Warrant et warrant agricole

Généralités

Le warrant est une garantie. Il repose sur un titre transmis par le débiteur, déposant de marchandises (dans ce qu'on appelle un « magasin général » ou plus exactement entre les mains d'un tiers convenu) à un créancier, afin de garantir le paiement de sa créance.

Il existe notamment des warrants hôteliers, pétroliers et industriels, régis par des réglementations particulières et qui s'analysent comme des gages sans dépossession publiés au greffe du tribunal de commerce).Il existe également des warrants agricoles (par exemple portant sur des récoltes, du vin ...) inscrits au tribunal d'instance qui peuvent porter sur les récoltes en cours ou futures (régis par les articles L342-1 et suivants du code rural et de la pêche et auxquels a priori la règlementation du gage mobilier est applicable cf 2333 du code civil )

Après qu'il ait été reconnu au porteur du warrant agricole un droit de rétention (Cass com 26 janvier 2010 n°08-21340) lui donnant un droit sur le prix, l'évolution de la législation a conduit à écarter cette prérogative : faute de texte spécial, depuis l'ordonnance du 23 mars 2006 la gage supposant une dépossession, ce n'est plus que de l'article 2286 du code civil que le droit de rétention "fictif" est attribué au porteur, lequel par voie de conséquence est inopposable à la procédure pendant la période d'observation et ne peut donner lieu à retrait contre paiement.

Le warrant agricole est par principe un gage sans dépossession (mais le porteur bénéficie alors d'un droit de rétention fictif au sens de  l'article 2286 du code civil)

Warrant et procédure collective

S'agissant d'un droit de rétention fictif qui ne découle pas d'un texte spécial mais uniquement de l'article 2286 du code civil, le warrant ne permet pas à notre avis le retrait contre paiement . Il relève donc de la vente des biens grevés en période d'observation et le cas échéant de la substitution de garantie, puisque le clivage entre ces notions et le retrait contre paiement (beaucoup plus efficace, mais qui nécessite un droit de rétention qui découle d'un texte spécifique) dépend de la nature du droit de rétention.

D'ailleurs la Cour de cassation considère que les dispositions du code de commerce régissant les procédures collectives priment: ainsi le sort du porteur d'un warrant est régi par les dispositions sur la vente d'un bien grevé de garantie en période d'observation (avec consignation du prix) et pas par celles du retrait contre paiement. : Cass com 9 avril 1991 n°89-14942 " la quote-part du prix de vente correspondant à la créance garantie par le warrant devait être versée en compte de dépôt à la Caisse des dépôts et consignations jusqu'à l'adoption du plan de redressement ou à la liquidation"

La Cour de Cassation a d'ailleurs considéré que l'acquéreur de bonne foi ne peut se voir opposer les droits du porteur du warrant , qui ne se reporte pas sur le prix Cass civ 1ère 18 décembre 2001 n°99-18422

Pour autant les droits du porteur sont reportés sur le prix si le liquidateur vend le stock et la Cour de Cassation précise ces modalités de paiement : "Attendu que pour condamner M. X..., personnellement, in solidum avec la société Covea Risks, à payer à la caisse la somme de 22 925,28 euros à titre de dommages-intérêts, avec intérêts au taux légal à compter du 10 mai 2006, l'arrêt retient que le warrant agricole est un gage sans dépossession qui ne confère au créancier aucun droit de rétention sur les biens warrantés, qu'il s'ensuit que la caisse, qui n'a pas demandé l'attribution judiciaire de son gage, ne peut pas invoquer à son profit les dispositions du dernier alinéa de l'article L. 622-21 qui sont inapplicables en la cause, que les dispositions de l'article L. 342-12 du code rural ne peuvent prévaloir sur celles de l'article L. 621-32, II, du code de commerce et qu'en application de ce texte, la créance antérieure au jugement d'ouverture, garantie par un warrant agricole qui ne comporte pas de droit de rétention, est payée sur le prix de vente du bien après les créances salariales superprivilégiées, les frais de justice, les créances postérieures et la créance privilégiée du Trésor ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors que le droit de rétention de la caisse bénéficiaire du warrant agricole sur le stock de paille vendu par le liquidateur était reporté de plein droit sur le prix de vente, la cour d'appel a violé les textes susvisés
;" Cass com 26 janvier 2010 n°08-21340