Contrôleur

Quelques points de la définition

La désignation des contrôleurs

Généralités

Personnes exclues

La notion de créancier

Durée de la mission

Procédure de désignation

Pouvoir d'appréciation du juge commissaire

Les voies de recours

L'exercice de la mission 

L'information des contrôleurs

L'information générale

La vérification des créances

Les étapes de la procédure

La consultation des contrôleurs et leur audition à l'audience

Les initiatives des contrôleurs dans l'intérêt des créanciers

Les actions principales

Les actions en cas de carence ou de refus du mandataire judiciaire ou du liquidateur

La procédure de l'action en cas de carence ou de refus des mandataires de justice

Le principe: action d'un contrôleur

Le cas particulier des sanctions

Les interdictions d'acquérir pour le contrôleur

la possible révocation du contrôleur

Désignation des contrôleurs

Généralités

Dans certains cas le juge commissaire (à l'expiration d'un délai de 20 jours cf article R621-24, mais la demande n'est enfermée dans aucun délai) peut désigner un ou plusieurs "contrôleurs", qui auront certaines prérogatives particulières, et notamment parfois celle d'initier des actions dans l'intérêt des créanciers.

La loi (article L621-10) prévoit plusieurs catégories de contrôleurs:

- un maximum de 5 contrôleurs désignés parmi les créanciers qui en font la demande, dont au moins un parmi les créanciers titulaires de suretés et un parmi les créanciers chirographaires.

Le juge commissaire doit, semble-t-il, a minima désigner un contrôleur, mais n'a aucune obligation d'en désigner 5, même si des demandes sont formulées Cass com 29 septembre 2015 n°14-15619 "qu'enfin, il résulte de l'article L. 621-10 du code de commerce que, contrairement à l'allégation de la quatrième branche du second moyen, si le juge-commissaire désigne un à cinq contrôleurs parmi les créanciers qui lui en font la demande, il n'est pas tenu de désigner tous ceux qui forment une telle demande, même s'ils ne sont pas plus de cinq ; que le refus de nomination de la société EFC en qualité de contrôleur ne caractérise donc pas davantage un excès de pouvoir" 

- Si le débiteur exerce une profession indépendante et relève d'un ordre professionnel ( par exemple les médecins, les professions paramédicales, les professions juridiques) l'ordre est "d'office" (c'est à dire sans appréciation du juge, et on se demande même s'il est nécessaire que ce soit précisé par une décision) contrôleur (et dans ce cas le nombre maximum des contrôleurs créanciers est réduit à 4). Cette désignation est prononcée dans le jugement d'ouverture et ne relève pas du juge commissaire

- un parmi les représentants des administrations fiscales et sociales qui en font la demande (Les administrations financières, les organismes de sécurité sociale, les institutions gérant le régime d'assurance chômage) étant précisé qu'en cas de pluralité de demande le juge désigne un contrôleur parmi les demandeurs. Etant précisé que le refus de désignation constitue un excès de pouvoir (ouvrant éventuellement la voie du pourvoi à l'encontre de l'arrêt qui confirme l'ordonnance du juge commissaire) Cass com 25 octobre 2023 n°22-16907 

- l'AGS si elle en fait la demande

Personnes exclues

Aucun contrôleur ne doit être un proche du débiteur (L621-10"Aucun parent ou allié jusqu'au quatrième degré inclusivement du débiteur personne physique ou des dirigeants de la personne morale, ni aucune personne détenant directement ou indirectement tout ou partie du capital de la personne morale débitrice ou dont le capital est détenu en tout ou partie par cette même personne, ne peut être nommé contrôleur ou représentant d'une personne morale désignée comme contrôleur."

Ces dispositions ne sont pas anticonstitutionnelles Cass com QPC 7 septembre 2021 n°21-40011

La notion de créancier

Si la créance du candidat contrôleur est admise au passif, sa qualité de créancier ne pose pas de difficulté.

Cependant la notion de créancier doit être précisée puisque généralement au stade de la demande de désignation le passif n'est pas encore vérifié et le demandeur ne peut donc se prévaloir de son admission sur l'état des créances.

Il s'agit donc à ce stade que l'existence d'un principe de créance paraisse fondée au juge commissaire et ne soit pas contestée, étant précisé que la désignation en qualité de contrôleur ne préjuge pas de l'admission de la créance et ne privera pas de contester la créance (et si la contestation aboutit la question du maintien du contrôleur devra nécessairement se poser au travers une demande de révocation, dès lors qu'il ne sera plus légitime à poursuivre sa mission).

Le juge devra donc être en condition de vérifier si la créance parait fondée, ce qui amènera le demandeur à en exposer le détail.

Evidemment le créancier qui, au jour de sa demande, est hors délai pour déclarer sa créance, ne pourra pas être désigné. Il en est de même du créancier qui a été payé dans le cadre de la procédure 

Si en droit la demande n'est pas nécessairement accompagnée de la copie de la déclaration de créance et peut donc a priori être antérieure à celle-ci,  reste que dans la pratique on voit mal pour quelle raison un candidat contrôleur présenterait sa demande de désignation avant d'avoir déclaré sa créance, et ce faisant, sans en justifier. 

Force est d'ailleurs de constater que les formulaires mis à dispositions pour les greffes et les tribunaux prévoient systématiquement que la demande est accompagnée d'un justificatif de la déclaration de créance.

Il pourrait y avoir débat pour savoir si un créancier postérieur au jugement pourrait être désigné. Ce n'est absolument pas l'esprit du texte, ni de la jurisprudence même si ce n'est pas expressément exclu. 

On peut d'ailleurs relever que l'article L621-10 dispose « Le juge-commissaire désigne un à cinq contrôleurs parmi les créanciers qui lui en font la demande. Lorsqu'il désigne plusieurs contrôleurs, il veille à ce qu'au moins l'un d'entre eux soit choisi parmi les créanciers titulaires de sûretés et qu'un autre soit choisi parmi les créanciers chirographaires. », ce texte étant précisé par l’article R621-24 du code de commerce qui dispose « Le créancier demandant à être nommé contrôleur en application du premier alinéa de l'article L. 621-10 doit en faire la déclaration au greffe. Il indique le montant de sa ou de ses créances, ainsi que, le cas échéant, la nature des sûretés dont il est titulaire. »

L'allusion à une créance chirographaire et au montant des créances est incontestablement relatif à la créance déclarée au passif, ce qui exclu une créance postérieure.

Il convient d'ajouter que l'article R622-21 du code de commerce prévoit que le mandataire judiciaire, lors de la circularisation des créanciers pour les inviter à déclarer créance, porte à leur connaissance les dispositions de l'article L621-10 et R621-24 du code de commerce, c'est à dire le processus de désignation des contrôleurs, cette disposition n'existant pas pour les créanciers postérieurs.

Durée de la mission

Le contrôleur est désigné pour la durée de la procédure (mais il peut évidemment démissionner, et le texte prévoit également qu'il peut être révoqué).Le texte de l'article L621-10 applicable à la sauvegarde, et qui réglemente la désignation du contrôleur est applicable au redressement judiciaire (article L631-9) et à la liquidation judiciaire (article L641-1 II)

La mission de contrôleur dure jusqu'à la clôture de la procédure ou plus précisément jusqu'à la reddition de comptes du dernier mandataire de justice : article R621-25 du code de commerce pour la procédure de sauvegarde rendu applicable au redressement judiciaire par l'article R631-16.

La mission perdure donc pendant la phase d'exécution du plan. Il doit d'ailleurs être entendu en cas de modification du plan (L626-26)

Pour autant aucun texte ne prévoit la désignation d'un contrôleur en phase de plan (ce que certains auteurs considèrent comme possible, mais sans argument textuel)

Il en découle à notre avis qu'en cas de résolution du plan, dès lors que la procédure ouverte (par exemple une liquidation en suite d'une résolution d'un plan de redressement) est une nouvelle procédure, le créancier qui était contrôleur de la première procédure n'est plus en fonction et doit s'il souhaite rester contrôleur, présenter une nouvelle demande. 

Pour la liquidation judiciaire c'est, là encore, la fin de mission du liquidateur qui met un terme à la mission du contrôleur article R641-13Tout milite pour penser que le contrôleur reste en fonction durant la période d'exécution du plan puisque l'article R621-25 du code de commerce précise que "les fonctions ... des contrôleurs prennent fin au jour où le compte rendu de fin de mission de l'administrateur judiciaire, du mandataire judiciaire et, le cas échéant, du commissaire à l'exécution du plan, a été approuvé.": si le commissaire à l'exécution du plan est cité, c'est bien que le contrôleur est en fonction durant le plan.

Procédure de désignation

La procédure de désignation est prévue par l'article R621-24 du code de commerce: le texte évoque une déclaration au greffe du créancier qui souhaite être désigné, ce qui est assez inhabituel comme mode de saisine du juge - habituellement une requête - et certains en tirent que le demandeur doit se déplacer au greffe (ce qui nous semble excessif, un courrier nous semblant apte à faire une déclaration au greffe, mais dans le silence du texte et même s'il n'y a pas de délai pour saisir le juge, il peut être prudent de se rendre au greffe, surtout que le même texte prévoit que si ce sont les administrations qui en font la demande elles peuvent adresser cette demande au greffe par courrier recommandé: a contrario pour les autres créanciers on peut soutenir que ce n'est pas possible).

Curieusement aucun texte ne prévoit l'audition ou l'avis des mandataires de justice ou du débiteur, ce qui, en pratique, est cependant réalisé.

La libre appréciation du juge

Le juge commissaire a un pouvoir d'appréciation de l'opportunité de la désignation, et un refus ne constitue pas un excès de pouvoir Cass com 29 septembre 2015 n°14-15619

L'appréciation du juge commissaire sur la demande de désignation est parfois fondée sur la nature des relations entre le demandeur et le débiteur.

Il est pertinent que le juge commissaire se fonde sur l'intérêt de la procédure : ce n'est pas parce que le créancier est en conflit avec le débiteur, qu'une plainte est déposé par l'un contre l'autre, ou que l'un est concurrent de l'autre que la demande doit être rejetée, et, parfois, au contraire, ce type de relation conflictuelle permet de disposer d'informations importantes.

Au contraire même, la jurisprudence des juges commissaires, tribunaux, Cours d'appel tend à écarter le contrôleur qui entretient avec le débiteur des relations conflictuelles qui permettent de penser qu'il n'exercera pas la mission dans des conditions irréprochables. 

Faire droit à la désignation est le meilleur gage de transparence, mais dans certaines situation, la malveillance évidente du demandeur peut justifier que sa désignation soit écartée, et en tout état il n'y a pas d'automatisme, la désignation reste une faculté pour le juge commissaire, qui doit motiver sa décision.

Voies de recours

Les textes sur les voies de recours en la matière sont excessivement mal rédigés car ils visent des décisions de nature différentes pur lesquelles les voies de recours ne sont pas les mêmes.

En effet l'article L661-6 du code de commerce dispose 

"I.-Ne sont susceptibles que d'un appel de la part du ministère public :

1° Les jugements ou ordonnances relatifs à la nomination ou au remplacement de l'administrateur, du mandataire judiciaire, du commissaire à l'exécution du plan, du liquidateur, des contrôleurs, du ou des experts ;"

On comprend à première lecture que les ordonnances du juge commissaire relatives à la désignation des contrôleurs ne peuvent faire l'objet que d'un appel, lequel n'appartient qu'au ministère public.

En réalité ce texte est le résultat d'une évolution, à partir d'une version applicable antérieurement à l'ordonnance du 18 décembre 2008 qui ne visait que le jugements, et pas les ordonnances.

Autrement dit, à l'origine, les jugements rendus sur recours contre une ordonnance relative à la désignation des contrôleurs ne pouvaient faire l'objet d'un appel que du Parquet (Cass Com 7 novembre 2018 n°17-20798 ) et encore sauf excès de pouvoir (Cass com 16 mars 2010 n°09-13578) qui n'est pas constitué par le seul refus de nomination Cass com 29 septembre 2015 n°14-15619

L'introduction du terme "ordonnance" est fâcheuse et trompeuse dans le cas des contrôleurs, car elle laisse penser que seul l'appel est possible, et que seul le Parquet pourrait l'exercer.

En réalité, l'ordonnance du juge commissaire qui statue sur la demande peut faire l'objet du recours de droit commun contre les ordonnances du juge commissaire, telle que prévue à l'article R621-21, et c'est le jugement rendu sur ce recours qui ne pourra faire l'objet d'un appel, exclusivement par le Parquet (Cass com 21 février 2012 n°11-40100)

L'exercice de la mission 

La fonction n'est pas rémunérée et le contrôleur est tenu à la confidentialité (L621-11).

Il peut se faire représenter par un préposé ou un salarié (L621-10) ou par un avocat. Un tiers qui n'est pas avocat ne peut représenter le contrôleur.

Le texte ne précise pas si le contrôleur peut être assisté d'un avocat, mais a priori il ne peut qu'être représenté: ainsi soit le contrôleur effectue sa mission soit il missionne un avocat. Ainsi à la différence du droit d'information des actionnaires dans une SA, le contrôleur ne semble pas pouvoir être assisté d'un expert inscrit sur la liste des experts.

L'information des contrôleurs

Information générale

Le contrôleur peut prendre connaissance des documents transmis au mandataire judiciaire ou à l'administrateur judiciaire (L621-11).

La notion de prise de connaissance est assez mal définie, et il n'est pas précisé si elle emporte droit de prendre des copies.

On peut rechercher l'analogie avec le droit d'information des actionnaires dans les SA

Mais les textes ne sont pas plus précis ou en tout état pas plus décisifs:

- L'article article R225-92 du code de commerce indique que le droit de prendre connaissance emporte droit de prendre copie, mais se situe strictement dans le cadre des documents prévus à l'article L225-117 du code de commerce lequel procède à un renvoi à l'article L225-115 qui énumère limitativement les documents en question

l'article R225-89 du code de commerce n'évoque que le droit de prendre connaissance,

l'article R225-90 distingue expressément le droit de prendre connaissance et celui de prendre copie, ce qui semble parfois instaurer une distinction entre les deux notions.

Il semble donc qui si le législateur a entendu que le droit de prendre communication emporte celui de prendre copie, il l'a précisé, et même s'il n'est pas illogique que le contrôleur puisse prendre des copies des documents auxquels il a accès, le texte ne le précise pas.

Le mandataire de justice qui accepte de communiquer des copies le fait donc sous sa responsabilité, et il est parfaitement fondé à refuser (et se pose en outre la question s'il accepte que le contrôleur établisse des copies, du mode opératoire, car le mandataire n'est pas non plus un organisme de photocopie, et peut refuser de se départir de ses originaux)

Qu'il ne fasse que prendre connaissance des documents ou qu'il en prenne copie, la mission du controleur est pour autant mal structurée dans les textes: le contrôleur est tenu à la confidentialité (L621-11) ce qui devrait le priver de la possibilité de toute allusion à ces informations, alors même qu'il a par ailleurs des prérogatives d'action (voir ci après) qui supposent nécessairement qu'il utilise les documents auxquels il a eu accès, ou plus précisément dont il devra nécessairement avoir en copie pour que sa mission se déroule normalement ! Le texte est donc particulièrement lacunaire.

On imagine mal en effet un contrôleur mener une action en comblement de passif (voir ci après) en se gardant bien de faire la moindre évocation des pièces du dossier du mandataire judiciaire: dans ce cas l'action est vouée à l'échec ... et le mandataire judiciaire sera certainement suspecté d'avoir oeuvré pour qu'elle échoue ... à l'inverse si le contrôleur utilise des pièces du dossier du mandataire judiciaire, on pourrait - et ce serait singulier - lui reprocher d'avoir violé son obligation de confidentialité - et même reprocher au mandataire judiciaire de lui avoir remis des copies - ce sur quoi le texte ne tranquillise pas.

La logique est sans doute que le contrôleur ait accès au dossier des mandataires de justice, et il serait opportun que le texte précise expressément qu'il peut prendre copie de pièces, dont il assure la confidentialité sauf dans le cadre d'action menées dans le cadre de son habilitation légale. Ce serait le moyen de concilier toutes les dispositions entre elles, comme d'ailleurs celles du secret auquel sont tenus les mandataires de justice qui peuvent pour autant agir sur le fondement des pièces qu'ils détiennent.

Tant que les textes sont en l'état toutes les pratiques semblent exister, de la plus protectrice de la responsabilité des mandataires de justice (pas de copie) aux plus "efficaces" mais au détriment peut-être de la sécurité pour le mandataire de justice.

La vérification des créances

Le contrôleur peut assister à la vérification des créances (article R624-1 du code de commerce)

Les étapes de la procédure

Le contrôleur est également destinataire d'information privilégiée :

- résultat d'exploitation à l'issue de chaque période d'observation article R622-9 (texte de la sauvegarde applicable au redressement judiciaire R631-20

- bilan économique et social établi par l'administrateur judiciaire, (article L626-8) sur lequel il est consulté, de telle manière que ses éventuelles observations y soient annexées

- offres de reprise L642-2,

- propositions de paiement du passif L626-5,avant même qu'elles soient communiquées pour consultation des créanciers, étant d'ailleurs précisé qu'au visa de l'article R626-7 du code de commerce les contrôleurs émettent un avis sur les propositions de plan, lequel avis est joint au courrier de consultation adressé par le mandataire judiciaire aux créanciers.

- état des réponses des créanciers sur les propositions de plan L626-7

-  arrêté du plan sur lequel il est convoqué à l'audience L626-9

- demande de liquidation sur laquelle il est convoqué à l'audience L622-10,

- fixation du délai de réception des offres de reprise article R631-39 ( ce texte précise que le délai entre le dépot des offres et l'audience ne peut être réduit qu'avec l'accord notamment des contrôleurs)

- ventes des biens en liquidation sur lesquelles il est convoqué ( ventes prévues aux L642-18 et L642-19), et ce au visa des articles R 642-37-2 et R642-36-1

Bien que le texte ne le précise pas expressément (et alors même qu'en principe il n'y a pas de nullité sans texte), il semble possible de soutenir dans le cadre d'une recours motivé par l'absence de respect des prérogatives du contrôleur, que la décision ainsi rendue est entachée de nullité. En tout état la décision doit être réformée (évidemment si un recours est exercé)

La consultation des contrôleurs et leur audition à l'audience

Non seulement le controleur est destinataire d'informations, mais ils doit en outre être mis en condition d'être entendu:

- demande de liquidation sur laquelle il est convoqué à l'audience L622-10,

-  arrêté du plan sur lequel il est convoqué à l'audience L626-9 (texte de la sauvegarde rendu applicable au redressement judiciaire par l'article L631-19)

- modification du plan article L626-26

- cession d'entreprise article L642-5

- ventes des biens en liquidation sur lesquelles il est convoqué par le juge commissaire ( ventes prévues aux L642-18 et L642-19), et ce au visa des articles R 642-37-2 et R642-36-1

Le rôle des contrôleurs dans les initiatives dans l'intêret des créanciers

Un pouvoir d'action à titre principal limité

Le contrôleur a un pouvoir d'action principale quand les textes le prévoient: il peut saisir le juge commissaire aux fins de remplacement des organes de la procédure L621-7, L641-1-II, demander la liquidation judiciaire L622-10, 1

A contrario le fait que le contrôleur soit entendu par le tribunal dans certains cas ne lui donne pas qualité de partie pouvant exercer des recours (Cass com 24 juin 2003 n°00-17455 pour un plan)

Un pouvoir d'action en cas de carence ou de refus des organes de la procédure collective

Le contrôleur n'est pas un organe de la procédure collective.

Toutefois dans certains cas, si le titulaire de l'action dans l'intêret des créanciers n'agit pas (le mandataire judiciaire en sauvegarde ou en redressement judiciaire, le liquidateur en liquidation judiciaire) le contrôleur peut mener l'action. ce processus est la suite de certaines actions un peu singulières dites "ut singuli" menées par un créancier pour son préjudice distinct en cas d'inaction du professionnel à mener une action collective (Cass com 27 juin 1989 n°87-17272)

La procédure en cas de carence ou de refus: les actions dans l'intêret des créanciers: un contrôleur après mise en demeure infructueuse pendant deux mois

Le principe: action d'un contrôleur

Les textes: article L622-20 du code de commerce pour la sauvegarde, L631-14 pour le redressement judiciaire, et L641-1 II pour la liquidation judiciaire

Le processus est prévu par l'actuel article L622-20 du code de commerce qui est le texte qui pose le principe du monopole d'action du mandataire judiciaire:  "en cas de carence du mandataire judiciaire, tout créancier nommé contrôleur peut agir dans cet intérêt dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat." étant précisé que "Les sommes recouvrées à l'issue des actions introduites par le mandataire judiciaire ou, à défaut, par le ou les créanciers nommés contrôleurs, entrent dans le patrimoine du débiteur et sont affectées en cas de continuation de l'entreprise selon les modalités prévues pour l'apurement du passif." (en redressement judiciaire ou en sauvegarde, et évidemment affectées aux créanciers en cas de liquidation)

L'article R622-18 du code de commerce précise la procédure: le contrôleur (il s'agit nécessairement d'un créancier contrôleur, et donc pas de l'ordre professionnel ou de l'AGS (encore que l'AGS est en principe contrôleur)) met en demeure le mandataire judiciaire de mener l'action, par courrier recommandé. A l'issue d'un délai de deux mois, le contrôleur peut engager l'action.

On ignore s'il suffit que le mandataire ait répondu favorablement dans le délai de deux mois pour qu'il soit interrompu ou s'il faut qu'il ait engagé l'action, les deux solutions se défendant.

Une difficulté peut exister si en cours du délai de deux mois pendant lequel le contrôleur n'a pas encore qualité pour engager l'action, une prescription est encourue : certains auteurs considèrent que le contrôleur pourrait délivrer l'assignation à titre conservatoire, laquelle sera éventuellement régularisée soit par le professionnel s'il décide de l'engager, soit par l'acquisition par le contrôleur, à l'expiration du délai de 2 mois, de la qualité pour agir: sont invoquées les règles de procédure civile et particulièrement l'article 126 du CPC ... mais c'est semble-t-il oublier que, à la lettre même de l'article 126 alinéa 2, la régularisation doit intervenir avant toute forclusion (Cass com 24 septembre 2003 n°00-11010 pour la régularisation par le commissaire à l'exécution du plan d'une action engagée par le mandataire judiciaire, Cass com 10 décembre 2003 n°00-19230 pour la régularisation par le liquidateur d'un appel formé par le débiteur seul nonobstant le dessaisissement ou Cass com 12 juin 2001 n°97-20623 pour l'appel du débiteur seul alors qu'il est assisté par l'administrateur judiciaire)

Les prérogatives du contrôleur ne s'étendent pas à la possibilité d'exercer des recours contre les décisions de la procédure collective au prétendu motif qu'il aurait pour mission d'assister le mandataire judiciaire Cass com 30 janvier 2019 n°17-22221 et Cass com 30 janvier 2019 n°17-20793

L'action en comblement de passif, la demande de faillite personnelle et la banqueroute : la majorité des contrôleurs après mise en demeure adressée par au moins deux contrôleurs infructueuse pendant deux mois

Les articles L651-3 et R651-4 du code de commerce organisent l'action en comblement de passif menée par les contrôleurs, qui doit être menée par la majorité des contrôleurs désignés (contrôleur s'entend ici créancier contrôleur et donc pas l'ordre professionnel) ce qui suppose qu'il y en ait plusieurs. La mise en demeure doit d'ailleurs être adressée par deux contrôleurs au moins et l'action doit être menée par au moins deux contrôleurs Cass com 30 janvier 2018 n°17-20763

Très exactement le même dispositif est organisé pour la faillite personnelle par les articles L653-7 et R653-2, et par les articles L654-17 et R654-1 pour les actions pénales.

La Cour de cassation a eu l'occasion de préciser que si la mise en demeure doit impérativement être adressée par au moins deux contrôleur, l'action, qui doit être engagée par la majorité d'entre eux, peut être engagée sans cette majorité pourvu que les contrôleurs manquants pour réunir ladite majorité interviennent à la procédure avant l'expiration du délai pour engager l'action. En effet la Cour de Cassation se fonde sur le fait que le défaut de qualité (qui est la fin de non recevoir correspondante au cas de l'absence de majorité des contrôleurs) visé à l'article 122 du CPC est régularisable, au visa de l'article 126 du CPC (en réalité d'une part avant toute forclusion, comme l'indique l'arrêt, mais d'une part tant que le juge n'a pas statué) Cass com 24 mai 2018 n° 17-10005 à propos d'une action en comblement)

La question du financement des actions du contrôleur est évidemment déterminante, et a priori les frais sont avancés par lui et ne bénéficieront du rang de créances postérieures que s'ils ont été utiles, ce qui sera difficile à démontrer en cas d'échec (surtout qu''on est par hyothèse après un refus du professionnel d'agir) ou si concrètement l'action n'a pas été directement profitable pour les créanciers (par exemple une faillite personnelle).

Interdiction d'acquérir les biens du débiteur

Les textes excluent la possibilité pour le contrôleur, initié aux détails de la procédure collective du débiteur, de se porter acquéreur de ses biens, soit directement soit indirectement pendant 5 ans  (L642-3 et L642-20 qui y renvoi en liquidation judiciaire). La tentation de demander à être désigné contrôleur pour bénéficier d'informations privilégiées (en particulier les offres de reprise) est ainsi freinée considérablement, d'autant plus que l'article L654-12 II du code de commerce punit pénalement ces acquisitions directes ou indirectes.

La possible révocation des contrôleurs

Même si le texte (L621-10) n'est pas très précis, un contrôleur peut être révoqué, à la seule demande du Parquet, et par décision d'un Tribunal (il n'y a pas réciprocité des formes puisque la désignation est faite par le juge commissaire).

"l'absence des conditions mises à leur nomination ou l'intérêt du bon déroulement de la procédure collective peuvent justifier la révocation des contrôleurs, au terme d'un débat contradictoire qui respecte leurs droits et intérêts" Cass com 21 octobre 2016 n°16-40238

Sans que la révocation soit une sanction dans ce cas, le controleur dont la créance n'est finalement pas admise ne peut rester en fonction, certains soutenant que sa mission cesse ipso facto, d'autres qu'il y a lieu, faute d'autre procédure, à révocation.

Cela peut être le cas d'un créancier dont la créance est contestée avec succès, d'une créance déclarée hors délai. Dans ces cas, effectivement il s'avère a posteriori que le contrôleur n'était pas créancier et la condition posée par le texte n'était pas remplie.

Certains soutiennent que c'est également le cas d'un créancier qui a été payé: une fois qu'il est payé de sa créance il n'aurait plus les prérogatives de contrôleur et ne pourrait plus exercer sa mission : il est vrai que si le créancier est totalement payé, il ne devrait plus s'intéresser à la procédure, mais cependant on peut imaginer une créancier privilégié intégralement payé, dont il serait légitime de soutenir qu'il reste investi de son rôle de défense "subsidiaire" de l'intêret des créanciers. Il n'est donc pas certain que le paiement mette un terme à la mission.

La question du salarié, créancier éphémère le temps que l'AGS le paye, est la même, et certaines décisions de première instance ont considéré que dès le paiement par l'AGS le créancier ne pouvait plus être contrôleur.

Ces solutions ne sont pas tranchées définitivement, la condition posée par le texte est que le controleur soit créancier au moment de sa désignation, et seulement à ce moment là.

Enfin le contrôleur est désigné avec des prérogatives d'agir dans l'intérêt de tous les créanciers : celui qui use de ses prérogatives dans un intérêt personnel et/ou fait obstruction au bion déroulement de la procédure, doit être révoqué.