Ouverture de la procédure

Quelques points de la définition

Généralités

Circonstances d'ouverture

Comment le tribunal est-il saisi ?

Le passage d'une procédure à l'autre au stade de la demande d'ouverture de la procédure

Demande d'un créancier: évolution en cours d'audience sur la procédure demandée

Demande du Paquet: évolution en cours d'audience

Le contenu du jugement d'ouverture

La publicité du jugement d'ouverture

Généralités

C'est le fait pour un tribunal de prononcer le jugement dit d'ouverture de la procédure collective (voir le mot "jugement d'ouverture"), c'est à dire la procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire. C'est ce jugement qui marque le début de la procédure.

Circonstances d'ouverture de la procédure

Le tribunal doit vérifier que ces circonstances sont réunies, et débouter le demandeur si elles ne le sont pas.

En sauvegarde : article L620-1 du code de commerce

Entreprise qui sans être en état de cessation des paiements justifie de difficultés qu’elle n’est pas en mesure de rencontrer

En redressement judiciaire : article  L631-1 du code de commerce

Entreprise qui est en état de cessation des paiements, et est en mesure de poursuivre son activité

En liquidation judiciaire : article L640-1 du code de commerce

Entreprise en état de cessation des paiements et dont le redressement est manifestement impossible.

Ainsi l’état de cessation des paiements est un critère commun au redressement et à la liquidation judiciaire.

Comment le Tribunal est-il saisi ?

L'origine de l'ouverture de la procédure peut être une demande de l'entreprise (on dit parfois improprement un dépôt de bilan - voir ce mot-), que ce soit en sauvegarde, en redressement ou en liquidation judiciaire.

En redressement judiciaire ou en liquidation judiciaire, la procédure peut également être ouverte sur assignation d'un créancier ou sur saisine du Procureur de la République qui peut avoir reçu des informations justifiant que la procédure soit ouverte (par exemple le dirigeant a disparu). La loi prévoit également ce qu'on appelle la saisine d'office (voir ce mot), c'est à dire la possibilité pour le Tribunal de se saisir lui même en fonction d'informations par exemples collectées par la surveillance du registre du commerce. Cependant le Conseil Constitutionnel a sanctionné le texte, et cette voie d'ouverture n'est donc plus possible.

En sauvegarde : article L620-1 du code de commerce

Seul le débiteur peut saisir le tribunal

En redressement judiciaire :

·  Par le débiteur qui dépose une déclaration de cessation des paiements : article L631-4 du code de commerce

·  Le Tribunal se saisit d’office article L631-5 du code de commerce mais cet article a été inconstitutionnel par une décision du conseil Constitutionnel du 7 décembre 2012 N° 2012-286 et est donc abrogé bien qu’encore présent dans les codes

·   Le Ministère Public (article L631-5 du code de commerce) peut saisir le Tribunal par voie de requête (la requête ne peut pas être orale, ni présentée sur l’audience car le greffe doit convoquer en annexant la requête, voir article R631-4 du code de commerce).

·   Un créancier peut saisir le tribunal par assignation (article L631-5 alinéa 2).

En liquidation judiciaire : même chose qu’en redressement judiciaire.

· Par le débiteur qui dépose une déclaration de cessation des paiements : article L640-4 du code de commerce

· Le Tribunal se saisit d’office article L640-5 du code de commerce (mais un texte similaire du redressement judiciaire a été déclaré inconstitutionnel par une décision du conseil Constitutionnel du 7 décembre 2012 N° 2012-286 et les plaideurs attendent l’occasion pour saisir le Conseil Constitutionnel à propos de la liquidation judiciaire. Une première décision du Conseil Constitutionnel du 15 Novembre 2013 - 2013-352 est venue invalider la saisine d'office en liquidation judiciaire, dans les dispositions applicables en Polynésie Française)

·   Le Ministère Public (article L640-5 du code de commerce) peut saisir le Tribunal par voie de requête (la requête ne peut pas être orale, ni présentée sur l’audience car le greffe doit convoquer en annexant la requête, voir article R631-4 du code de commerce du redressement judiciaire auquel renvoie l’article R640-1 de la liquidation).

· Un créancier peut saisir le tribunal par assignation (article L640-5 alinéa 2).

Le passage d’une procédure à l’autre au moment de l’audience d’ouverture de la procédure:

Des passerelles sont possibles en cours de procédure, de la sauvegarde au redressement ou à la liquidation judiciaire, du redressement à la liquidation.

L’exercice de voies de recours permet éventuellement des « marche arrière » : rétractation de la liquidation pour un redressement si l’activité est poursuivie, rétractation du redressement vers une sauvegarde s’il n’y a pas état de cessation des paiements, mais c’est assez illusoire compte tenu du caractère exécutoire par provision des décisions, c'est-à-dire du fait qu’elles sont exécutées dès leur prononcé.

Une autre question est de savoir si, à l’audience d’ouverture, le tribunal peut prononcer une autre procédure que celle pour laquelle il est saisi ou saisi à titre principal.

Un des principes de procédure civile est que sauf s’il peut de saisir d’office, un tribunal ne peut statuer que sur ce qui lui est demandé par les parties.

 Ainsi :

Sur l’assignation d’un créancier

 ·  Le créancier peut dans son assignation en redressement judiciaire demander subsidiairement la liquidation (article R631-2 du code de commerce), et dans ce cas le Tribunal apprécie l’état de cessation des paiements (critère commun aux deux procédures) et le fait que l’entreprise peut (redressement judiciaire) ou pas (liquidation judiciaire) se redresser.

·  A l’inverse le créancier qui assigne en liquidation peut subsidiairement demander le redressement judiciaire (article R640-1 du code de commerce.)

·    Si le créancier ne forme pas de demande subsidiaire dans son assignation, ou éventuellement sur l’audience en présence du débiteur, l’article R631-11 prévoit que si les conditions ne sont pas réunies, le tribunal rejette la demande.

Le même texte permet au Tribunal de se saisir d’office pour prononcer celle des procédures qui serait opportune et n’a pas été demandée, mais ce texte procède par renvoi à l’article R631-3, c'est-à-dire :

o   Qu’il faut une nouvelle convocation du débiteur, et cela ne peut se faire sur l’audience

o   Qu’en tout état il s’agit d’une saisine d’office maintenant déclarée inconstitutionnelle et qui n’est donc plus utilisable.

Ainsi si le créancier assigne en redressement et subsidiairement en liquidation, ou l’inverse, le Tribunal peut trancher entre les deux procédures.

Si le créancier demande une des deux procédures uniquement, il ne semble pas possible que le Tribunal prononce l’autre (et de toute façon il ne peut le faire sans nouvelle audience)

 Ainsi si le redressement est demandé et que le redressement est manifestement impossible (critère de la liquidation) les possibilités sont les suivantes :

·  Rejeter la demande, même s’il y a état de cessation des paiements, et éventuellement suggérer au Parquet de présenter une requête à la prochaine audience utile

·  Ouvrir le redressement judiciaire, qui sera converti à la première audience sur rapport du mandataire judiciaire

·   Que sur l’audience, et si le débiteur est présent, le créancier modifie sa demande principale de redressement judiciaire et y ajoute une demande subsidiaire de liquidation.

Si c’est la liquidation judiciaire qui est demandée, alors que les conditions du redressement sont réunies (poursuite d’activité possible, ou en tout cas pas d’éléments pour être certain que cela ne l’est pas), les solutions sont pratiquement les mêmes, sauf évidemment qu’il ne faut pas ouvrir la procédure car les conséquences sont irréversibles compte tenu du caractère exécutoire de la décision (délai de 15 jours pour licencier ….).

Sur la requête du Parquet :

A priori on ne voit pas pourquoi le Parquet ne pourrait pas dans sa requête demander le redressement et subsidiairement la liquidation (ou l’inverse). Dans ce cas le tribunal prend sa décision entre les deux procédures.

Sur la déclaration de cessation des paiements

Le raisonnement tenu pour l’assignation d’un créancier est manifestement transposable : si le débiteur demande le redressement le tribunal ne pourra pas prononcer la liquidation faute de pouvoir (maintenant que le Conseil Constitutionnel a statué) se saisir d’office.

Si c’est la liquidation judiciaire qui est demandée, la demande en elle-même marque le fait que le redressement est impossible parce que le débiteur ne veut pas redresser l’entreprise et il n’est pas question de forcer la main au débiteur pour un redressement judiciaire non demandé.

(Dans tous les cas, et même à l’époque où la saisine d’office était possible, le débiteur devait être convoqué à une nouvelle audience, et le Tribunal ne pouvait se saisir sur l’audience.)

 Les seules possibilités sont donc :

· soit de débouter le demandeur de sa demande s’il ne rempli pas les critères :

o   pas d’état de cessation des paiements : redressement ou liquidation impossibles,

o   état de cessation des paiements + redressement impossible alors que c’est un redressement judiciaire qui est demandé

 ·  soit pour le débiteur de faire « évoluer » sa demande sur l’audience en demandant celle des procédures qui est finalement adaptée à son cas.

Le contenu du jugement d'ouverture

C'est également dans ce jugement que le Tribunal fait le choix entre les procédures possibles (notamment redressement ou liquidation judiciaire) en fonction de ce qui lui est demandé (il ne peut s'écarter de la demande, mais il est fréquent que les assignations des créanciers demandent l'ouverture d'un redressement ou d'une liquidation judiciaire, et dans ce cas le tribunal décide) et des circonstances (s'il n'y a aucune activité ni aucune chance de redressement le Tribunal peut prononcer une liquidation judiciairre.

Enfin c'est ce jugement qui désigne le juge commissaire et les mandataires de justice (suivant la procédure ouverte, administrateur judiciaire et mandataire judiciaire en sauvegarde ou en redressement judiciaire, liquidateur en liquidation).

Le jugement d'ouverture fixe également la date de cessation des paiements (voir ce mot) qui marque de début de la "période suspecte" (voir ce mot). Cette date pourra ensuite être modifiée dans la limite de 18 mois avant le jugement d'ouverture.

En conséquence de l'ordonnance du 12 mars 2014 les textes ont été modifiés: lors du jugement d’ouverture du redressement ou de la liquidation judiciaire, le tribunal fixe la date de cessation des paiements. Le texte de l’article L631-8 alinéa 1 est modifié pour préciser que cette fixation a lieu «après avoir recueilli les observations du débiteur»: il y a donc débat sur cette date.

La publicité du jugement d'ouverture et son effet immédiat

Il est fondamental que tous les interlocuteurs de l'entreprise puissent savoir immédiatement que le jugement a été prononcé, car cela peut les déterminer à prendre des mesures pour préserver leurs droits.

Le jugement d'ouverture est donc publié, au BODACC (voir ce mot) et dans un journal d'annonces légales (voir ce mot), peut faire l'objet de recours (voir le mot "voies de recours").

Il est immédiatement "exécutoire" à compter de sa date: il doit donc être mis en application sans délai (voir le mot "exécution provisoire").