Conjoint

Quelques points de la définition

Généralités

Présentation synthétique de la situation du conjoint

Présentation détaillée de la situation du conjoint: quelques questions

Le conjoint peut-il librement avoir une activité ?

Le conjoint peut-il prendre des initiatives sur les biens communs ?

Le conjoint peut-il percevoir librement ses gains et salaires ?

La procédure collective d'un conjoint peut-elle être étendue à l'autre ?

Le traitement des créanciers du conjoint in bonis

 

Le conjoint devant le juge commissaire

 Généralité

Epoux.

Présentation synthétique de la situation du conjoint

La procédure collective d'un des conjoint peut avoir des interférences sur la situation de l'autre, dont l'importance va dépendre essentiellement du régime matrimonial.

Dans un régime séparatiste (séparation de biens) chaque conjoint reste propriétaire de ses biens, et évidemment le patrimoine du conjoint "in bonis", c'est à dire qui n'est pas en procédure collective, n'est pas atteint. Cependant il convient d'apporter deux tempéraments à cette observation:

- Pour autant d'ailleurs cela ne privera pas les mandataires de justice de démontrer que des biens ont été financés par le conjoint en procédure collectrive, ou mis à l'abri dans le patrimoine du conjoint in bonis, et dans ce cas en cas de succès de l'action les biens correspondants ou les sommes équivalents seront rapportées à la procédure collective: il serait trop facile de protéger des biens sans contrepartie pour les créanciers.

- en pratique il est fréquent que les époux échètent ensemble un certain nombre de biens, qui sont alors réputés être indivis entre eux, c'est à dire qu'il en détiennent chacun 50%. C'est fréquemment le cas de l'immeuble d'habitation acquis pendans le mariage: le liquidateur d'un des conjoint peut provoquer le partage de l'indivision pour recevoir la part devant revenir aux créanciers. En pratique

* soit les biens peuvent être partagés et un accord peut être trouvé : par exemple les époux sont propriétaires indivis de 2 appartements de valeur équivalente: le partage peut conduire à attribuer un appartement à chacun en pleine propriété et le liquidateur pourra vendre celui attribué au conjoint en liquidation.

* soit les biens ne sont pas partageables (par exemple un seul appartement) et le partage est reporté sur le prix: le liquidateur va assigner en partage ce qui conduira à la vente du bien et au partage du prix. La possibilité pour le conjoint in bonis d'éviter l'action en partage consiste à payer le passif c'est à dire les dettes, du conjoint en liquidation, ce qui est généralement disproportionné par rapport à la valeur du bien.

Dans les régimes communautaires (notamment le régime dit légal, c'est à dire pour les personnes mariées sans contrat passé devant notaire), le liquidateur va appréhender les biens propres du conjoint en liquidation et les biens communs, en ce compris le logement familial s'est entre dans la communauté.

Quelques questions détaillées

Le conjoint peut-il avoir librement l’activité de son choix ?

La question de l’activité du conjoint du débiteur en sauvegarde, redressement ou liquidation judiciaire est relativement simple et la réponse est évidemment affirmative :

La procédure collective touchant l’un des époux n’atteint évidemment pas le conjoint qui est salarié, ou qui a une toute autre activité : l’un est en procédure collective, l’autre ne l’est pas.

 L’article 1421 du code civil permet à chaque époux qui exerce une profession séparée d’accomplir seul les actes d’administration nécessaires. L’article 223 du code civil permet à chaque époux d’exercer librement une profession.

Le conjoint peut-il prendre des initiatives sur les biens communs ?

La réponse est négative: le dessaisisement du débiteur en liquidation judiciaire ne peut être contourné par des initiatives qui seraient prises pas le conjoint sur ces mêmes biens. C'est la conséquence de l'emprise totale de la procédure collective sur la communauté.

Pour plus de précisions voir la communauté

Le conjoint perçoit-il librement ses gains et salaires ?

L’article 223 du code civil permet à chaque époux d’exercer librement une profession et d’en percevoir les gains et salaires

A priori le conjoint peut donc librement travailler et devrait pouvoir percevoir ses gains et salaires, même si son conjoint est en procédure collective.

Cependant la situation est pourtant plus complexe en cas de mariage sous le régime de la communauté (voir le mot communauté) puisque la Cour de Cassation considère que l’article 1414 du code civil qui prévoit que les gains et salaires d’un époux ne peuvent être saisis par les créanciers du conjoint que si l’obligation a été contractée pour l’entretien du ménage ou l’éducation des enfants ne s’applique pas : le liquidateur peut appréhender les salaires de l’autre conjoint (Cass com 16 novembre 2010 n°09-68459 qui écarte la possibilité de saisie par les créanciers du conjoint in bonis au motif que ses salaires sont sous l'emprise de la procédure collective du conjoint)

En pratique les liquidateurs n’accomplissent pas de démarche sur les salaires du conjoint, sauf si ceux-ci sont particulièrement importants.

La procédure collective d’un conjoint peut-elle être étendue à l’autre conjoint ?

Le conjoint peut avant tout lui-même relever de la procédure collective en raison de son activité personnelle.

La question peut également se poser de savoir si le conjoint peut se trouver en procédure collective au motif que l’époux y est déjà.

Plusieurs hypothèses existent et dépendent de l’engagement du conjoint:

 -  le conjoint salarié de son époux commerçant en procédure collective n’est évidemment pas concerné par la procédure. Sa qualité de salarié peut être éventuellement contestée, faute de lien de subordination (le lien de subordination est de l’essence même du contrat de travail), mais il n’est pas réputé commerçant pour autant et n’est donc pas pour autant éligible à la procédure collective.

-  Le conjoint collaborateur, ou celui qui aide ponctuellement n’est pas non plus éligible à la procédure collective.

-  Le conjoint co-exploitant, c'est-à-dire qui prend des initiatives de chef d’entreprise, peut se trouver commerçant et « bénéficier » de la procédure collective, si la présomption de l’article L 121.3 du code de commerce est renversée : ce texte prévoit en effet que le conjoint d’un commerçant n’est réputé lui-même commerçant que s’il exerce une activité commerciale séparée de celle de son époux.

En pratique il s’agira du conjoint qui prend des initiatives de chef d’entreprise exactement comme s’il était chef d’entreprise.

Ainsi dans la plupart des cas, le conjoint resté in bonis n’a pas d’argument pour « bénéficier » de la procédure, et ses créanciers ne peuvent généralement pas poursuivre le conjoint pour qu’une procédure collective soit ouverte en raison de celle de son conjoint, et il n'existe pas d'attraction d'un conjoint à la procédure collective de l'autre.

Cependant cette « attraction » peut d’ailleurs être souhaitée par les conjoints eux mêmes : l’ouverture d’une procédure collective n’a en effet pas que des inconvénients, et permet au conjoint de se mettre à l’abri des poursuites individuelles des créanciers, alors que souvent il y a dans le passif des dettes pour lesquelles les deux conjoints sont engagés.

La solution procédurale se trouve dans une demande de confusion des patrimoines si le conjoint a accompli des actes justifiant une extension de la procédure collective du conjoint.

Il convient sur cette question d'être particulièrement vigilant pour que les juridictions ne soient pas instrumentalisées. Pour plus de précisions voir la notion de confusion des patrimoines.

Comment sont traités les créanciers de celui des conjoints qui n'est pas en procédure collective ?

Principe : le conjoint n’est pas à l’abri des poursuites de ses propres créanciers durant la procédure collective de l’autre conjoint :

La liquidation judiciaire du conjoint commerçant, clôturée ou pas, ne protège évidemment pas l’autre conjoint des poursuites des créanciers dont il est caution ou co-emprunteur.

Exception : du chef du conjoint « in bonis », c’est-à-dire qui n’est pas en procédure collective, ses créanciers ne peuvent effectuer des voies d’exécution sur les biens communs.

Les créanciers du conjoint qui n'est pas en procédure collective peuvent librement appréhender les biens propres de ce conjoint. Cependant en cas de mariage sous le régime de la communauté ils ne peuvent appréhender les biens communs, mais disposent d'un régime particulier et d'une possibilité de déclarer créance au passif de l'autre conjoint qui n'est pourtant pas leur débiteur. Voir le mot communauté

Cette disposition s’applique y compris sur les salaires, qui sont des biens communs (et même si en réalité les mandataires de justice n'appréhendent pas ces salaires)

Voir les mots "communauté" "divorce" "surendettement" et "indivision"

Le conjoint devant le juge commissaire

Le droit des procédures collectives donne certaines prérogatives au conjoint, et notamment celle d'être entendu par le juge commissaire lors de la vente des biens communs. C'est notamment le cas pour la "ventre des autres biens" en liquidation judiciaire, au visa de l'article R642-37-2 qui renvoi à l'article R641-30 applicable pour sa part à toute vente en liquidation judiciaire.