Nantissement de créance et d'assurance vie

Voir le mot saisie ( et cependant les éventuelles objections sur les créances à naissance successive)

Quelques points de la définition

Nantissement de créance et droit au paiement

Nantissement de droit commun

Nantissement dans le cadre d'une cession à titre de garantie dans un bordereau Dailly

Nantissement d'assurance vie

Nantissement de créance et procédure collective du constituant

Les sommes perçues avant le jugement d'ouverture de la procédure collective ne sont pas remises en cause

Le créancier nanti ne devrait pas avoir de droit sur les créances nées après le jugement d'ouverture de la procédure collective, mais la jurisprudence semble l'admettre: la distinction entre le nantissement de créance de droit commun et la cession de créance à titre de garantie dans le cadre d'une cession Dailly

Nantissement de créance et nullités de la période suspecte

Nantissement de créance et droit au paiement

Le terme de nantissement de créance recoupe deux notions très différentes dans les effets et le dispositif : le nantissement de droit commun, et la cession de créance à titre de garantie dans le cadre d'une cession Dailly, également dénommée nantissement de créance 

Nantissement de créance de droit commun

Le nantissement de créance est régi par les articles 2355 et suivants du code civil (nantissement de meubles incorporels)

La définition est posée par l'article 2355: Le nantissement est l'affectation, en garantie d'une obligation, d'un bien meuble incorporel ou d'un ensemble de biens meubles incorporels, présents ou futurs. Il est conventionnel ou judiciaire.

Le nantissement judiciaire est régi par les dispositions applicables aux procédures civiles d'exécution. Le nantissement conventionnel qui porte sur les créances est régi, à défaut de dispositions spéciales, par le présent chapitre.

Celui qui porte sur d'autres meubles incorporels est soumis, à défaut de dispositions spéciales, aux règles prévues pour le gage de meubles corporels."

Les modalités sont réglées par l'article 2356 "A peine de nullité, le nantissement de créance doit être conclu par écrit. Les créances garanties et les créances nanties sont désignées dans l'acte."

Les articles 2356 alinéa 3, et 2357 du code civil prévoient le nantissement d'une créance future:

article 2356 alinéa 3: Si elles sont futures, l'acte doit permettre leur individualisation ou contenir des éléments permettant celle-ci tels que l'indication du débiteur, le lieu de paiement, le montant des créances ou leur évaluation et, s'il y a lieu, leur échéance

article 2357 Lorsque le nantissement a pour objet une créance future, le créancier nanti acquiert un droit sur la créance dès la naissance de celle-ci.

C’est la notification du nantissement de créance au « sous débiteur » qui assure la bonne fin de la garantie : le « sous débiteur » ne peut que payer le créancier nanti (l’article 2363 du code civil dispose en effet  « Après notification, seul le créancier nanti reçoit valablement paiement de la créance donnée en nantissement tant en capital qu'en intérêts »)

Voir pour un nantissement de compte bancaire Cass com 25 septembre 2019 n°18-16178

Nantissement de créance dans le cadre d'une cession à titre de garantie par bordereau Dailly

Le terme de nantissement de créance est également utilisé dans le cadre d'un bordereau dit Dailly (c'est à dire en réalité est une cession de créance à titre de garantie ) et donc régie par l'article L313-23 du code monétaire et financier, Dans ce cas il s'agit juridiquement d'une cession de créance qui en produit les effets (transfert de propriété de la créance), ce qui est bien différent d'un véritable nantissement de créance, même avec dépossession.

Voir le mot Dailly

Nantissement d'assurance vie

Le titulaire d'un nantissement d'assurance vie n'est pas primé par les privilèges généraux notamment fiscaux Cass Civ 2ème 2 juillet 2020 n°19-10308,  Cass civ 2ème 2 juillet 2020 n°19-11414 et 19-13636

En outre le créancier nanti peut bénéficier de l'attribution du capital y compris postérieurement au jugement d'ouverture de la procédure collective Cass civ 1ère 10 mars 2021 n°20-11917

Droit au paiement et la procédure collective du constituant.

Les sommes perçues par le créancier nanti avant le jugement d'ouverture

Si le nantissement de créance a été notifié au « sous-débiteur » avant l’ouverture de la procédure collective, les sommes perçues par le créancier nanti avant le jugement d’ouverture de la procédure collective lui restent acquises (sauf évidemment action en nullité de la période suspecte)

A l'inverse le nantissement ne peut permettre au créancier d'appréhender des fonds en paiement d'une créance non échue Cass com 22 janvier 2020 n°18-21647 pour un nantissement de compte bancaire en garantie d'un prêt

Les créances nées après le jugement d'ouverture de la procédure collective: le créancier nanti ne devrait pas avoir de droit particulier sur la créance. La distinction entre le nantissement de droit commun et la cession de créance à titre de garantie dans le cadre d'une cession de créance Dailly

Dans le cadre du nantissement de créance de droit commun il pourrait y avoir débat sur le maintien du nantissement sur les créances déjà existantes au jour de la cession mais non encore "échues" avant le jugement d'ouverture de la procédure collective, et a priori dans ce cas le nantissement devrait produire ses effets.

(voir par exemple un nantissement sur les actifs avec "transport" de l'indemnité d'assurance en cas de sinistre : en l'espèce le vendeur qui a consenti un crédit vendeur et bénéficie de ces garanties est fondé à percevoir l'indemnité d'assurance en cas de sinistre survenu avant l'ouverture de la procédure collective du cessionnaire Cass com 3 avril 2019 n°17-31169 .. la notion de "transport" étant proche de la délégation par l'effet de la loi)

La réponse devrait être différente pour les créances non encore nées au jour du jugement d'ouverture de la procédure collective. Voir le mot voies d'exécution et saisie pour la distinction entre les deux notions.

Cependant la jurisprudence est plutôt en faveur de l'absence de distinction entre les deux notions, mais au prix d'une confusion entre la cession de créance et le nantissement de créance de droit commun c'est à dire d'un amalgame entre le nantissement de créance de droit commun et la cession de créance à titre de garantie existante dans le cadre d'une cession Dailly.

La Chambre commerciale de la Cour de Cassation a ainsi admis que la cession de créance (de loyer Cass com 26 mai 2010 n°09-13388) qualifiée (très improprement) de "nantissement de créance" puisse produire effets sur les loyers à venir, suivant cette formulation "Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait relevé que la cession des loyers faite par la société ... à la société ...en garantie du remboursement du prêt consenti a été signifiée au locataire conformément aux dispositions de l'article 1690 du code civil, de sorte que la société ... avait la qualité de créancier nanti"

Il est vrai que l'article 2363 du code civil confère au créancier nanti un droit au paiement que certains assimilent au droit de rétention sur la créance, mais on peut pourtant relever que:

-  l'article 2357 du code civil prévoit que les droits du créancier ne naissent qu'avec la créance, et ne sont donc pas en l'espèce acquis avant le jugement d'ouverture de la procédure collective, ce qui devrait être un argument pour que les effets du nantissement de créance cesse par l'effet du jugement d'ouverture, sur les créances non encore nées.

- le nantissement de créance n'est pas une cession de créance, la créance ne sortant pas du patrimoine du débiteur dans le cas du nantissement, ce qui devrait amener une solution exactement inverse et à considérer que le nantissement de créance (de droit commun) ne peut porter sur des créances nées après le jugement d'ouverture de la procédure collective.

D'ailleurs la Cour de Cassation a jugé que "l'acte par lequel un débiteur cède et transporte à son créancier, à titre de garantie, tous ses droits sur des créances, constitue un nantissement de créance" et qu'en conséquence le créancier n'avait pas acquis la propriété de la créance, Cass com 19 décembre 2006 n°05-16395

Une telle solution, combinée avec les effets de l'article 2357 du code civil, devrait conduire à refuser au créancier nanti de droit commun le droit d'appréhender les créances nanties non encore nées au jour du jugement d'ouverture de la procédure collective du débiteur. Ainsi le flou entretenu par des décisions imprécises devrait être précisé et la question mérite véritablement d'être soulevée.

Ce n'est que si le nantissement de créance est  réalisé dans le cadre d'un bordereau dit Dailly (c'est à dire en réalité est une cession de créance à titre de garantie ) et donc régie par l'article L313-23 du code monétaire et financier, et spécifiquement par ce texte, qu'est possible expressément le nantissement de créance "à terme" et  "les créances résultant d'un acte déjà intervenu ou à intervenir mais dont le montant et l'exigibilité ne sont pas encore déterminés" : dans ce cas précis les créances non encore nées peuvent donc être nanties, sans que le nantissement soit affectée par le jugement d'ouverture de la procédure collective du constituant intervenue entre l'acte de nantissement (le bordereau Dailly) et la naissance de la créance: a contrario, et cela devrait être un argument supplémentaire, le nantissement ne devrait pas porter sur les créances nées postérieurement au jugement d'ouverture de la procédure collective ((il en est de même de la cession de créance).

Cette dernière opération (nantissement de créance sous bordereau Dailly) est d'ailleurs plus proche de la cession de créance que du nantissement de créance (mais le texte la dénomme nantissement) et produit des effets substantiellement différents puisque la cession de créance emporte changement de propriété de la créance - ce qui peut expliquer la solution - ce qui n'est pas le cas du nantissement de créance de droit commun.

Voir le mot voies d'exécution et saisie pour plus de détail

Nantissement de créance et nullités de la période suspecte

Voir nullités