Résolution
Quelques points de la définition
Généralités et différences résolution / résiliation
Circonstances de la résolution en droit commun
Résolution et procédures collectives
Distinction résolution pour défaut de paiement et pour autres causes
Action en résolution au jour du jugement d'ouverture de la procédure collective
Action en résolution engagée après le jugement d'ouverture de la procédure collective
Résolution et contrats dits interdépendants
Généralités et différence résolution / résiliation
La résolution est un mode de rupture d'une situation juridique ou d'un contrat, par décision amiable ou judiciaire.
Antérieurement à la réforme du droit des obligations, on distinguait la résolution, qui avait un effet rétroactif et remettait les parties en l'état où elles se trouvaient avant le contrat, de la résiliation qui n'avait d'effet que pour l'avenir et ne remettait pas en cause l'exécution antérieure du contrat.
La réforme des obligations telle qu'elle découle de l'ordonnance 2016-131 du 10 février 2016 est venu modifier cette distinction, et la résiliation devient une variété de résolution avec des effets différents (article 1229 du code civil), encore qu'il ne fait pas oublier que dans le cadre des contrats en cours en procédure collective c'est la résiliation que le juge peut prononcer.
(le droit des obligations tel qu'il découle de l'ordonnance du 10 février 2016 qui a modifié le code civil n'est pas applicable aux contrats conclus avant le 1er octobre 2016 (article 9 de l'ordonnance)
La résolution est régie par les articles 1224 à 1230 du code civil
L'article 1229 du code civil dispose:
"La résolution met fin au contrat.
La résolution prend effet, selon les cas, soit dans les conditions prévues par la clause résolutoire, soit à la date de la réception par le débiteur de la notification faite par le créancier, soit à la date fixée par le juge ou, à défaut, au jour de l'assignation en justice.
Lorsque les prestations échangées ne pouvaient trouver leur utilité que par l'exécution complète du contrat résolu, les parties doivent restituer l'intégralité de ce qu'elles se sont procuré l'une à l'autre. Lorsque les prestations échangées ont trouvé leur utilité au fur et à mesure de l'exécution réciproque du contrat, il n'y a pas lieu à restitution pour la période antérieure à la dernière prestation n'ayant pas reçu sa contrepartie ; dans ce cas, la résolution est qualifiée de résiliation.
Les restitutions ont lieu dans les conditions prévues aux articles 1352 à 1352-9."
Le texte distingue donc la date à laquelle la résolution prend effet, (clause résolutoire, notification, date fixée par le juge ou assignation) et organise les restitutions qui peuvent découler de la remise en cause du contrat, qui vont dépendre de la nature des prestations échangées.
Ainsi pour des prestations à exécution instantanées, la résolution oblige les parties à restituer "ce qu'elles se sont procuré l'une à l'autre" : par exemple la résolution d'un contrat de vente entraine restitution de la chose reçue par l'acheteur, et du prix perçue par le vendeur (sauf indemnité dans le cas où le bien vendu se révèle usé ou dégradé ou encore dégradé du fait de l'acheteur (Cass civ 1ère 21 mars 2006 n°03-16307 ) mais pas de la simple utilisation Cass civ 3ème 13 juillet 2016 n°14-26958 Cass civ 1ère 15 mai 2007 n°05-16926, Cass com 30 octobre 2007 n°05-17882)
Pour les prestations à exécution successive, il y a lieu à restitution à compter de la premier fourniture sans contrepartie et c'est dans ce seul cas que la résiliation est qualifiée de résiliation. Par exemple la résolution / résiliation d'un contrat de location ne remet pas en cause les loyers payés et la mise en disposition de la chose louée ... car c'est impossible.
Cela ne prive évidemment pas les parties de solliciter des dommages intérêts qui viendraient se compenser avec leurs obligations de restitution.
Les circonstances de la résolution
Le contractant peut ne pas se trouver dans les cas prévus par le droit des procédures collectives pour obtenir la résiliation du contrat, mais être en mesure d'invoquer le droit commun des contrats.
Les textes sont les suivants, étant précisé que depuis la loi du 20 avril 2018 et l'ordonnance du 10 février 2016 ils sont communs à la résolution et à la résiliation, qui n'est qu'une variété de résolution (la différence étant posée à l'article 1229 du code civil)
- les causes de résiliation / résolution article 1217 du code civil
La partie envers laquelle l'engagement n'a pas été exécuté, ou l'a été imparfaitement, peut :
- refuser d'exécuter ou suspendre l'exécution de sa propre obligation ;
- poursuivre l'exécution forcée en nature de l'obligation ;
- obtenir une réduction du prix ;
- provoquer la résolution du contrat ;
- demander réparation des conséquences de l'inexécution.
Les sanctions qui ne sont pas incompatibles peuvent être cumulées ; des dommages et intérêts peuvent toujours s'y ajouter.
- les circonstances de la résiliation / résolution article 1224 du code civil "La résolution résulte soit de l'application d'une clause résolutoire soit, en cas d'inexécution suffisamment grave, d'une notification du créancier au débiteur ou d'une décision de justice."
- clause résolutoire article 1225 du code civil " La clause résolutoire précise les engagements dont l'inexécution entraînera la résolution du contrat. La résolution est subordonnée à une mise en demeure infructueuse, s'il n'a pas été convenu que celle-ci résulterait du seul fait de l'inexécution. La mise en demeure ne produit effet que si elle mentionne expressément la clause résolutoire"
- notification de la résiliation article 1226 du code civil "Le créancier peut, à ses risques et périls, résoudre le contrat par voie de notification. Sauf urgence, il doit préalablement mettre en demeure le débiteur défaillant de satisfaire à son engagement dans un délai raisonnable. La mise en demeure mentionne expressément qu'à défaut pour le débiteur de satisfaire à son obligation, le créancier sera en droit de résoudre le contrat. Lorsque l'inexécution persiste, le créancier notifie au débiteur la résolution du contrat et les raisons qui la motivent. Le débiteur peut à tout moment saisir le juge pour contester la résolution. Le créancier doit alors prouver la gravité de l'inexécution.
- résolution / résiliation judiciaire article 1227 du code civil La résolution peut, en toute hypothèse, être demandée en justice" et article 1228 "Le juge peut, selon les circonstances, constater ou prononcer la résolution ou ordonner l'exécution du contrat, en accordant éventuellement un délai au débiteur, ou allouer seulement des dommages et intérêts. "
- effet de la résolution et différence résolution / résiliation : la résiliation est une variété de résolution article 1229 du code civil "
La résolution met fin au contrat.
La résolution prend effet, selon les cas, soit dans les conditions prévues par la clause résolutoire, soit à la date de la réception par le débiteur de la notification faite par le créancier, soit à la date fixée par le juge ou, à défaut, au jour de l'assignation en justice.
Lorsque les prestations échangées ne pouvaient trouver leur utilité que par l'exécution complète du contrat résolu, les parties doivent restituer l'intégralité de ce qu'elles se sont procuré l'une à l'autre. Lorsque les prestations échangées ont trouvé leur utilité au fur et à mesure de l'exécution réciproque du contrat, il n'y a pas lieu à restitution pour la période antérieure à la dernière prestation n'ayant pas reçu sa contrepartie ; dans ce cas, la résolution est qualifiée de résiliation.
Les restitutions ont lieu dans les conditions prévues aux articles 1352 à 1352-9."
Résolution et procédures collectives
La nécessaire distinction entre la résolution pour défaut de paiement et la résolution pour d'autres causes
Par principe l'action en résolution d'une convention pour défaut de paiement est interrompue si elle était en cours au jour du jugement d'ouverture de la procédure, et ne peut plus être engagée si elle ne l'était pas encore (article L622-21-1 du code de commerce). Voir en ce sens l'arrêt des poursuites
Il en est de même contre un tiers in bonis qui a lui aussi contracté, de manière indivisible avec le débiteur : en raison de l'indivisibilité, le contractant ne pourra solliciter la résolution pour défaut de paiement contre aucun des deux Cass com 20 mars 2019 n°17-20629.
Pour autant les autres causes de résolution n'ont pas les memes conséquences, et l'action en résolution pour défaut d'exécution des obligations du partenaire n'est pas atteinte par le texte.
Action en résolution en cours au jour du jugement
En premier lieu une action en constatation du jeu d'une clause résolutoire déjà acquise avant l'ouverture de la procédure collective est normalement poursuivie (Cass com 3 mai 2016 n°14-23727)
Par ailleurs, par principe les actions en résolution pour inexécution d'une convention, qui sont en cours au jour du jugement d'ouverture de la procédure, ne sont pas interrompues.
A priori une telle situation est singulière, dès lors que l'action en résolution d'une convention, initiée par le contractant de l'entreprise en procédure collective, tend nécessairement également à la fixation de la créance consécutive à la résolution: par exemple le client de l'entreprise en liquidation dont l'installation de chauffage bien que payée en tout ou partie n'a pas été complètement installée, va demander la résolution du contrat, mais également qu'il soit statué sur sa créance de remboursement de la partie du prix qu'il avait payée: la résolution lui permet d'échapper à son obligation de paiement du solde. S'il n'y avait pas liquidation il pourrait demander restitution des acomptes payés, et en raison de la liquidation il ne peut prétendre qu'à une créance de remboursement.
A première analyse on aurait pu penser que dès lors quelle tend normalement au paiement, et en l'espèce notamment à la fixation de la créance de remboursement, l'action était interrompue jusqu'à déclaration de créance comme toutes les actions en paiement
Cette position aurait été logique si la Cour de Cassation avait considéré que le fait générateur de la créance était la conclusion du contrat, par hypothèse antérieure au jugement d'ouverture.
Mais, sous l'empire des textes antérieurs à la loi dite de sauvegarde de 2005, la Cour de Cassation, de manière peut-être singulière, et après revirement de jurisprudence (antérieurement Cass com 23 janvier n° 05-13995 et 13 mars 2007 n° 05-21610), considére que dans le cas où un contrat est annulé postérieurement à l'ouverture de la procédure collective, le contractant de l'entreprise en procédure collective dispose d'une créance de restitution du prix bénéficiant du statut de créance postérieure, au motif - peut-être discutable - que c'est la décision prononçant la résolution ou la nullité qui constitue le fait générateur de cette créance (Cass. com., 28 avr. 2009, n° 08-14.777, Cass. com., 20 janv. 2009, n° 08-11.098). De telles décisions ont été reproduites par la suite, mais toujours sous l'empire du texte antérieur à 2005, la Cour de Cassation allant jusqu'à exiger que la restitution d'un immeuble au liquidateur, en conséquence de la nullité d'une vente, soit subordonnée par le contractant au remboursement du prix par le liquidateur, au motif que la créance était postérieure (cass com 11 mars 2014 n°13-11129).
Mais il faut rappeler que le texte de l'époque déterminait le caractère privilégié des créances postérieures qu'en raison de leur seule chronologie par rapport au jugement d'ouverture.
Mais sous l'empire des textes actuels, le régime des créances postérieures a été modifié et le critère chronologique ne suffit pas: la créance postérieure doit remplir un critère supplémentaire d'utilité ou de prestation fournie au débiteur pour bénéficier du statut privilégié correspondant: même chronologiquement postérieure si on s'en tient aux décisions de la Cour de Cassation, la créance de restitution est donc traitée (rétrogradée) en rang de créance antérieure, mais bénéficie de délais spécifiques de déclaration de créance (2 mois de son exigibilité) : c'est ce qui explique que l'action en résolution en cours au jour du jugement puisse être poursuivie sans être interrompue le temps d'une déclaration de créance. Mais rien n'interdit de déclarer crance pour éviter qu'il soit rétorqué que c'est une "véritable" créance antérieure soumise aux délais de droit commun (car à notre avis ça se discute) !!
Action en résolution engagée postérieurement au jugement d'ouverture de la procédure
Le fait que le droit des procédures collectives aménage des cas de résiliation, et une procédure spécifique devant le juge commissaire ne prive pas le contractant de la possibilité de demander la résolution suivant les règles de droit commun des contrats, et notamment sur le fondement des vices du consentement.
Sur ces fondements, si l'action n'est pas engagée au jour du jugement, elle peut l'être postérieurement.
La créance qui en découlera aura un statut de créance antérieure, ou plus précisément selon le texte actuel et la position qui semble se dégager des arrêts de la Cour de Cassation de créance postérieure "rétrogradée" en créance antérieure puisqu'elle n'est pas utile ... et soit elle aura été déclarée, par précaution, au même titre par exemple qu'une créance de garantie, dans les délais de droit commun, soit elle le sera dans les deux mois de leur exigibilité (L622-24 du code de commerce) si on s'en tient à la position de la Cour de Cassation.
Ce casse tête est assez piègeux pour le contractant:
- il risque d'obtenir la résolution du contrat, telle que demandée
- mais d'être tenu de restituer à la procédure collective le bien qu'il avait reçu (cuisine, panneaux photovoltaïques ...). C'est assez théorique, ne serait-ce que parceque le démontage coute souvent plus que le bien, et que ce bien est parfois devenu immeuble par destination, et en principe le liquidateur est condamné à enlever les biens et remettre les choses en l'état: toiture les panneaux photovoltaïques par exemple, ce qu'il ne peut faire faute de fonds pour payer un intervenant (les salariés de l'entreprises sont licenciés dans les 15 jours de la liquidation).
- de disposer en "contrepartie" d'une créance de remboursement du prix qu'il a payé, antérieure et chirographaire, c'est à dire en un rang peu favorable et parfois très hypothétique.
Résolution (ou annulation) et contrat interdépendants et notamment contrat de prêt.
voir le mot contrats interdépendants