire pour obtenir résiliation du contrat non exécuté (par exemple le contrat de maintenance) et en chercher ensuite les conséquences sur les contrats interdépendants, est incontestablement très séduisante en terme de simplicité, par rapport à celle d'agir en résiliation ou résolution selon le droit commun (vices du consentement notamment ...).

Evidemment et par ailleurs, il se peut, en particulier dans le domaine du code de la consommation que tous les contrats soient nuls, et dans ce cas la notion de contrat liés est sans importance. C'est souvent le cas si tous les contrats ont été proposés par le même opérateur, qui a commis les mêmes erreurs.

Pour ces raisons, les conséquences de la résiliation / résolution (ou même de l'annulation) d'un contrat sur les contrats liées ou interdépendants seront examinées suivant que le droit de la consommation est ou pas applicable à la cause.

Le code de la consommation n'est pas applicable : résolution, résiliation ou annulation du contrat interdépendant et sort des autres contrats, notamment contrat de prêt contrat de crédit bail lié : résolution / nullité mais plus probablement caducité

Effet de la résolution, résiliation ou nullité du contrat interdépendant sur les autres contrats : la caducité, en suite de décisions plus anciennes qui avaient retenu celle de la résiliation, résolution ou l'annulation

Solution abandonnée : la résiliation

D'anciennes décisions ont retenu que la résolution du contrat interdépendant (ici de vente) emportait résiliation des autres contrats interdépendants (ici de crédit bail) avec un débat sur l'application des clauses contractuelles réglant les conséquences de cette résiliation Cass Mixte 23 novembre 1990 n°86-19396 Cass mixte 12 octobre 1993 n°91-17621 (qui précise que le contractant est dispensé pour l'avenir du paiement des redevances), Cass com 28 janvier 2003 n°01-00330 , Cass com 14 décembre 2010 n°09-15992 "l'anéantissement du contrat de vente entraîne nécessairement la résiliation du contrat de crédit-bail sauf cause de nullité l'affectant directement et sous réserve de l'application de clauses ayant pour objet de régler les conséquences de cette résiliation "

D'autres retenaient la solution de la caducité en écartant dans ce cas la résolution: "Attendu qu'en statuant ainsi, alors que la résiliation des contrats de location et de maintenance n'entraîne pas, lorsque ces contrats constituent un ensemble contractuel complexe et indivisible, la résolution du contrat de vente mais seulement sa caducité, l'acquéreur devant restituer le bien vendu et le vendeur son prix, sauf à diminuer celui-ci d'une indemnité correspondant à la dépréciation subie par la chose en raison de l'utilisation que l'acquéreur en a faite et à tenir compte du préjudice subi par l'acquéreur par suite de l'anéantissement de cet ensemble contractuel" Cass com 5 juin 2007 n°04-20380

Les conséquences de la résiliation

Comme déjà indiqué, la résiliation d'un contrat, c'est à dire le constat qu'il ne sera pas exécuté pour l'avenir, ne prive pas nécessairement le contractant de toute possibilité de trouver un partenaire qui lui succèdera : par exemple la résiliation d'un contrat de maintenant n'inerdit pas de faire entretenir le matériel par un autre prestataire. C'est souvent cet argument qui était invoqué par les organismes de crédit pour essayer d'échapper à des conséquences fâcheuses sur leurs conventions.

Par exemple sont passés simultanément un contrat de location vente d'un véhicule avec un organisme financier (et par l'intermédiaire d'un garagiste) et un contrat d'entretien avec le même garagiste: la liquidation du garagiste, qui met fin à ses interventions d'entretien et entraînait la résiliation du contrat d'entretien, ne devaient pourtant pas avoir d'incidence sur la location vente, et devait simplement exposer le contractant à trouver un autre garagiste pour entretenir son véhicule.

Ce n'était pas la position de la Cour de Cassation dans les cas où elle considère qu'il existe une indivisibilité entre les conventions (c'est à dire des contrats liés): la résiliation d'une convention était jugée comme entraînant la résiliation de l'autre et les clauses inconciliables avec cette interdépendance sont réputées non écrites (et notamment les clauses comportant des préavis et les clauses indemnitaires) :  Cass com 15 janvier 2008 n°06-15609 15610 15611 15612 15613 15614 identiques, dans le cas d'un crédit bail sur un bandeau d'affichage passé avec un organisme de crédit et un contrat d'achat d'affichage publicitaire matérialisé par un créneau de temps sur des supports informatiques reliés au bandeau d'affichage: la liquidation judiciaire de la société qui gérait l'affichage et les supports informatiques, et la résiliation du contrat constatée par le juge commissaire entraîne la résiliation du crédit bail "la cour d'appel a pu retenir l'indivisibilité des contrats de location et de prestation de services, peu important que le matériel puisse être utilisé à d'autres fins" . Solution identique dans Cass com 15 février 2000 n°97-19793

Solution retenue en droit positif : la caducité des autres contrats interdépendants

(pour plus de précisions voir le mot caducité)

Que la résiliation du contrat interdépendant soit prononcée par le juge commissaire dans le cadre de la poursuite des contrats en cours, ou par le juge du fond, par exemple pour vice du consentement, la Cour de Cassation a finalement opté pour la caducité des autres contrats interdépendants en ces termes "« lorsque des contrats sont interdépendants, la résiliation de l'un quelconque d'entre eux entraîne la caducité, par voie de conséquence, des autres ».

 "pour décider que les contrats de prestation de services et les contrats de location n'étaient pas indivisibles et refuser, en conséquence, de constater la caducité des seconds, l'arrêt retient que les parties ne sont pas liées par un ensemble conventionnel dont les composantes combinées révéleraient objectivement une économie générale, marquée notamment par des prestations réciproques ayant pour effet de diminuer les obligations résultant de leur engagement propre envers chacune des autres parties, ou produisant de quelque autre façon un effet s'intéressant à la permanence des contrats auxquels elles ne sont pas parties, ou même suggérant qu'elles auraient eu l'intention commune de rendre ces contrats indivisibles au bénéfice, au moins, de l'une d'entre elles, que l'exécution de chaque contrat ne dépend donc pas, dans l'intention commune des parties, de l'exécution de l'autre et qu'aucun élément ne permet d'écarter la stipulation d'indépendance figurant aux contrats de location ... la cour d'appel a violé le texte susvisé" Cass Mixte 17 mai 2013 n°11-22927 et solution identique Cass com 4 novembre 2014 n°13-24270

C'est encore ce qui a été jugé par un arrêt de chambre mixte du 13 avril 2018 n°16-21345 à propos d'un contrat de crédit bail : en cas de résolution du contrat de vente, le contrat de crédit bail est caduque.

Cet arrêt est ouvertement présenté dans sa motivation comme un changement de jurisprudence par rapport aux précédentes décisions qui retenaient la résiliation ou la nullité et vient a priori harmoniser les solutions. 

"Qu’il y a lieu, dès lors, modifiant la jurisprudence, de décider que la résolution du contrat de vente entraîne, par voie de conséquence, la caducité, à la date d’effet de la résolution, du contrat de crédit-bail et que sont inapplicables les clauses prévues en cas de résiliation du contrat ;

Que c’est donc à bon droit que la cour d’appel a retenu que le crédit-preneur devait restituer le véhicule à la banque et que celle-ci, qui ne pouvait pas se prévaloir des clauses contractuelles de garantie et de renonciation à recours, devait lui restituer les loyers perçus en exécution du contrat de crédit-bail"

Dans un cas où la résiliation pour inexécution avait été prononcée par le juge commissaire (mais il en serait donc de même si elle était prononcée par le juge du fond par exemple pour vice du consentement), la Cour de Cassation a ensuite repris cette solution "Mais attendu, d'une part, que si, lorsque des contrats incluant une location financière sont interdépendants, l'anéantissement de l'un quelconque d'entre eux est un préalable nécessaire à la caducité, par voie de conséquence, des autres, il n'est toutefois pas exigé que l'anéantissement préalable et la caducité soient prononcés ou constatés au cours d'une seule et même instance ; qu'ayant retenu, par des motifs non critiqués, que les contrats de location et de maintenance étaient interdépendants, l'arrêt relève, par motifs propres et adoptés, que dans le cadre de la liquidation judiciaire de la société Innovatys, prononcée sans continuation d'activité le 13 février 2012, le juge-commissaire a constaté l'absence de maintenance par ladite société, ce dont il a tiré les conséquences en prononçant la résiliation du contrat de maintenance ; que par ces constatations, desquelles il résulte que la résiliation du contrat de prestation avait été préalablement prononcée, de sorte qu'il n'était pas nécessaire de mettre en cause le liquidateur judiciaire de la société Innovatys, la cour d'appel en a déduit à bon droit que le contrat de location conclu avec la société Parfip était caduc" Cass com 4 juillet 2018 n°17-15597 

(voir également en suite d'une résiliation prononcée par le juge commissaire "Mais attendu, en premier lieu, qu'après avoir constaté que la société Safetic avait été mise en liquidation judiciaire le 12 février 2012 sans poursuite d'activité, l'arrêt relève que par ordonnance du 30 septembre 2012, le juge-commissaire a constaté que la société Safetic ne remplissait plus ses obligations de maintenance et a ordonné la résiliation du contrat de maintenance qui la liait à la société CER ; qu'il retient que cette résiliation a ôté tout intérêt à poursuivre l'exécution du contrat de financement, lequel, par suite de la résiliation du contrat de maintenance, est devenu sans cause dès le 12 février 2012 ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, faisant ressortir que la résiliation du contrat de maintenance avait pris effet dès cette date, la société Safetic ayant cessé d'exécuter ses obligations, la cour d'appel en a déduit à bon droit que le contrat de location était devenu caduc à compter du même jour" Cass com 12 juillet 2017 n°16-14014 , ou Cass com 20 septembre 2017 n°15-28939 ou encore Cass com 20 septembre 2017 n°16-15459 et "si l’ordonnance du juge-commissaire constatant ou prononçant la résiliation d’un contrat en cours, en application de l’article L. 641-11-1 du code de commerce, est dépourvue de l’autorité de la chose jugée à l’égard des tiers, elle leur est cependant opposable en ce qu’elle constate ou prononce cette résiliation, de sorte que la résiliation du contrat de maintenance, prononcée contradictoirement à l’égard de la société Safetic, par l’ordonnance du juge-commissaire du 26 mars 2013, entraînait, à la date de la résiliation, la caducité par voie de conséquence du contrat de location financière interdépendant" Cass com 11 septembre 2019 n°18-11401)

La distinction entre résiliation et résolution du contrat interdépendant est sans conséquence : dans les deux cas il y a caducité .

- Cass civ 1ère 4 avril 2006 n°02-18277 pour la résiliation d'un contrat de prestation de chauffagiste, qui entraîne nécessairement la caducité du contrat par lequel le prestataire s'approvisionne en combustible

- Cass com 6 février 2007 n°03-18975 la cessation d'un contrat de régie entraine caducité du contrat de crédit bail

- Cass com 21 octobre 2014 n°13-21670 pour la caducité d'une location financière conséquence de la résiliation d'un contrat de maintenance dans le cadre d'un ensemble contractuel indivisible

- Cass com 7 juillet 2015 n°14-18052 pour un crédit bail et un contrat de maintenance - avec manifestement confusion entre résiliation et résolution --

- Cass com  5 juin 2007 n°04-20380  pour la résiliation d'un contrat de location et de maintenance qui entraîne caducité du contrat de vente (le vendeur devant restituer le prix et l'acquéreur le bien, le tout sans préjudice d'une dépréciation du bien, au visa des articles 1131 et 1134 du code civil alors applicables)

La solution de la caducité a été par la suite intégrée au code civil par l'ordonnance du 10 février 2016 qui a créé un nouvel article 1186 qui dispose

"Un contrat valablement formé devient caduc si l'un de ses éléments essentiels disparaît.

Lorsque l'exécution de plusieurs contrats est nécessaire à la réalisation d'une même opération et que l'un d'eux disparaît, sont caducs les contrats dont l'exécution est rendue impossible par cette disparition et ceux pour lesquels l'exécution du contrat disparu était une condition déterminante du consentement d'une partie.

La caducité n'intervient toutefois que si le contractant contre lequel elle est invoquée connaissait l'existence de l'opération d'ensemble lorsqu'il a donné son consentement."

Etant précisé, au terme de l'article 1186 du Code Civil, que la caducité suppose que le contractant auquel elle est opposé ait connu l'existence de l'opération d'ensemble au moment de son consentement Cass Com 10 janvier 2024 n°22-20466

Le contractant, qui est tiers par rapport à la décision de résiliation du contrat "principal", "ce tiers n'est pas fondé à s'opposer à la résiliation d'un contrat auquel il n'est pas partie, mais peut toujours contester la situation d'interdépendance des contrats en cause devant le juge saisi de la demande de caducité du contrat auquel il est lui-même partie" Cass com 20 janvier 2021 n°18-11402.

La solution est identique (caducité du contrat de location financière) si la résiliation du contrat de prestation découle de la décision du liquidateur après délivrance d'une mise en demeure d'opter pour la poursuite du contrat Cass com 20 octobre 2021 n°19-24796 

Effet de la caducité des contrats interdépendants : pas d'application des clauses contractuelles de résiliation ou clauses pénales et mise à l'écart des clauses incompatibles avec l'interdépendance des conventions

L'avantage de la caducité est d'écarter dans le moindre débat les clauses contractuelles pénalisantes pour le contractant en cas de résiliation (cass com 12 juillet 2017 n°16-14014)

Il en est de même des clauses pénales Cass com 12 juillet 2017 n°15-27703 et Cass com 12 juillet 2017 n°15-23552 

Toutes les clauses aménageant la résiliation ne doivent pas trouver application comme étant non écrites Cass com 3 mai 2016 n°14-19880

"ces contrats, concomitants et s'inscrivant dans une opération incluant une location financière, étaient interdépendants, et que la résiliation de l'un avait entraîné la caducité de l'autre, excluant ainsi l'application de la clause du contrat caduc stipulant une indemnité de résiliation" Cass com 12 juillet 2017 n°15-27703 et également Cass com 12 juillet 2017 n°15-23552 pour un contrat de location lié avec un contrat de prestation de service

Enfin les clauses inconciliables avec l'interdépendance des conventions sont réputées non écrites (et notamment les clauses comportant des préavis et les clauses indemnitaires) :  Cass com 15 janvier 2008 n°06-15609 15610 15611 15612 15613 15614 identiques, dans le cas d'un crédit bail sur un bandeau d'affichage passé avec un organisme de crédit et un contrat d'achat d'affichage publicitaire matérialisé par un créneau de temps sur des supports informatiques reliés au bandeau d'affichage: la liquidation judiciaire de la société qui gérait l'affichage et les supports informatiques, et la résiliation du contrat constatée par le juge commissaire entraîne la résiliation du crédit bail "la cour d'appel a pu retenir l'indivisibilité des contrats de location et de prestation de services, peu important que le matériel puisse être utilisé à d'autres fins" . Solution identique dans Cass com 15 février 2000 n°97-19793 (ces décisions sont rendues à l'époque où c'est la résiliation qui était prononcée, ce qui ne change rien à la mise à l'écart des clauses.

Effet de la caducité; indemnisations

Deux arrêts du 12 juill. 2017 (Cass com n° 15-27703 et Cass com n° 15-23552) précisent que le juge de la caducité peut condamner le responsable de l'anéantissement des contrats « sauf pour la partie à l'origine de l'anéantissement de cet ensemble contractuel à indemniser le préjudice causé par sa faute », ce qui est concrètement assez illusoire dès lors que c'es par hypothèse le débiteur en procédure collective, mais contre lequel une créance sera donc envisageable (pour les délais de déclaration de créance voir le mot résiliation)

Le code de la consommation est applicable : résolution ou nullité du contrat interdépendant et résolution ou annulation des autres contrats interdépendants

Domaine d'application du code de la consommation et circonstances retenues pour la nullité du contrat

Voir le mot nullité pour les textes et circonstances de la nullité

La nullité ou la résolution du contrat interdépendant entraine nullité ou résolution des autres contrats.

L'article L221-29 dispose que les dispositions applicables sont d'ordre public et l'article L242-1 pour les contrats à distance ou hors établissements précise que les textes sont applicables à peine de nullité

Imaginons par exemple des particuliers qui commandent à une entreprise une cuisine, des panneaux solaires, ou toute autre bien de consommation. Ils sollicitent et obtiennent un prêt, la somme est débloquée, l'entreprise est payée, et il s'avère finalement que la livraison n'est pas effectuée, ou que le bien livré est incomplet ou défectueux, ...

La liquidation judiciaire de l'entreprise est prononcée.

Logiquement les particuliers, ex contractants de l'entreprise en liquidation judiciaire, chercheront à obtenir la résolution ou l'annulation de la vente, pour bénéficier des dispositions de l'article L311-32 du code de la consommation devenu L312-55 En cas de contestation sur l'exécution du contrat principal, le tribunal pourra, jusqu'à la solution du litige, suspendre l'exécution du contrat de crédit. Celui-ci est résolu ou annulé de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui-même judiciairement résolu ou annulé. Les dispositions de l'alinéa précédent ne seront applicables que si le prêteur est intervenu à l'instance ou s'il a été mis en cause par le vendeur ou l'emprunteur."

(par exemple pour un prêt immobilier jugé résolu en conséquence de la résolution de la vente Cass civ 1er, 1er déc 1993 n°91-20539) ou un crédit accessoire d'un contrat de vente Cass civ 1ère 10 septembre 2015 n°14-17772

Les conséquences pratiques: restitutions

S'ils ont gain de cause sur la nullité ou la résolution du contrat lié, les contractants ne seront plus tenus de rembourser le prêt pour l'avenir ... mais pour autant ils devront procéder au reversement à la banque des sommes qu'ils avaient perçues lors du déblocage du prêt (voir par exemple Cass civ 1ère 20 février 2019 n°18-11279) ... pour lesquelles ils ont une créance au passif de la liquidation judiciaire (qui bien souvent ne sera pas payée même s'il existe un débat sur le fait que cette créance soit postérieure et bénéficie du rang favorable correspondant, voir créances antérieures / créances postérieures la partie créances de restitution). En outre la créance de restitution du prix par le vendeur, pour être ordonnée doit être demandée Cass civ 1ère 6 février 2019 n°17-25859 ... ce qui si le vendeur est en liquidation se résout en un principe de créance.

Ainsi, si le code de la consommation est susceptible de jouer, il protège en partie les contractants, ce n'est qu'en cas de faute avérée de la banque dans le déblocage ou l'accord du crédit, qu'ils pourront espérer obtenir un aménagement totalement favorable de leur sort par la mise en cause de la responsabilité de la banque (défaut d'assurance de l'entreprise, prêt bancaire proposé directement par l'entreprise installatrice sans intervention ni vérification de la banque  ....). Il peut donc arriver que les consommateurs obtiennent d'être dispensés de rembourser le banque, en raison de la faute ou de la négligence de celle-ci.

La banque est tenue, avant de verser les fonds empruntés, de vérifier la régularité du contrat principal (et notamment la régularité du bon de commande et de la facture au regard des dispositions du code de la consommation) Cass civ 1ère 26 septembre 2019 n°17-20815 Cass civ 1ère 26 septembre 2018 n°17-18083

C'est par exemple également le cas quand le prêteur débloque les fonds en l'absence de livraison, et même si l'emprunteur lui a remis une attestation de livraison manifestement erronée (il arrive que les installateurs fassent signer de telles attestations pour que le prêt soit accordé et débloqué, la banque ne pouvant ignorer par exemple que cette attestation est antérieure à toute demande d'autorisation de travaux ou de permis de construire, ou exactement concommitante avec la date de signature du devis (ce qui est impossible). Dans ce cas la faute de la banque exonère l'emprunteur du remboursement (Cass Civ 1, 1er décembre 2011 n°10-24304 pour un chauffe eau solaire) ce qui est salutaire pour lui, tenant la liquidation judiciaire de l'installateur.

Voir également cass civ 1ère 12 décembre 2018 n°17-20907 et 17-20882 et par exemple pour une contrat portant sur des panneaux photovoltaïques qui n'ont pas été correctement installés Cass civ 1ère 23 janvier 2019 n°17-27956

A défaut, il y a en tout état sans doute un savant calcul à faire, surtout si une partie du prêt a été remboursée, et parfois il vaut mieux continuer le prêt que d'être tenu de reverser en une fois la totalité à la banque !!

Enfin certains contractant obtiennent la condamnation du notaire intervenu aux contrats liés à les garantir. C'est le cas par exemple pour une vente en l'état de futur achèvement par une société par la suite en liquidation judiciaire, financée par un prêt: les acheteurs ont assigné le liquidateur, le notaire et la banque en annulation de la vente et du prêt et en dommages intêrets. Le notaire qui n'avait pas mentionné à l'acte les mentions obligatoires pour ce type d'opération a été condamné solidairement avec le vendeur à réparer toutes les conséquences dommageables, en ce compris inhérentes au prêt indossociable, c'est à dire au versement du capital, des intêrets échus et des fais d'acte (et pas des intêrets non échus). Cass civ 3ème 1er juin 2017 n°16-14428