Solidarité (et clauses de solidarité)

Quelques points de la définition

En droit commun

La solidarité fiscale du dirigeant

La solidarité fiscale en cas de cession du fonds de commerce ou d'une entreprise non commerciale

Cession d'un fonds de commerce

Cession d'une entreprise non commerciale

Mode de calcul de la créance au titre de la solidarité

Délais et procédure

Solidarité et procédures collectives

Traitement des engagements de solidarité avec le débiteur 

Les clauses de solidarité

Clause par laquelle le cédant est solidaire du cessionnaire

Clause par laquelle le cessionnaire est solidaire du cédant

Solidarité fiscale

En droit commun

Des débiteurs "solidaires" d'un même créancier peuvent chacun être actionnés en paiement pour la totalité de la somme : concrètement le créancier dispose de plusieurs débiteurs pour la même dette et peut actionner celui de son choix.

Celui qui a payé pour le tout peut se retourner contre les autres pour leur part (articles 1213 et 1214 du code civil)

La solidarité peut découler d'un contrat, d'une décision de justice ou d'une disposition légale: par exemple en cas de cession de fonds de commerce la loi aménage une solidarité fiscale entre cédant et cessionnaire, de telle manière que l'administration fiscale ne perde pas son gage à l'occasion de la vente. En cas de location gérance de fonds de commerce les exploitants successifs sont solidaires de certaines dettes, pour les mêmes raisons.

La loi de finance 2016-1918 du 29 décembre 2016 a aménagé ces solidarités légales (articles 25 et 26) en en réduisant le délai à 30 jours de la cession si le cédant du fonds de commerce a effectué ses déclarations fiscales (révision de l'article 1684 du code général des impôts)

La solidarité fiscale du dirigeant

L'article L267 du livre des procédures fiscales organise la responsabilité solidaire du dirigeant avec le débiteur principal (l'entreprise) et est d'ailleurs applicable au dirigeant de fait Cass com 6 juillet 2022 n°20-14168

Voir responsabilité des dirigeants

Il s'agit de la solidarité fiscale du chef d'entreprise en cas de manquements graves et répétés dans les obligations fiscales de l'entreprise rendant impossible le recouvrement de l'impôt: cette solidarité n'est pas spécifique aux procédures collectives, qui n'y dérogent pas, et pour cause: c'est fréquemment en situation de difficulté que l'entreprise ne respecte pas ses obligations comptables et sociales: le dirigeant peut être tenu solidairement des dettes fiscales de l'entreprise (article L267 du livre des procédures fiscales), notamment en matière de TVA collectée et non reversée.

"Lorsqu'un dirigeant d'une société, d'une personne morale ou de tout autre groupement, est responsable des manoeuvres frauduleuses ou de l'inobservation grave et répétée des obligations fiscales qui ont rendu impossible le recouvrement des impositions et des pénalités dues par la société, la personne morale ou le groupement, ce dirigeant peut, s'il n'est pas déjà tenu au paiement des dettes sociales en application d'une autre disposition, être déclaré solidairement responsable du paiement de ces impositions et pénalités par le président du tribunal de grande instance. A cette fin, le comptable public compétent assigne le dirigeant devant le président du tribunal de grande instance du lieu du siège social. Cette disposition est applicable à toute personne exerçant en droit ou en fait, directement ou indirectement, la direction effective de la société, de la personne morale ou du groupement.

Les voies de recours qui peuvent être exercées contre la décision du président du tribunal de grande instance ne font pas obstacle à ce que le comptable prenne à leur encontre des mesures conservatoires en vue de préserver le recouvrement de la créance du Trésor."

Pour un exemple voir Cass com 14 octobre 2020 n°18-19154

Le manquement grave et répété des obligations fiscales ne nécessite pas la démonstration de la mauvaise foi ou des agissements intentionnels du dirigeant Cass com 5 juillet 2019 n°17-15598

La juridiction saisie (Tribunal judiciaire ex TGI) de l'action du Trésor Public tendant à voir le dirigeant déclaré solidaire du débiteur principal n'est pas compétente pour apprécier la validité de la déclaration de créance, qui relève de la juridiction de la procédure collective. Elle n'a pas non plus le pouvoir de moduler la condamnation et la solidarité joue pour la totalité de la créance fiscale Cass com 11 janvier 2005 n°02-16597 Cass com 11 juillet 2018 n°18-40022 Cass com 24 janvier 2019 n°18-19152. Pour la procédure voir Cass com 5 juin 2019 n°17-25809

L'engagement de l'action par le comptable public est enfermée dans un "délai satisfaisant" qui s'apprécie au regard de l'information de l'impossibilité de payer la créance fiscale, qui peut découler du jugement de liquidation (Cass com 18 décembre 2019 n°18-22132).

La mise en jeu de la responsabilité du dirigeant suppose l'impossibilité définitive de recouvrer l'impôt du par la société et n'est donc pas caractérisée si le liquidateur mène des actions susceptibles de procurer des fonds à la liquidation judiciaire Cass com 19 janvier 2022 n°19-18560 ou s'il est susceptible de verser une partie de sa créance à l'administration fiscale Cass com 6 juillet 2022 n°20-14532 

Si l'échéance de la dette fiscale se situe au jour du jugement de redressement judiciaire, date qui emporte interdiction de paiement des créances antérieures, la solidarité ne peut jouer Cass com 24 novembre 2021 n°18-25864

Enfin la solidarité peut être mise en oeuvre après la clôture de la liquidation judiciaire Cass com 19 janvier 2022 n°19-25888 mais évidemment dans la limite de la prescription de l'action en recouvrement contre la société Cass com 6 juillet 2022 n°20-14532 

La solidarité fiscale en cas de cession du fonds de commerce ou d'une entreprise non commerciale

Le mécanisme est décrit au Bulletin Officiel de l'administration fiscale BOI REC 20-30-20120912

Les dispositions du code général des impôts prévoient deux cas de responsabilité solidaire pour le paiement des impôts directs.

Il n'est pas dérogé à l'application des textes fiscaux en matière de procédure collective, et ces textes sont donc applicables aux cessions de fonds de commerce et de fonds professionnels, que ce soit dans le cadre d'une cession d'entreprise ou d'une cession de biens du débiteur en liquidation.

Dans les deux cas, le successeur du contribuable peut être rendu responsable solidairement avec son prédécesseur du paiement de l'impôt sur le revenu afférent aux bénéfices réalisés par ce dernier pendant l'année de la cession jusqu'au jour de celle-ci ainsi qu'aux bénéfices de l'année précédente lorsque, la cession étant intervenue pendant le délai normal de déclaration, ces bénéfices n'ont pas été déclarés avant la date de la cession.

-en cas de cession d’un fonds de commerce, à la charge du cessionnaire d'un fonds de commerce,

Le 1 de l'article 1684 du CGI vise les cas de cessions d'une entreprise industrielle, commerciale, artisanale ou minière,

Il résulte des dispositions du 1 de l'article 1684 du CGI que le cessionnaire d'une entreprise industrielle, commerciale, artisanale ou minière, peut être rendu responsable avec le cédant du paiement de certains impôts directs, à concurrence de la valeur du fonds et pendant un temps déterminé.

Cette responsabilité contraint, en pratique, le cessionnaire ou acquéreur à ne pas verser immédiatement au cédant ou vendeur le prix de vente du fonds de commerce afin de réserver ce paiement au Trésor si le comptable des finances publiques lui en fait la demande.

Ce régime de solidarité s'applique dans tous les cas de cession, qu'il s'agisse d'une vente forcée ou volontaire, qu'elle ait lieu à titre onéreux ou à titre gratuit. Le cessionnaire responsable peut donc être le donataire.

- en cas de cession d’un entreprise non commerciale à la charge du cessionnaire

Le 2 de l'article 1684 du code général des impôts, vise les cas de cession à titre onéreux soit d'une charge ou d'un office, soit d'une entreprise libérale ou du droit d'exercer une profession non commerciale.

Aux termes de l'alinéa 2 de l'article 1684 du CGI, en cas de cession à titre onéreux soit d'une charge ou d'un office, soit d'une entreprise ou du droit d'exercer une profession non commerciale, le successeur du contribuable peut être rendu responsable solidairement avec son prédécesseur du paiement de l'impôt sur le revenu afférent aux bénéfices réalisés par ce dernier pendant l'année de la cession jusqu'au jour de celle-ci ainsi qu'aux bénéfices de l'année précédente lorsque, la cession

Les impôts auxquels s'étend la responsabilité des cessionnaires

La solidarité établie par le 1er alinéa de l'art. 1684 CGI s'applique exclusivement aux impôts directs visés par ce texte : outre les cotisations d'impôt sur le revenu du cédant, le cessionnaire est responsable de l'impôt sur les sociétés et de la taxe d'apprentissage, restant dus par le cédant, conformément au troisième alinéa de cet article, qui étend la solidarité " dans les mêmes conditions en ce qui concerne l'impôt sur les sociétés et la taxe d'apprentissage ".

L'alinéa 4 de l'article 1684 CGI prévoit quant à lui que les tiers visés aux alinéas 1 à 3 (cessionnaire, successeur ou exploitant) sont également tenus solidairement avec le contribuable cédant d'effectuer en l'acquit des impositions dont il est responsable, les versements d'acomptes provisionnels d'impôt sur le revenu, à concurrence de la fraction de ces versements calculés sur les cotisations correspondantes de l'année précédente.

Dans le cas de cession d'entreprises non commerciales (alinéa 2 de l'article 1684 du CGI), ce régime de responsabilité s'applique dans les mêmes conditions en ce qui concerne l'impôt sur les sociétés.

La quotité servant de base à la responsabilité pour le paiement de l'impôt sur le revenu est déterminée forfaitairement par l'article 383 ter de l'annexe III au CGI (cf n° 210).

La période au titre de laquelle est fixé l'impôt sur le revenu dû solidairement varie en fonction du dépôt de la déclaration de l'année précédant la cession.

En effet, le cessionnaire est solidairement responsable avec le cédant du paiement de l'impôt sur le revenu établi au titre de deux périodes consécutives :

- dans tous les cas, celui afférent aux bénéfices réalisés entre le début de l'année ou de l'exercice de la cession et le jour de celle-ci ;

- il s'y ajoute éventuellement l'impôt sur le revenu de l'année précédente ou de l'exercice précédent, lorsque, la cession étant intervenue pendant le délai normal de déclaration, ces bénéfices n'ont pas été déclarés avant la date de la cession.

Autrement dit, la responsabilité s'étend aux bénéfices réalisés pendant cette période s'ils n'ont pas été déclarés par le cédant avant la date de la cession.

Le calcul servant de base à l'application de la responsabilité

Le 1er alinéa de l'article 383 bis de l'annexe III au CGI prévoit que le cessionnaire est solidairement responsable avec le cédant, dans les conditions et limites fixées par les 1, 2 et 4 de l'article 1684 du CGI du paiement de l'impôt sur le revenu afférent aux bénéfices ou revenus réalisés par celui-ci.

Dans le cas de cession soit d'une entreprise industrielle commerciale artisanale ou minière soit d'une charge ou d'un office d'une entreprise ou du droit d'exercer une profession non commerciale le cessionnaire est solidairement responsable avec le cédant, dans les conditions et limites fixées par les 1, 2 et 4 de l'article 1684 du CGI, du paiement de l'impôt sur le revenu afférent aux bénéfices ou revenus réalisés par ce dernier redevable.

En application de l'article 383 ter de l'annexe III au CGI, le montant de l'impôt dont le paiement peut être réclamé au cessionnaire est déterminé forfaitairement en appliquant à la cotisation assignée au cédant le rapport existant entre le montant des bénéfices ou revenus visés audit article et le montant du revenu global ayant servi de base à la cotisation considérée augmenté le cas échéant des charges déduites de ce revenu en application de l'article 156 du CGI.

Il est rappelé que le cessionnaire n'est responsable que jusqu'à concurrence du prix du fonds de commerce, si la cession a été faite à titre onéreux, ou de la valeur retenue pour la liquidation du droit de mutation entre vifs, si elle a lieu à titre gratuit (article 1684, alinéa 1, du CGI).

Ces dispositions sont applicables dans les mêmes conditions en ce qui concerne l'impôt sur les sociétés et la taxe d'apprentissage.

Par ailleurs, lorsque le cessionnaire a déjà versé au comptable de la DGFIP une partie du prix en l'acquit d'autres impôts directs ou de taxes sur le chiffre d'affaires, il ne peut lui être réclamé, pour le paiement des impôts visés à l'article 1684, que le reliquat du prix.

En revanche, les versements faits, avant l'expiration du délai de trois mois au cédant ou aux autres créanciers de celui-ci n'ont pas pour effet de le décharger de sa responsabilité.

Le cessionnaire n'est responsable que jusqu'à concurrence du prix de cession et durant un certain délai. Les modalités d'application de l'une et l'autre responsabilité sont identiques. Il ne s'agit pas d'une solidarité parfaite.

Délais et procédure

Pour les cessions ou ventes de fonds de commerce réalisées à compter du 1er janvier 2017, le délai de solidarité fiscale est ramené à 30 jours à compter du dépôt de la déclaration fiscale, dès lors que celui-ci est bien intervenu au plus tard 60 jours après la publication de la vente, et que le cédant a respecté au dernier jour du mois qui a précédé la vente, ou la cession, ses obligations déclaratives et de paiement en matière fiscale. Cette situation est de nature à permettre au vendeur de disposer de ses fonds dans des délais plus courts. Le vendeur pourra, le cas échéant, réinvestir rapidement dans un autre projet d’entreprise.

La solidarité ne peut donc être mise en cause que pendant un délai de trois mois qui commence à courir du jour de la déclaration prévue au 1 de l'article 201 du CGI si elle est faite dans le délai imparti par ledit article, ou du dernier jour de ce délai, à défaut de déclaration.

Plus précisément:

- l'article 1684 du CGI dispose:

"En cas de cession d'une entreprise industrielle, commerciale, artisanale ou minière, qu'elle ait lieu à titre onéreux ou à titre gratuit, qu'il s'agisse d'une vente forcée ou volontaire, le cessionnaire peut être rendu responsable solidairement avec le cédant du paiement de l'impôt sur le revenu afférent aux bénéfices réalisés par ce dernier pendant l'année ou l'exercice de la cession jusqu'au jour de celle-ci, ainsi qu'aux bénéfices de l'année ou de l'exercice précédent lorsque, la cession étant intervenue dans le délai normal de déclaration, ces bénéfices n'ont pas été déclarés par le cédant avant la date de la cession.

Toutefois, le cessionnaire n'est responsable que jusqu'à concurrence du prix du fonds de commerce, si la cession a été faite à titre onéreux, ou de la valeur retenue pour la liquidation du droit de mutation entre vifs, si elle a eu lieu à titre gratuit, et il ne peut être mis en cause que pendant un délai de quatre-vingt-dix jours qui commence à courir du jour de la déclaration prévue au 1 de l'article 201 si elle est faite dans le délai imparti par ledit paragraphe, ou du dernier jour de ce délai, à défaut de déclaration.

Lorsqu'il s'agit de la vente ou de la cession de fonds de commerce, le délai mentionné au deuxième alinéa commence à courir le jour du dépôt de la déclaration mentionnée aux 3 et 3 bis de l'article 201. Ce délai est ramené à trente jours lorsque les conditions suivantes sont réunies :

a) L'obligation mentionnée au deuxième alinéa du 1 de l'article 201 a été respectée ;

b) Le cédant a déposé la déclaration mentionnée aux 3 et 3 bis de l'article 201 dans le délai prévu au même article 201 ;

c) Le cédant respecte, au dernier jour du mois qui précède la vente ou la cession du fonds, ses obligations déclaratives et de paiement en matière fiscales.

A défaut, le délai est fixé à quatre-vingt-dix jours et commence à courir à compter de l'expiration du délai imparti pour déposer la déclaration de résultat."

C'est l'article 201 qui fixe le délai imparti pour déposer la déclaration, qui viendra donc s'ajouter au délai de 90 jours en cas de défaut de déclaration (comme c'est souvent le cas en liquidation judiciaire faute de documentation comptable à jour et de possibilité de rémunérer un comptable)

- l'article 201 du CGI dispose à ce sujet:

au 1: Les contribuables doivent, dans un délai de quarante-cinq jours déterminé comme il est indiqué ci-après, aviser l'administration de la cession ou de la cessation et lui faire connaître la date à laquelle elle a été ou sera effective, ainsi que, s'il y a lieu, les nom, prénoms, et adresse du cessionnaire.

Le délai de quarante-cinq jours commence à courir :

-lorsqu'il s'agit de la vente ou de la cession d'un fonds de commerce, du jour où la vente ou la cession a été publiée dans un journal d'annonces légales, conformément aux prescriptions de l'article L. 141-12 du code de commerce ;

-lorsqu'il s'agit de la vente ou de la cession d'autres entreprises, du jour où l'acquéreur ou le cessionnaire a pris effectivement la direction des exploitations ;

-lorsqu'il s'agit de la cessation d'entreprises, du jour de la fermeture définitive des établissements.

au 3 Les contribuables assujettis à un régime réel d'imposition sont tenus de faire parvenir à l'administration, dans un délai de soixante jours déterminé comme indiqué au 1, la déclaration de leur bénéfice réel accompagnée d'un résumé de leur compte de résultat.

Si les déclarations ne sont pas faites, ce qui est fréquent en liquidation judiciaire, le délai de solidarité est donc de 90 jours + 60 jours (contribuable au régime du réel) ou 90 jours + 45 jours (autres contribuables), mais ce délai court à compter de l'insertion prévue à l'article L141-12 du code de commerce, ce texte précisant qu'il n'y a pas lieu à insertion en cas de cession d'entreprise (mais il y a bien lieu en cas de cession des biens du débiteur). Le seul moyen de résoudre cette mauvaise coordination entre le droit fiscal et le droit des procédures collectives, en cas de cession d'entreprise, est manifestement de procéder à une insertion qui précisera que s'agissant d'une cession d'entreprise il n'y a pas lieu à opposition ni surenchère.

Le risque de solidarité peut, si les parties en conviennent, conduire à ne pas libérer le prix immédiatement entre les mains du vendeur, tant que les délais ne sont pas expirés, ce qui l'incitera d'ailleurs à établir au plus vite les déclarations nécessaires

Il semble possible et sous la responsabilité du rédacteur de l’acte, s'il souhaite éviter un séquestre, de remettre le prix de cession au liquidateur du vendeur, nonobstant toute opposition, y compris celle du Trésor ou toute voie d’exécution de quelque créancier  que ce soit. (l'article R662-14 du code de commerce permet, si le prix est consigné à la Caisse des Dépôts, qu'il soit transféré au liquidateur qui assume alors les mêmes obligations que l'éventuel séquestre puisque les droits sur le prix sont transférés avec celui-ci: bien souvent les liquidateurs préfèrent attendre que les délais soient écoulés).

Dans ce cas le liquidateur doit accepter expressément de conserver le prix durant le délai, à charge pour lui d'assumer les conséquences de la solidarité fiscale. A défaut l'acquéreur n'est pas déchargé de la solidarité et le liquidateur peut disposer des sommes.

En tout état ces clauses (séquestre ou conservation du prix) sont évidemment dans l'intérêt de l'acquéreur, lequel à défaut est débiteur sans délai du prix de cession, tout en étant exposé au risque de solidarité fiscale. 

En droit commun, s'il advient que la solidarité fiscale est actionnée, l'acquéreur sera fondé à invoquer la compensation avec sa dette au titre du prix de cession.

En procédure collective, il n'existe pas de dérogation et la solidarité fiscale s'applique, même si en réalité d'une part elle est peu cohérente car il est probable que le débiteur cédant puisse assumer l'impôt, et d'autre part elle n'est pas pratiquée par l'administration fiscale.

Pour autant le texte a vocation à s'appliquer  (JO Assemblée Nationale 30 Juillet 1990 n°28435 page 3628)

Dans les procédures collectives, certains considèrent que le séquestre est inefficace car en tout état l'acquéreur est débiteur du prix et ne pourra invoquer la compensation avec la créance qu'il tient sur le vendeur du chef de l'invocation de la solidarité fiscale, faute de connexité.

Ceci étant, conventionnellement le séquestre sécurise l'acquéreur, et on voit mal un liquidateur actionner en paiement du prix un acquéreur qui aura payé une somme équivalente au titre de la solidarité fiscale, en paiement d'une dette a priori postérieure. En tout état le liquidateur peut parfaitement accepter une désignation de séquestre, surtout si l'ordonnance du juge commissaire l'envisage.

En droit des procédures collectives

Il n'est pas dérogé au droit commun en matière de solidarité fiscale (voir ci dessus)

Deux aspects peuvent exister:

le traitement dans le passif des engagements des débiteurs solidaires avec le débiteur en procédure collective: il est identique à celui des cautions (voir ce mot)

Les clauses de solidarité cédant / cessionnaire

Deux types de clause : le cédant reste solidaire du cessionnaire / le cessionnaire est solidaire du cédant

le sort des clauses contractuelles ou obligations par lesquelles en cas de cession de contrat le cédant est solidaire du cessionnaire : fréquent dans le bail Clause inapplicable

Il est par exemple fréquent que dans un bail soit insérée une clause par laquelle en cas de cession du bail le cédant reste solidaire du cessionnaire dans le règlement de l'intégralité des sommes dues au bailleur. Le but est, en droit commun, que le bailleur soit sécurisé dans la fait que malgré la cession du bail ses loyers seront payés par l'un ou l'autre des preneurs (ancien ou nouveau), ce qui en outre impose peut-être au cédant de bien choisir son cessionnaire. 

Ces clauses présentent un inconvénient majeur dans le cas de cession d'un contrat dont le preneur est en procédure collective, puisque cela expose concrètement le cédant c'est à dire la procédure collective à payer au bailleur l'intégralité des loyers dus par son successeur s’il est défaillant: ainsi en liquidation judiciaire le liquidateur ne pourrait pas répartir les fonds dont il dispose, et devrait conserver les sommes nécessaires à assumer ses obligations.

Pour ces raisons les textes écartent, dans les baux, l 'application de ces clauses de solidarité par lesquelles le cédant est garant des obligations du cessionnaire (articles L622-15 pour la sauvegarde, L631-14 pour le redressement judiciaire et L641-12 pour la liquidation judiciaire). L'inapplicabilité de la clause bénéficie au cessionnaire retenu dans le cadre de la procédure collective, mais n'est pas reportée sur le "sous cessionnaire" si par la suite le bail est à nouveau cédé (Cass com 15 novembre 2017 n°16-19131)

le sort des clauses contractuelles par lesquelles le cessionnaire est solidaire du cédant (dite clause de solidarité inversée): clauses applicables en procédure collective dans tous les processus de cession mais évincées pour les cessions d'entreprises à compter du 23 mai 2019

Il s'agit ici très exactement de la clause inverse de la précédente, assez rare et la lettre des textes cités ci dessus ne l'écartait  pas jusqu'à l'entrée en vigueur de la loi du 22 mai 2019

Par le jeu de cette clause, le cessionnaire s'expose à assumer ses propres obligations, mais dès lors que le contrat lui est cédé à ses clauses et conditions, il est également tenu des obligations non exécutées par son cédant: ainsi par exemple le cessionnaire d'un fonds de commerce assume les loyers inhérents à sa période d'occupation, mais également les loyers antérieurs au jugement d'ouverture de la procédure collective du cédant, ou de la période d'observation, qui font pourtant l'objet d'un arrêt des poursuites du chef du cédant et qui sont dans le passif.

Cette obligation, en sus du prix "facial" permet au bailleur de bénéficier d'un paiement préférentiel, avec des fonds qui concrètement devraient être affectés à l'ensemble des créanciers - puisqu''en pratique le prix de cession "facial" est diminué d'autant dans l'offre de cession.

Ce type de clause est admis en liquidation en cas de cession d'actif du débiteur (Cass com 27 septembre 2011 n°10-23539) même si elle n'est pas reproduite dans l'ordonnance du juge commissaire autorisant la cession. Elle l'était semble-t-il également en cession d'entreprise (Versailles 12 mars 2015 n°14-02599 publiée au Dalloz 30.07.2015 n°1620).

Les candidats à la reprise d'un actif qui comprend un bail ont donc un intérêt tout particulier à être très vigilants sur le contenu du bail, car ils peuvent se trouver tenus d'obligations non prévues expressément dans leur offre.

La loi du 22 mai 2019 est venue modifier l'article L642-7 du code de commerce applicable aux cessions d'entreprise (et pour les procédures ouvertes postérieurement à l'entrée en vigueur de la loi, soit le 23 mai 2019) et pour l'avenir dans ce type de cession ces clauses sont écartées

La solidarité fiscale.

Il n'est pas dérogé au droit commun et la solidarité fiscale relève du juge compétent au regard du dirigeant Cass com 13 janvier 2021 n°19-14749

La solidarité fiscale n'est pas un obstacle à ce que le dirigeant soit également poursuivi en comblement de passif pour un montant qui inclue la créance fiscale (et d'ailleurs le produit de l'action en comblement est réparti au marc le franc) Cass com 5 septembre 2018 n°17-13626 Cass com 13 juin 2018 n°17-13165 cass com 9 décembre 1997 n°96-12292

Il en découle que le dirigeant peut à la fois être condamné au titre de l'insuffisance d'actif pour un montant qui comprend le passif fiscal (mais la somme étant répartie au marc le franc ne sera pas intégralement affectée aux créances fiscales) et au titre de la solidarité fiscale pour le même montant. Il y a donc un intérêt pour le dirigeant à entrer en négociation avec l'administration fiscale si les deux actions sont engagées, pour transiger sur le paiement d'une somme avant que l'action en responsabilité aboutisse, et obtenir une renonciation partielle à la créance déclarée. 

On peut d'ailleurs relever que la condamnation du dirigeant par la juridiction pénale n'est pas dépendant de la déclaration de créance du Trésor Cass crim 6 novembre 1997 n°96-85304