Débiteur ayant cessé son activité (personne physique ou morale) et/ou radiée

La demande d'ouverture de la procédure collective par le débiteur qui a cessé son activité

La demande d'ouverture de la procédure collective par le créancier du débiteur qui a cessé son activité

Synthèse

Cas particulier des sociétés radiées: qui les représente ?

Le principe: application du redressement ou de la liquidation judiciaires au débiteur qui en fait la demande, et qui relevait des procédures collectives et a cessé son activité à la condition que tout ou partie de son passif provienne de son activité

L'article L631-3 du code de commerce précise que le redressement judiciaire est applicable au débiteur qui devrait relever des procédures collectives et qui a cessé son activité, à la condition que tout ou partie de son passif provienne de son activité assujettie aux procédures collectives (Cass civ 2ème 1er Décembre 2016 n°15-25542)

L'article L640-3 du code de commerce reprend la même disposition pour la liquidation judiciaire (et dans ce cas classiquement le redressement doit être impossible Cass com 15 février 2011 n°10-13751 ce qui en réalité devrait être systématiquement le cas puisque par hypothèse le débiteur a cessé son activité et ne devrait pas pouvoir présenter un plan de redressement.

Un tel texte est dont assez surprenant pour le redressement judiciaire, qui a, a priori vocation à permettre de le redressement de l'entreprise, qui ici par hypothèse n'existe plus. Cependant la Cour de Cassation a dans une autre circonstance admis un plan de redressement qui ne repose pas sur l'activité ( Cass com 4 mai 2017 n°15-25046) , ce qui est la suite logique de ce texte.

L'ancien délai d'un an qui enfermait la déclaration de cessation des paiements du débiteur ayant cessé son activité a été supprimé dès lors que c'est le débiteur (ou le Ministère public) qui est demandeur Cass com avis 17 septembre 2007 n°07-00010

Ainsi le débiteur qui a cessé son activité peut déclarer sa cessation des paiements y compris au delà d'un an de son arrêt d'activité. Il n'est pas nécessaire que l'état de cessation des paiements soit antérieur à l'arrêt de l'activité.(Cass com 4 juillet 2018 n°17-16056 )

Restriction à l'ouverture du redressement ou de la liquidation judiciaires sur assignation d'un créancier, concernant le débiteur qui a cessé son activité

Si comme indiqué ci dessus, le redressement ou la liquidation judiciaire peuvent être ouverts à l'encontre d'un débiteur qui a cessé son activité, la loi restreint la possibilité pour un créancier d'assigner en redressement ou liquidation judiciaires en pareille situation.

En effet la loi dispose qu'une entreprise qui relevait du droit des procédures collectives peut être assignée en redressement judiciaire pendant un an à compter de l'arrêt d'activité.

Plus précisément l'article L631-5 du code de commerce:

1° La radiation du registre du commerce et des sociétés. S'il s'agit d'une personne morale, le délai court à compter de la radiation consécutive à la publication de la clôture des opérations de liquidation  (par exemple Cass com 27 juin 1989 n°87-14968 Cass com 23 octobre 2019 n°18-15475 ou Cass com 18 janvier 2023 n°21-21748 pour une personne physique immatriculée, qui précise que le délai d'un an court dans ce cas à compter de sa radiation.

2° La cessation de l'activité, s'il s'agit d'une personne exerçant une activité artisanale, d'un agriculteur ou d'une personne physique exerçant une activité professionnelle indépendante, y compris une profession libérale soumise à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé ;

3° La publication de l'achèvement de la liquidation, s'il s'agit d'une personne morale non soumise à l'immatriculation.

L'article L640-5 reprend les mêmes dispositions pour la liquidation judiciaire.

La date de cessation d'activité est appréciée souverainement par les juges du fond Cass com 20 octobre 2021 n°20-12384

Ainsi en prenant en considération pour les personnes morales la clôture des opérations de liquidation et pour les personnes physiques la cessation de l'activité, le texte donne une réelle importance à l'arrêt de l'activité par rapport à la radiation du registre du commerce ou du répertoire des métiers, mais évidemment la radiation est un indice important (voir Cass com 12 juillet 2016 n°14-19694)

Notons ici que la procédure collective peut être prononcée sur assignation d'un créancier dans l'année de la radiation de la société consécutive à la clôture de la liquidation au sens du droit des sociétés. La radiation n'est pas constitutive de fraude, qui permettrait au créancier de demander l'ouverture d'une procédure collective au delà d'un an, au seul motif que la publication dans un journal d'annonces légales est "illusoire" Cass com 25 mai 2022 n°19-24470

Les autres cas de radiation ne sont donc pas concernés par le texte, et en particulier les radiations d'office, et dans ces cas le délai d'un an semble inapplicable.

Synthèse

La liquidation judiciaire peut être ouverte dans les conditions de demande de droit commun (débiteur, Parquet), (L631-5 du code de commerce  et L640-5 la saisine d'office ayant été supprimée) si le passif correspond aux conditions légales (provenance de l'activité) sans restriction de délai par rapport à l'arrêt de l'activité.

Concernant la demande d'un créancier, tendant  à l'ouverture d'un redressement ou d'une liquidation judiciaires, l'assignation doit être délivrée dans le délai d'un an

Ce délai d'un an ne s'applique par contre par si c'est le débiteur qui demande l'ouverture de la procédure : même au delà d'un an, si des dettes provenant de l'exploitation subsistent, le débiteur peut déposer une déclaration de cessation des paiements et demander le redressement judiciaire (ou la liquidation).

Cette différence de traitement entre le débiteur et le créancier est assez singulière .

Pour les personnes morales, cela revient à admettre que le processus conduisant à la radiation du registre du commerce soit mené sans qu'un créancier soit payé et sans qu'il soit procédé à une déclaration de cessation des paiements,

Pour les personnes physiques, cela revient à admettre qu'elle cesse son activité sans se préoccuper d'effectuer une déclaration de cessation des paiements.

Il serait plus logique dans ces cas que ce soit l'action du créancier qui ne soit pas limitée dans le temps (sauf la prescription de la créance) dès lors que la radiation de la société ou la cessation d'activité de la personne physique aura été recherchée en violation de ses droits, plutôt que celle du débiteur qui aura négligé un créancier et/ou de déclarer son état de cessation des paiements. Cette possibilité de rattrapage pour le débiteur mériterait sans doute d'être repensée, et les droits du créancier devraient être calqués sur la prescription (maintenant abrégée depuis la loi de 2008);

Le cas particulier des sociétés radiées: qui les représente ?

Voir le mot radiation