Intuitu personae

Généralités

C'est le terme d'origine latine qui signifie "qui repose sur la personne". Concrètement un contrat intuitu personae a été expressément conclu en fonction de la personne du contractant, qui ne peut être remplacé par un autre car il a été très précisément choisi.

Par exemple un contrat de travail est un contrat intuitu personae et une autre personne que le salarié ne pourrait pas venir travailler à sa place en prétendant exécuter les obligations du salarié.

l'intuitu personae en procédure collective

En procédure collective la notion d'intuitu personae se confronte aux dispositions légales permettant au tribunal d'ordonner la cession forcée d'un contrat: par exemple dans le cadre de la cession d'une entreprise, le tribunal va préciser quels sont les contrats dont la cession est nécessaire, qui sont donc cédés le cas échéant contre la volonté de l'autre contractant que le débiteur.

Relativement aux contrats intuitu personnae il peut être choquant d'en ordonner la cession à un tiers, qui n'est pas celui choisi.

Concernant les contrats de travail, la question est réglée par les textes puisque l'article L1224-1 du code du travail a instauré un transfert automatique et obligatoire des contrats.

La jurisprudence est plus hésitante pour d'autres contrats, et notamment le contrat de franchise, au moins quand il s'agit de remplacer le franchiseur en redressement judiciaire par un autre (voir revue l'ESSENTIEL MAI 2014 n°069)

Le débat peut effectivement exister pour des contrats à forte connotation personnelle pour lesquels certains pensent que la cession forcée n'est pas possible, précisément en raison du fait que le contractant a été choisi en fonction de sa personne.

A priori cette distinction n'a pas véritablement lieu d'être (on peut faire l'analogie entre la procédure collective et la transmission universelle du patrimoine pour laquelle la notion d'intuitu personae ne semble pas être prise en considération Cass com 8 novembre 2017 n°16-17296), sauf des cas très marginaux où non seulement l'engagement du contractant repose véritablement sur la personne de l'autre contractant mais également où la convention ne pourrait être exécutée par un autre.

Par exemple on voit mal un écrivain, un compositeur ou un musicien en remplacer un autre, choisi spécifiquement pour son talent et ses particularités, et dans ce cas la cession du contrat sera impossible.

Au delà de ces considérations, certains auteurs - et certaines juridictions - pensent que le contrat de franchise ne pourrait pas faire l'objet d'une cession forcée ( voir revue l'Essentiel mai 2014 n°69 TGI de Strasbourg 20.12.2013 2013/003929 qui reprend des arrêts de Cour d'appel notamment Versailles 28 Mars 1996, CA Paris 15 décembre 1992, CA Orléans 14 Septembre 2000) mais en réalité ces décisions se comprennent plus en cas de procédure collective du franchiseur que du franchisé, la cession d'entreprise faisant échec par principe aux droits particuliers du contractant (préemption, surenchère ..). Il semble en outre que l'évolution tende à admettre la cession du contrat de franchise, si les conditions légales sont réunies, c'est à dire si le cession est nécessaire à la poursuite de l'activité ... ce qui est une évidence si c'est le franchiseur qui est cédé (voir JCP Entreprise 6.11.2014 page 19)

Certains considèrent d'ailleurs que ce n'est pas sur la notion d'intuitu personnae que porte en réalité le débat, mais sur le fait de savoir si le contrat est un contrat de fourniture de biens ou de services (domaine de l'article L642-7 du code de commerce), et si les obligations contractuelles peuvent ou pas, être réalisées par le contractant "cédé". Cela fait peu de doute concernant la franchise, qui devrait pouvoir, selon nous, faire l'objet d'une cession forcée dans le cadre d'une cession d'entreprise.