Sauvegarde

Quelques points de la définition

Présentation schématique

Présentation détaillée

La sauvegarde en quelques phrases

La procédure

Ouverture: conditions et procédure

Conditions d'ouverture : précisions sur la moralité de la demande et le risque de fraude

Période d'observation

Objectifs de la période d'observation

Première audience de contrôle

Répartition des rôles entre administrateur et mandataire judiciaire

Vérification des créances par le mandataire judiciaire

Poursuite de l'activité avec l'intervention de l'administrateur judiciaire

La solution du plan de sauvegarde

La sortie de la procédure par constat de l'achèvement des difficultés

La constatation de l'état de cessation des paiements

Le passage en redressement judiciaire sans que l'état de cessation des paiements soit constaté

Différences redressement judiciaire / sauvegarde

Présentation schématique

La procédure est ouvrerte par le tribunal pour toute entreprise qui sans être en état de cessation des paiements connaît des difficultés qu’elle ne peut pas surmonter ( c'est la différence majeure avec le redressement judiciaire pour lequel il y a état de cessation des paiements).

Ce jugement désigne obligatoirement un juge commissaire, un mandataire judiciaire.

La désignation d'un administrateur judiciaire est facultative pour les entreprises dont le nombre de salariés est inférieur à 20 et le chiffre d'affaires HT est inférieur à 3.000.000 €. Au delà elle est obligatoire

Le jugement ouvre une période dite d’observation d’une durée maximale de 6 mois, durant laquelle les informations permettant de renseigner le Tribunal sur la situation sont collectées et les solutions devront être présentées.

La période d’observation peut être renouvelée une fois (6 mois) par un nouveau jugement du Tribunal, et pourra l’être une seconde fois (6 mois) de manière exceptionnelle sur demande du Procureur de la République.

Présentation détaillée

Comment est organisée la procédure de sauvegarde ?

Sauvegarde ou redressement judiciaire en quelques phrases:

Imaginez que l'entreprise est traitée comme si elle a commencé son activité le jour du jugement d'ouverture de la procédure: elle n'a pas de dettes, commence son activité et paye à bonne date ses dettes postérieures au jugement. Pendant la période d'observation, tout son passé est "mis de côté" pour lui permettre de préparer l'avenir. Elle va donc reconstituer sa trésorerie, se réorganiser. Ce n'est qu'après la période d'observation que des solutions seront recherchées, et que le passé sera repris en considération, si c'est possible par un plan de remboursement des créanciers (qui sauf exceptions peut durer jusqu'à 10 ans). On peut véritablement dire que l'entreprise est sous la protection de la loi, est d'ailleurs les créanciers antérieurs au jugement ne peuvent pas la poursuivre ou effectuer des saisies pour être payés. Ce sont les idées d'organisation de la sauvegarde ou du redressement judiciaire.

La procédure de sauvegarde

La procédure de sauvegarde : procédure permettant la poursuite d’activité dans une perspective de résolution de difficultés le cas échéant avec plan de sauvegarde organisant le règlement échelonné des créanciers.

Le déroulement de la procédure comprend trois "phases": l'ouverture de la procédure, la période d'observation et la solution, c'est à dire le plan de sauvegarde.

Ouverture de la procédure : conditions et procédure

La procédure de sauvegarde est réservée aux entreprises qui connaissent des difficultés qui peuvent compromettre à terme leur pérennité, mais ne sont pas en état de cessation des paiements (c'est-à-dire sont pour l’instant capables de payer leurs dettes à bonne date)

Il s’agit d’anticiper sur une prévisible dégradation de la situation pour permettre à l’entreprise de sortir de ces difficultés sans subir la pression de ses créanciers.

Par parenthèse, et dès lors qu'une fois qu'elle est ouverte, la procédure de sauvegarde se déroule comme un redressement judiciaire sur l'aspect traitement du passif, on ne peut que relever que la prétendue absence de cessation des paiements repose sur une hypocrisie flagrante : si l'entreprise n'avait pas de passif échu non payé, le plan de sauvegarde  ne concernerait aucun créancier, sauf évidemment dans le cas, très improbable, dans lequel l'entreprise dispose au jour du jugement de la trésorerie lui permettant d'honorer tout son passif échu. Dans ce cas et dans ce seul cas la sauvegarde est justifiée, et ses effets permettront de préserver la trésorerie et de soumettre les créances échues au plan.

C'est l'article L620-1 du code de commerce qui décrit la procédure

Le tribunal ne peut être saisi que par le chef d’entreprise, qui lui demande l’ouverture de la procédure.

Le jugement qui ouvre la procédure va désigner :

- Un juge commissaire qui est un de ses membres, comme dans toutes les procédures de traitement des difficultés

- Un mandataire judiciaire, qui est un mandataire judiciaire professionnel (son nom est indiqué dans le jugement d'ouverture) qui sera principalement chargé avec le chef d'entreprise d'arrêter le passif (le montant des dettes)

- Le cas échéant un administrateur judiciaire, qui est lui aussi un mandataire de justice professionnel (c'est généralement le cas, et dans cette hypothèse son nom est indiqué dans le jugement d'ouverture) qui sera principalement chargé d'assister le chef d'entreprise dans les démarches permettant de préparer l'avenir (ouverture d'un nouveau compte bancaire, mesures de restructuration, préparation des prévisionnels, préparation d'un plan "de remboursement" des créanciers ..).

Pour plus de précisions voir dans le lexique les mots "mandataires de justice", "mandataire judiciaire" et "administrateur". Le mot "mandataire de justice" du lexique explique notamment comment sont désignés les professionnels. 

Conditions d'ouverture précisions sur la moralité de la demande

Les différences entre la procédure de redressement judiciaire et la sauvegarde sont telles que le débiteur peut chercher à bénéficier de la procédure de sauvegarde pour éviter l'éviction des dirigeants, ou pour se trouver à l'abri des poursuites des créanciers de manière injustifiée.

La Cour de Cassation a eu l'occasion de se prononcer sur ces risques d'instrumentalisation de la procédure de sauvegarde:  

"si la société débitrice justifie de difficultés qu'elle n'est pas en mesure de surmonter et qui sont de nature à la conduire à la cessation des paiements, l'ouverture d'une procédure de sauvegarde ne peut lui être refusée au motif que ses associés ne seraient pas fondés à éviter, par ce moyen, d'en perdre le contrôle"

"hors le cas de fraude, l'ouverture de la procédure de sauvegarde ne peut être refusée au débiteur, au motif qu'il chercherait ainsi à échapper à ses obligations contractuelles, dès lors qu'il justifie, par ailleurs, de difficultés qu'il n'est pas en mesure de surmonter"

Autrement dit, il convient que les conditions visées au texte soient réunies, et sauf cas de fraude il n'est pas possible de refuser l'ouverture de la procédure, au motif que le débiteur en tirerait le bénéfice prévu par la loi Cass com 8 mars 2011 n°10-13989

Période d’observation :

Le principe de la période d’observation :

Le jugement qui prononce la sauvegarde va également ouvrir une période dite d’observation, de 6 mois, renouvelable une fois par jugement du Tribunal (6 mois supplémentaires).

La possibilité d'un second renouvellement à la demande du Procureur de la République qui existait dans le texte initial a été supprimée.

Les objectifs de la période d’observation :

Cette période d’observation répond à plusieurs nécessités :

- « cliché instantané » : Faire un bilan détaillé de l’état de l’entreprise, dans l’ensemble des domaines importants : trésorerie, comptable, exploitation, social, commercial, juridique. L’administrateur judiciaire et le mandataire judiciaire devront établir divers rapports pour renseigner le Tribunal, le juge commissaire et le Procureur de la République.

- « mise en place de l’avenir » : Rechercher et mettre en place si elles existent les mesures de restructuration nécessaires, là encore dans l’ensemble des domaines importants pour la vie de l’entreprise. L’administrateur judiciaire assistera l’entreprise pour préparer l’avenir. Le but est de mettre en œuvre, si c’est possible, des mesures qui permettront à terme de préparer des documents comptables prévisionnels améliorés, qui dégageront suffisamment de trésorerie pour rembourser les créanciers (selon un échelonnement arrêté dans le cadre d’un plan)

- « évaluation du passé » : Connaître très exactement le montant des dettes qu’il faudra rembourser une fois que la restructuration sera avancée, et que la période d’observation prendra fin. Le mandataire judiciaire procèdera avec le chef d’entreprise et le cas échéant son comptable, à la vérification des créances qui conduira à l’arrêté par le juge commissaire de l’état des créances.

- Reconstitution de la trésorerie de l’entreprise : Pendant cette période d’observation, tout se passe comme si l’entreprise avait commencé son activité le jour du jugement d’ouverture de la sauvegarde sans le poids du passé: on ne tient provisoirement pas compte des dettes antérieures au jugement, qui sont « mises entre parenthèse ».

Concrètement:

- les créanciers antérieurs au jugement ne peuvent exiger d’être payés ou prendre des initiatives pour l’être (c’est ce qu’on appelle la « suspension des poursuites ») : si par exemple un procès était en cours pour que l’entreprise soit condamnée à payer, si des saisies risquaient de survenir .. ils ne pourront aboutir. L’entreprise est donc plus sereine puisqu’elle n’a pas la pression d’éventuelles saisies.

- Le chef d’entreprise ne peut utiliser la trésorerie « nouvelle » » pour payer des dettes antérieures au jugement.
En présentation imagée de la procédure, l'entreprise est dans un premier temps considérée comme si elle avait commencé son activité le jour du jugement d'ouverture de la procédure de sauvegarde. Son passif (ses dettes) antérieur au jugement est pour l'instant "mis entre parenthèse" c'est à dire que les dettes ne sont pas payées (elles sont pendant ce temps vérifiées par le mandataire judiciaire avec le chef d'entreprise).

L’entreprise bénéficie donc d’une « bouffée d’oxygène » puisqu’elle est provisoirement déchargée de ses dettes antérieures au jugement, et doit consacrer ses efforts à l’amélioration de sa situation. Evidemment c’est l’occasion pour l’entreprise de reconstituer sa trésorerie puisqu’elle ne paye pas ses dettes antérieures.

L'entreprise va poursuivre son activité pendant cette période dite d'observation pendant laquelle des solutions de réorganisation seront recherchées pour permettre à terme de présenter un "plan de remboursement" aux créanciers basé sur des prévisions d'activité. Cette période dure 6 mois et peut être renouvelée une fois puis une seconde fois de manière exceptionnelle.

Par contre la période d’observation ne peut en aucun cas conduire à une aggravation de la situation, et l’entreprise doit assurer le paiement à bonne date de toutes les dettes postérieures au jugement.
C’est la première condition du maintien en période d’observation.

Première audience « de contrôle » :

Même si, à la différence du redressement judiciaire où c'est prévu par un texte (L631-15) il n'existe pas d'obligation légale, il est fréquent que le tribunal fixe dans le jugement d’ouverture de la procédure la date d’une future audience, quelques semaines plus tard. Cette première audience est une audience « de contrôle », pour s’assurer que l’entreprise est bien en mesure de poursuivre son activité dans générer de nouvelles dettes. Cette audience est purement administrative si l’entreprise règle normalement ses dettes nouvelles et bénéficie d’un suivi comptable, elle sera l’occasion de mettre immédiatement un terme à l’activité si le Tribunal n’est pas en mesure d’être sécurisé sur la trésorerie. En effet si l'arrêt de l'activité s'impose il est inutile d'attendre pour en tirer les conséquences.

L’activité est donc en principe poursuivie si l’entreprise n’aggrave pas sa situation.

La répartition des rôles entre l'administrateur judiciaire et le mandataire judiciaire:

Pour rester dans une présentation imagée, pendant la période d'observation, le mandataire judiciaire va s'occuper du passé, c'est à dire d'arrêter le montant des dettes antérieurs au jugement qui ont été "mises entre parenthèse".

L'administrateur va s'occuper de l'avenir, c'est à dire de la période postérieure au jugement pour préparer le plan de "remboursement" des créanciers (s'il est possible) tout en veillant à ce que des dettes nouvelles ne soient pas créées.
 

La vérification des créances et le mandataire judiciaire:

Plus précisément :

Le mandataire judiciaire est donc chargé du « passé », et particulièrement de la vérification des créances, qui consiste à recenser les dettes : il est tenu de circulariser les créanciers conformément aux indications que le chef d’entreprise est tenu de lui remettre.

Les créanciers recevront donc dans les jours suivant le jugement une circulaire du mandataire judiciaire les invitant à lui faire connaitre le montant de la créance qu’ils revendiquent : on appelle cette formalité la « déclaration de créance ».

Le chef d’entreprise sera avisé de prévenir lui-même les créanciers avec lesquels il a un contact personnel, pour éviter qu’ils découvrent la situation par la circulaire du mandataire judiciaire.

Les créanciers disposent d’un délai (de deux mois à compter de la publicité du jugement d’ouverture, effectué par le greffe du Tribunal dans un journal dénommé BODACC) pour répondre au mandataire judiciaire.

A l’issue de ce délai, le mandataire judiciaire pourra transmettre au chef d’entreprise un état des créances déclarées auprès de lui, pour que les sommes demandées soient vérifiées avec les éléments comptables de l’entreprise.

Ce rapprochement, qu’on appelle « vérification des créances » permet de s’assurer de l’exactitude des « déclarations de créance » : par exemple le chef d’entreprise peut avoir oublié d’enregistrer dans sa comptabilité un chèque impayé, des pénalités ou majorations, mais le créancier peut avoir oublié de déduire un avoir ou un dernier règlement.

Les déclarations de créances sans discordance avec la comptabilité de l’entreprise feront partie du « passif », et celles pour lesquelles un désaccord existe donneront lieu à une contestation par le mandataire judiciaire.
Dans un premier temps, celui-ci adressera un courrier recommandé au créancier en lui indiquant le montant pour lequel il propose de retenir sa créance et les raisons du désaccord.
 

Le créancier disposera d’un délai de 30 jours pour lui répondre : soit il acceptera le montant proposé et reconnaitra son erreur, soit il maintiendra un montant sur lequel le chef d’entreprise n’est pas d’accord.
Dans le premier cas (accord sur le montant) la créance sera mentionnée dans le « passif ».
Dans le second cas (désaccord persistant après le courrier du mandataire judiciaire), le juge commissaire convoquera les parties (débiteur, créanciers, mandataire judiciaire, administrateur judiciaire s’il y en a un), et au terme d’une audience à l’occasion de laquelle chacun pourra s’exprimer, prendra une décision (ordonnance) qui sera mentionnée dans le « passif ».

Ainsi l’ensemble des créances, exactes dès le début ou conséquences d’échanges de courriers avec le mandataire, ou encore conséquences de décisions du juge commissaire, constitueront « l’état des créances », c’est-à-dire le montant total du passif antérieur au jugement qui avait été « mis entre parenthèse » pendant la période d’observation.

La poursuite de l'activité et l'administrateur judiciaire:

L’administrateur judiciaire (s’il en est désigné un, ce qui est généralement le cas) est donc au contraire chargé de l’avenir : il va assister l’entreprise pour les mesures urgentes – par exemple ouverture d’un nouveau compte bancaire -, les éventuelles restructurations à entreprendre.

A terme, le but de la période d’observation est, par des documents prévisionnels, de se faire une idée de ce que l’entreprise pourra, pour l’avenir, proposer à ses créanciers antérieurs au jugement qu’on a pour l’instant laissés « entre parenthèse ».

A partir de cette indication, le rapprochement est fait avec le « passé », c’est-à-dire l’état des créances issu de la « vérification des créances » réalisée entre le mandataire judiciaire et le chef d’entreprise : le rapport entre le montant des dettes et les possibilités de règlement permettra – ou pas – d’envisager de proposer un « plan » de remboursement aux créanciers.

La procédure est organisée pour conduire à une solution de plan de sauvegarde. Cependant d'autres solutions de "sortie" de la procédure sont possibles.

La solution du plan de Sauvegarde

Pour des explications plus détaillées, voir dans cette même rubrique "tout ce que vous voulez savoir" le sous menu "plan de remboursement des créanciers" qui donne plus de précisions sur les possibilités d'organisation des propositions de plan

La solution statistiquement la plus fréquente de la procédure de sauvegarde est le plan.

D'autres solutions sont envisageables: l'entreprise peut tout simplement être sorti de ses difficultés par les effets de la période d'observation et dans ce cas le Tribunal le constate et met fin à la procédure. La cessation des paiements peut être constatée et le Tribunal va prononcer le redressement judiciaire, et enfin l'échec de toute autre solution peut conduire à la liquidation judiciaire.

Pour entrer dans le détail du plan,le plan de sauvegarde est un « plan organisant le remboursement échelonné dans le temps des créanciers » en fonction de deux informations qui sont réunies et conciliées :

- Combien doit l’entreprise ? Cette information émane de la vérification des créances : passif qui avait été "mis entre parenthèse" sera pris en considération,

- Combien l’entreprise peut-elle raisonnablement rembourser annuellement ? Cette information émane des documents comptables prévisionnels établis durant la période d’observation, et est la conséquences des mesures prises, et du traitement de « l’avenir » avec le concours de l’administrateur judiciaire,
le plan pourra être envisagé sur la durée compatible avec ces deux paramètres.

Ainsi l’entreprise, avec le concours de l’administrateur judiciaire, mettra au point ses propositions de remboursement des créanciers, avec un échelonnement dans le temps, et le cas échéant avec des remises.

Les contraintes posées par la loi pour le plan:

Les limites imposées par la loi sont relativement souples, et sont au nombre de trois :

- la durée maximale de remboursement des créanciers est de 10 ans (15 ans pour les agriculteurs).

- le premier remboursement doit intervenir au maximum un an après le jugement arrêtant le plan : la première « annuité » de remboursement des créanciers devra intervenir au plus tard à la date anniversaire du jugement arrêtant le plan.

- les remboursements peuvent être annuels (c’est le plus pratique et la modalité qui prend le plus en considération les irrégularités du chiffre d’affaires dans l’année), mais dans tous les cas le minimum légal, c’est-à-dire imposé par la loi, est de 5% de chaque créance à compter de la troisième année. Les deux premières années, le plan peut prévoir des remboursements moins importants.

Comme indiqué dans la partie relative aux plans les juridictions ont tendance à considérer que ces contraintes s'imposent à tous les créanciers, alors en réalité le débiteur est totalement libre des propositions qu'il destine aux créanciers, qui sont libres de les accepter, et ce n'est qu'en cas de refus, et si le Tribunal arrête néanmoins le plan, que les modalités de remboursement des créanciers qui ont refusé les propositions seront fixées par le Tribunal à l'intérieur de ces contraintes

Mise en pratique des contraintes imposées par la loi: 

Ainsi bien souvent dans la pratique les plans proposés se situent, pourtant sans aucune nécessité juridique, à l'intérieur des contraintes légales qui s'appliquent uniquement aux créanciers qui ont refusé les propositions.

A titre d’exemple un plan « « élémentaire » proposera aux créanciers de les rembourser à 100% en 10 ans, par échéances annuelles de 10% chacune, la première payable à l’anniversaire du jugement adoptant le plan.

A l’intérieur de ces limites, le plan de remboursement proposé aux créanciers peut prévoir des options, généralement pour laisser le choix aux créanciers entre un remboursement intégral mais long et un remboursement plus rapide mais partiel.

Toujours à titre d’exemple on peut, pour autant que cela soit conforté par des documents comptables prévisionnels et des prévisions d’activité, proposer aux créanciers de se déterminer entre :
- une proposition à 100% en 10 ans avec progressivité c’est-à-dire par exemple 2% les deux premières années, 5% la troisième année (minimum imposé par la loi pour la troisième année), 6% la quatrième année, 10% la cinquième année, et 15% les années suivantes jusqu’à la 10ème, soit un total de 100%
- une proposition à 40% en quatre ans, avec des annuités de 10% par an, soit au total 40%.

La première option correspond à la « carte » du remboursement intégral, mais ce sont seulement 15% qui seront payés à l’issue des 4 premières années, alors que l’autre option correspond à la « carte » du remboursement partiel, mais plus rapide, avec 40% de la créance à l’issue des 4 premières années et abandon des 60% de la créance (et le traitement fiscal de l’abandon de créance qui va avec, que ce soit en matière de TVA ou d’IS).

La consultation des créanciers:

C’est le mandataire judiciaire qui consultera les créanciers : par courrier (ou assemblée) il leur demandera de prendre position sur ces propositions et s’il y en a plusieurs de se déterminer entre les différentes propositions: il suffira aux créanciers de répondre au mandataire judiciaire en lui indiquant leur décision, le cas échéant en indiquant quelle est l’option qu’ils choisissent, ou même en indiquant qu’ils refusent toutes les propositions.
Le mandataire judiciaire en informera le Tribunal et rendra compte des réponses des créanciers en remettant au tribunal une liste des réponses positives et des réponses négatives des créanciers.

La décision du Tribunal sur le plan:

Au vu des réponses des créanciers, le Tribunal prendra une décision (jugement) :

- soit le Tribunal arrêtera (« acceptera ») le plan, s’il estime que les propositions sont correctes et que les réponses des créanciers le permettent. Ce n’est pas parce que des créanciers ont refusé le plan que le Tribunal est contraint de refuser le plan, ce qui déterminera le Tribunal est plus la viabilité de l’entreprise, le sérieux des prévisions, et évidemment la position de l’ensemble des créanciers.

- soit le Tribunal considérera le plan comme insuffisant, ou que les réponses des créanciers ne permettent pas de l’arrêter (« de l’autoriser »).

Le jugement arrêtant le plan: contenu, effets, commissaire à l'exécution du plan.

Si le Tribunal arrête le plan (« l’accepte »), il donnera deux précisions dans son jugement :

- le Tribunal prendra acte de la décision des créanciers qui ont accepté les propositions. Chacun sera remboursé en fonction de la proposition qu’il aura acceptée.

- Pour les créanciers qui ont refusé toutes les propositions, le tribunal leur imposera des délais, mais ne pourra leur imposer de remise : ils seront donc remboursés à 100%, mais dans le délai fixé par le Tribunal, qui ne peut dépasser 10 ans.

En principe pour les créanciers qui ont refusé les propositions le Tribunal fixe des délais calqués sur ceux de la plus longue des propositions, pour éviter de déséquilibrer la trésorerie et ne pas mettre en péril le plan.
Le jugement qui arrête, c'est-à-dire « valide » le plan de remboursement des créanciers va désigner un commissaire à l’exécution du plan, qui est soit l’administrateur judiciaire soit le mandataire judiciaire.

La mission du commissaire à l’exécution du plan sera de recevoir de l’entreprise les sommes nécessaires au règlement des échéances du plan, et de payer chaque créancier en fonction du plan.

En cas de difficulté, le commissaire à l’exécution du plan se rapprochera de l’entreprise pour examiner les possibilités de régularisation des échéances, et en informera le Tribunal pour qu’il puisse, si nécessaire, mettre un terme au plan, c'est-à-dire ordonner sa « résolution ».

La solution de sortie par achèvement des difficultés

La procédure de sauvegarde, et en particulier la suspension des poursuites qu'offre la période d'observation peut à elle seule parfois permettre de solutionner les difficultés de l'entreprise.

Dans ce cas et à tout moment de la période d'observation, le Tribunal peut constater que les difficultés sont résolues, et mettre un terme à la procédure: dans ce cas il n'y a pas de plan. L622-12 du code de commerce et L622-10 alinéa 4

Les solutions de constatation de l'état de cessation des paiements

S'il s'avère en cours de période d'observation que l'entreprise est en état de cessation des paiements, le Tribunal mettra fin à la procédure de sauvegarde qui sera "convertie" en procédure de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire suivant les circonstances (article L622-10 du code de commerce)

L'état de cessation des paiements peut résulter de la constatation que le Tribunal s'est trompé en ouvrant la procédure de sauvegarde, et qu'en réalité il y avait cessation des paiements, mais également de la survenue de la cessation des paiements en cours de période d'observation de la procédure de sauvegarde. Par exemple le débiteur faisait l'objet d'un contentieux en cours au jour de la procédure de sauvegarde, et est finalement condamné définitivement après l'ouverture de la procédure: cette dette, exigible et antérieure à l'ouverture de la procédure de sauvegarde (notion de fait générateur) va amener le constat de la cesation des paiements (voir notamment Cass com 5 mai 2015 n°14-11706 sur le fait que le tribunal se pmositionne au jour où il statue pour apprécier l'état de cessation des paiements)

Le tribunal est saisi par le débiteur, l'administrateur judiciaire, le mandataire judiciaire et peut se saisir d'office (article L622-10). L'article R622-11 précise les modalités de saisine du tribunal (requête sauf le cas de saisine d'office où le débiteur est convoqué)

Ce passage de la sauvegarde au redressement judiciaire est également souvent motivé par les besoins de l'intervention de l'AGS (voir le lexique) pour payer les salaires, puisqu'en procédure de sauvegarde l'AGS n'intervient pas pour payer les salaires.

La solution du redressement judiciaire sans que l'état de cessation des paiements soit constaté

L'article L622-10 prévoit en son alinéa 3 "A la demande du débiteur ou, à la demande de l'administrateur, du mandataire judiciaire ou du ministère public, lorsqu'aucun plan n'a été adopté conformément aux dispositions de l'article L. 626-30-2 et, le cas échéant, de l'article L. 626-32 par les comités mentionnés à la section 3 du chapitre VI du présent titre, il (comprendre le tribunal) décide également la conversion en redressement judiciaire si l'adoption d'un plan de sauvegarde est manifestement impossible et si la clôture de la procédure conduirait, de manière certaine et à bref délai, à la cessation des paiements."

Dans ce cas le redressement judiciaire est prononcé non pas sur le constat de l'état de cessation des paiements mais de sa survenue prochaine. Par la suite d'ailleurs la liquidation judiciaire de ce redressement judiciaire pourra être prononcée si le redressement est manifestement impossible, c'est à dire sans, là encore, que l'état de cessation des paiements soit constaté Cass com 28 février 2018 n°16-19422

Quelques différences entre la procédure de sauvegarde et le redressement judiciaire

voir sauvegarde / redressement les différences