Etat des créances

Généralités

C’est le document établi à l’issue de la vérification des créances, comprenant les « admissions » de créance, et toutes les décisions du juge commissaire relatives aux créances déclarées, c'est-à-dire, créancier par créancier et créance par créance, le montant qui a été retenu (il est complété ensuite par les décisions prises par les autres juridictions que le juge commissaire)

L’état des créances est déposé au greffe où il est public, et son dépôt fait l’objet d’une publicité au BODACC qui fait courir le délai de recours des tiers contre chacune des décisions rendues qui y sont regroupées.

Ainsi l'état des créances n'est pas, en lui même, une décision de justice, et traditionnellement on ne lui attache pas de valeur juridictionnelle.

En effet, il regroupe, ligne par ligne, autant de décisions du juge commissaire qu'il y a de créance: c'est chaque décision relative à chaque créance qui est une décision de justice, et l'état des créances est le recueil de ces décisions, prises antérieurement pas le juge commissaire (comme expliqué plus bas, admissions sans contestations décidées par le juge commissaire pas simple signature sur la liste des créances déclarées, et ordonnances prises ultérieurement à la suite d'audiences contradictoires sur les contestations de créance)

La précision est fondamentale pour l'exercice des voies de recours: la voie de recours n'est pas exercée contre l'état des créances lui même, mais contre l'une ou l'autre des décisions individuelle qu'il regroupe (Cass com 15 mars 2005 n°03-19786 qui entretient la confusion sur la question, et Cass com 27 Mai 2014 n°13-15512, pris a contrario, qui semble admettre, par dérogation, l'appel du débiteur contre l'état des créances en son entier, dans le cas où ce débiteur n'a pas été en mesure de participer à la vérification des créances, mais là encore c'est sans doute un abus de language et le recours porte sur chaque ligne de l'état des créances, mais surtout Cass com 8 juin 2010 n°09-14995 qui est pour sa part très précis sur le fait que le recours doit être dirigé contre une décision d'admission spécifique et non pas contre l'état des créances dans son ensemble, sous peine d'irrecevablité)

L'état des créances dans le détail

Quand on relève la variété de décisions qui peuvent être prises dans le cadre de la vérification des créances  la question peut se poser de savoir celles qui sont portées sur l'état des créances et celles qui ne le sont pas.

Le processus est le suivant:

- le mandataire judiciaire dresse une liste des créances déclarées avec ses propositions d'admission, de rejet ou de renvoi devant la juridiction compétente et les observations du débiteur (articles L 624-1 et R624-2) . Cette liste est transmise au juge commissaire (elle est complétée le cas échéant en conséquence des relevés de forclusion, au visa de l'article R624-2)

- le juge commissaire décide de l'admission ou du rejet des créances, ou encore constate qu'une instance est en cours ou que la contestation élevée par le mandataire judiciaire n'est pas de sa compétence. (article L624-2)

C'est le panel de décisions possibles à ce stade.

- en premier lieu les décisions d'admission sans contestation font simplement l'objet d'une signature du juge commissaire sur la liste établie par le mandataire judiciaire à l'issue de la vérification des créances, ce dont le greffe avise les créanciers par lettre simple et le mandataire judiciaire et l'administrateur par communication (article R624-3 du code de commerce)

- pour les contestations de créance, ou lorsque la compétence du juge commissaire est contestée, le juge commissaire tient une audience à laquelle sont convoqués le débiteur, le créancier concerné et les mandataires de justice (article R624-4 du code de commerce), sauf le cas où le créancier n'a pas répondu dans le délai au courrier de contestation du mandataire de justice.

Les décisions rendues à la suite de ces audiences du juge commissaire sont notifiées au débiteur et au créancier concerné par le greffe dans les 8 jours, et communiquées aux mandataires de justice (ce qui déclenche les délai de recours des parties devant la Cour d'appel prévu aux articles L624-3 et R624-7 du code de commerce qui doit être exercé dans le délai de droit commun des recours contre les décisions du juge commissaire, soit 10 jours cf R661-3 du code de commerce)

- l'ensemble des décisions rendues par le juge commissaire, qu'il s'agisse des admissions sans contestation, des décisions suites à des contestations de créance, des décisions d'incompétence ou des décisions constatant l'existence d'une instance (auxquelles la jurisprudence ajoute les décisions de sursis à statuer), complété par les relevés de créances salariales, constituent l'état des créances qui est déposé au greffe (par hypothèse le juge a signé sur la liste les admissions sans contestation et évidemment les ordonnances rendues par la suite) et publié eu BODACC (article R624-8 et article L624-3-1). Cette publication est logique puisqu'elle déclenche le délai de recours des tiers contre l'ensemble (plus exactement contre chacune) des décisions du juge commissaire.

Ainsi l'état des créances au sens propre du terme est constitué une fois que le juge commissaire a rendu toutes les décisions dont il était saisi et qu'il est dessaisi de toute décision sur le sort d'une créance. C'est ce document récapitulatif de l'ensemble des décisions rendues par le juge commissaire qui constitue l'état des créances et est publié au BODACC (ce qui n'empèche pour autant pas que certaines créances ne sont pas arrêtés, dès lors qu'elles sont dépendantes d'autres juridictions que le juge commissaire, comme c'est le cas des instances en cours au jour du jugement)

- L'état des créances est ensuite le cas échéant complété par les décisions rendues par les juridictions compétentes saisies suite à l'incompétence du juge commissaire, les décisions rendues sur les instances qui étaient en cours au jour du jugement et ont été reprises après déclaration de créance, et les décisions rendues sur recours contre les décisions du juge commissaire , le greffe avisant les mandataires de justice de toute modification de l'état des créances (article R624-11) (ces décisions font l'objet des recours de droit commun, que ce soit des parties ou des tiers, sans interférence du droit des procédures collectives, ce qui explique que l'état "complété" ne soit pas à nouveau publié au BODACC)

Il convient également de relever que les créances fiscales et sociales qui n'ont pas fait l'objet d'un titre exécutoire sont déclarées et admises provisionnellement, et sous réserve des créances non encore établies à la date de la déclaration de créance. Sauf cas de procédure en cours au jour du jugement, l'établissement définitif de ces créances doit être effectué, à peine de forclusion, dans le délai d'établissement de l'état des créances (article L622-24 du code de commerce). Le juge commissaire prononce alors l'admission définitive de ces créances après avis des mandataires de justice et ses décisions sont portées sur l'état des créances (article R624-6) . Les décisions rendues en méconnaissance de ces textes sont susceptibles d'appel (et a contrario les autres ne le sont a priori pas). Pour plus de précisions voir les créances provisionnelles fiscales et sociales

Les textes ne l'évoquent pas, mais il se peut que l'état des créances comporte l'omission d'une créance ou d'un créancier. Il est dans ce cas admis que le juge commissaire puisse établir un état des créances complémentaire qui doit être traité du point de vue des publicités et voies de recours comme l'état des créances initial.

Il se peut également que l'état des créances comporte une erreur matérielle, qui peut être rectifié suivant le régime de la rectification des erreurs matérielles.

Délai d'établissement de l'état des créances

Il n'y a pas, à proprement parler, de délai d'établissement de l'état des créances.

Cependant des délais sont impartis au mandataire judiciaire pour procéder à la vérification des créances

Voir le mot "vérification des créances" et le mot voies de recours