Délais de procédure (computation)

Quelques points de la définition

Point de départ du délai

Expiration du délai

Décalage de l'expiration

Délais de distance

Saisine du juge dans le délai

Délais en procédure collective

Envoi ou réception du courrier, assignation ou enrôlement

Délais de distance en procédure collective

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C’est le code de procédure civile qui pose les grands principes de computation des délais de procédure, qui s’appliquent sauf exception prévue dans des textes spéciaux :

Point de départ du délai

Article 640 du CPC Lorsqu'un acte ou une formalité doit être accompli avant l'expiration d'un délai, celui-ci a pour origine la date de l'acte, de l'événement, de la décision ou de la notification qui le fait courir.

Autrement dit la date de l'acte est aussi le premier jour du délai.

Cependant l'article 641 précise : Lorsqu'un délai est exprimé en jours, celui de l'acte, de l'événement, de la décision ou de la notification qui le fait courir ne compte pas. Par exemple si une assignation fait courir un délai de X jours, ce délai commence à courir le lendemain, et expirera le dernier jour à 24 Heures

En cas de pluralité de notification, c'est la première qui fait courir le délai Cass com 29 avril 2014 n°12-29364

Expiration du délai

Article 641 du CPC  Lorsqu'un délai est exprimé en mois ou en années, ce délai expire le jour du dernier mois ou de la dernière année qui porte le même quantième que le jour de l'acte, de l'événement, de la décision ou de la notification qui fait courir le délai. A défaut d'un quantième identique, le délai expire le dernier jour du mois.

Lorsqu'un délai est exprimé en mois et en jours, les mois sont d'abord décomptés, puis les jours.

Autrement dit, le délai en mois ou en année se compte en principe de date à date, c'est à dire expire le même jour du mois concerné : 30 juin au 30 juillet par exemple. Si le 30 juillet est un samedi, un dimanche ou un jour férié, le délai est reporté jusqu'au premier jour utile. 

L'expression "à défaut de quantième identique" signifie que si le dernier jour n'existe pas, c'est le dernier jour du mois d'expiration du délai qui sera considéré : si le dernier jour est le 29 février, et que l'année suivante n'est pas bissextile le délai expire le 28 février, si le dernier jour est en théorie le 31 d'un mois qui n'a que 30 jours, ce sera le 30 le dernier jour du délai.

Article 642 Tout délai expire le dernier jour à vingt-quatre heures.

Décalage de l’expiration du délai

Article 642 Le délai qui expirerait normalement un samedi, un dimanche ou un jour férié ou chômé est prorogé jusqu'au premier jour ouvrable suivant.

Ainsi un délai qui expire un samedi est prolongé jusqu'au lundi, sauf si le lundi est férié, auquel cas il est prolongé jusqu'au mardi.

Attention cependant dans le cas où le texte précise que la formalité doit être effectuée avant l'expiration du délai,

Délais dits de distance

Article 643

Lorsque la demande est portée devant une juridiction qui a son siège en France métropolitaine, les délais de comparution, d'appel, d'opposition, de recours en révision et de pourvoi en cassation sont augmentés de :

1. Un mois pour les personnes qui demeurent en Guadeloupe, en Guyane, à la Martinique, à La Réunion, à Mayotte, à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin, à Saint-Pierre-et-Miquelon, en Polynésie française, dans les îles Wallis et Futuna, en Nouvelle-Calédonie et dans les Terres australes et antarctiques françaises ;

2. Deux mois pour celles qui demeurent à l'étranger.

Article 644

Lorsque la demande est portée devant une juridiction qui a son siège en Guadeloupe, en Guyane, à la Martinique, à La Réunion, à Mayotte, à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin, à Saint-Pierre-et-Miquelon et dans les îles Wallis et Futuna, les délais de comparution, d'appel, d'opposition et de recours en révision sont augmentés d'un mois pour les personnes qui ne demeurent pas dans la collectivité territoriale dans le ressort de laquelle la juridiction a son siège et de deux mois pour les personnes qui demeurent à l'étranger

Article 645

Les augmentations de délais prévues aux articles 643 et 644 s'appliquent dans tous les cas où il n'y est pas expressément dérogé.

Les délais de recours judiciaires en matière d'élections ne font l'objet de prorogation que dans les cas spécifiés par la loi.

La saisine du juge à l’intérieur du délai

Les solutions sont contradictoires : concernant l'assignation cela devrait être sa remise au greffe pour enrôlement qui interrompt la prescription. Cependant au visa de l'article 2241 du code civil,  "La demande en justice, même en référé, interrompt le délai de prescription ainsi que le délai de forclusion"  et la Cour de Cassation en tire que la délivrance de l'assignation est interruptive Cass civ 3ème 27 novembre 2002 n°01-10058

Dans certains cas on admet que c’est l’envoi et pas la réception du courrier recommandé adressé au juge qui interrompt le délai de saisine ou qui engage valablement l’action.

C’est souvent l’article 668 du CPC qui dispose « Sous réserve de l'article 647-1, la date de la notification par voie postale est, à l'égard de celui qui y procède, celle de l'expédition et, à l'égard de celui à qui elle est faite, la date de la réception de la lettre. » qui est invoqué

Quelques applications en procédure collective :

Prise en compte de la date d'envoi ou de la date de réception d'un courrier recommandé, enrôlement ou assignation

Le texte de principe est l’article R662-1 qui dispose : « A moins qu'il n'en soit disposé autrement par le présent livre :

1° Les règles du code de procédure civile sont applicables dans les matières régies par le livre VI de la partie législative du présent code ;

2° Les notifications des décisions auxquelles procède le greffier sont faites par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, conformément aux dispositions de la section IV du chapitre III du titre XVII du livre Ier du code de procédure civile ;

3° Les notifications et communications adressées au débiteur personne physique par lettre recommandée avec demande d'avis de réception sont régulièrement faites à l'adresse préalablement indiquée au greffe du tribunal à l'ouverture de la procédure ou en cours de procédure. La date de la notification est celle de la signature de l'avis de réception. Toutefois, lorsque l'avis de réception n'a pas été signé par son destinataire ou une personne munie d'un pouvoir à cet effet, la date de la notification est celle de la présentation de la lettre recommandée. Les lettres de l'administrateur, du mandataire judiciaire ou du liquidateur sont transmises à cette même adresse ;

4° Les notifications et lettres adressées au débiteur, personne morale de droit privé, peuvent l'être au domicile de son représentant légal ou du mandataire ad hoc désigné conformément au II de l'article L. 641-9. »

Ainsi pour tous les courriers adressés au dirigeant pour lui notifier des décisions, c’est la première présentation du courrier recommandé qui sera prise en considération si le courrier n'est pas retiré par le destinataire (et que l'adresse est exacte).

Dans les autres cas, et dès lors que ce sont les règles de la procédure civile qui s’appliquent par principe pour interrompre le délai imparti à l'envoyeur du courrier, c’est la date d’envoi d’un courrier recommandé qui sera pris en considération : par exemple pour la déclaration de créance.

D’autres cas sont plus controversés : par exemple certaines décisions (anciennes, par exemple Cass com 1er Octobre 1991 n°90-13482) ont admis qu’il suffit que la requête en revendication soit envoyée au juge dans le délai légal, peu important qu’il la reçoive postérieurement à l’expiration du délai. Une telle solution parait fortement contestable, dès lors que le texte indique que le juge doit être saisi dans le délai, et qu’il n’est pas stricto sensu saisi par un courrier qu’il n’a pas encore reçu !!

Le parallèle avec l’enrôlement de l’assignation incite à penser que le juge doit avoir reçu le courrier pour être saisi, mais cela ne semble pas être le sens de certaines décisions.

Dans certaines cas le texte précise expressément que la juridiction doit être saisie dans le délai, et ce n'est alors pas la délivrance de l'assignation qui interrompt le délai mais l'enrôlement (par exemple report de date de cessation des paiements, ou saisine de la juridiction compétente dans le cadre de la vérification des créances en cas d'incompétence du juge commissaire), encore que l'article 2241 du code civil dispose que la demande en justice interrompt la prescription, ce qui peut donner lieu à une évolution de la jurisprudence sur cette question.

Les délais de distance

A priori le code de commerce ne déroge pas aux règles posées par les articles 643 et 644 du CPC.

Mais la jurisprudence refuse le bénéfice du délai de distance pour l'action en revendication (Cass Com 28 septembre 2004 n°03-11876).

L'argumentation donnée permet d'appréhender la distinction: les délais de distances ne s'appliquent qu'aux délais de procédure (délais de comparution, délais de recours) 

Le délai de distance a d'ailleurs été reconnu applicable par principe aux voies de recours exercées en matière de procédure collective (par exemple Cass civ 2ème 26 février 1997 n°94-19233 pour le recours contre une ordonnance du juge commissaire, Cass civ 2ème 5 octobre 1983 n°82-10350 pour le recours contre un report de date de cessation des paiements).

Mais ce n'est que parceque le texte le précise que le délai de déclaration de créance est expressément augmenté pour les créanciers hors de France métropolitaine (article R622-24 du code de commerce).

Le délai de distance n'a par contre aucune raison de s'appliquer par principe aux délais pour engager l'action, dits délais d'action.