Tout (ou presque) ce que vous voulez savoir sur les procédures collectives
Les généralités ci dessous sont complétées par des sous menus spécifiques
Généralités, points communs et schémas de procédures
L’entreprise implique un risque de difficultés financières qui peut être provoqué par de multiples raisons : secteur en crise, charges inadaptées, mauvais emplacement commercial, erreurs stratégiques, insuffisance de financement, impayés, erreurs de recrutement, accident, problèmes de santé du chef d’entreprise ou d’un salarié majeur, évolution de la règlementation, perte d’un ou plusieurs contrats, malfaçons, concurrence …
Quelles qu’en soient les causes, ces difficultés se répercutent sur :
- Le chef d’entreprise qui a souvent investi une partie de ses économies dans l’entreprise et qui est généralement caution des emprunts réalisés par l’entreprise, s’il ne s’agit pas d’une entreprise individuelle mettant en jeu son patrimoine,
- les créanciers de l’entreprise qui, par voie de cascade, peuvent se trouver eux-mêmes en difficulté en raison d’un défaut de paiement,
- les salariés de l’entreprise qui tirent l’essentiel voire même la totalité de leurs revenus de l’entreprise et ont besoin du paiement à bonne date de leur salaire pour leur vie familiale, leur loyer, les échéances de leurs prêts …
- Les clients de l’entreprise qui attendent des prestations ou des livraisons, dont ils ont parfois payé l’essentiel, ou des acomptes.
Evidemment le fait même que l’entreprise rencontre des difficultés implique qu’elle ne pourra satisfaire intégralement et immédiatement l’ensemble des intervenants.
Les priorités de la loi:
La loi organise donc les actions à mener, avec des priorités qui seront différentes selon les circonstances :
- Le maintien de l’emploi et de l’activité sont privilégiés si c’est possible, en espérant qu’à terme (c’est-à-dire à l’issue de la période d’observation) la relance de l’activité permettra de proposer le règlement des créanciers (c’est-à-dire un plan de sauvegarde ou un plan de redressement)
- si l’activité doit être arrêtée, le seul objectif sera le règlement des créanciers dans les meilleures conditions possibles, avec recherche de reclassement des salariés qui devront être licenciés pour motif économique (ce sera la liquidation judiciaire)
Le traitement égalitaire des créanciers et les interdictions destinées à en imposer le respect:
Dans tous les cas, le principe est toujours que les créanciers doivent être traités égalitairement à l’intérieur d’une même catégorie.
Il faut éviter, et donc la loi l’interdit, que sous la pression le créancier le plus important, le plus « riche », le plus « puissant », puisse se faire payer au détriment des autres. Les droits des créanciers sont traités « collectivement » et exercés par un mandataire de justice professionnel (le mandataire judiciaire ou le liquidateur suivant les cas) qui les représentera devant le Tribunal à l’occasion des grandes décisions concernant l’entreprise.
D'ailleurs toute action qui doit être menée dans l'intéret des créanciers est exercés par leur représentant (mandataire judiciaire en sauvegarde ou redressement judiciaire, liquidateur en liquidation): ce mandataire a monopole d'action et les créanciers ne peuvent agir individuellement (sauf des cas très particuliers)
C’est d’ailleurs la raison pour laquelle on appelle parfois « procédures collectives » les procédures de traitement des difficultés.
L'encadrement du chef d'entreprise:
De même dans tous les cas, la loi encadre les actes du chef d’entreprise, avec ce qu'on appelle un dessaisissement dont la portée dépend des circonstances et de la nature de la procédue ouverte et certains actes qui doivent être autorisés par le juge commissaire
- pour qu’il ne puisse pas favoriser un créancier dont il craint les actions, ou dont il a plus besoin que les autres, ou encore dont lui ou un membre de sa famille est caution : la loi l’interdit.
- pour que l’arrêt de son activité ne permette pas l’organisation de sa future activité en fraude des droits des créanciers, notamment en détournant du matériel, des contrats ou des clients. La loi sanctionne ce type d’agissements (voir les sanctions)
Les textes applicables:
Tous ces objectifs reposent sur les lois et règlements qui organisent les procédures. Ces textes sont situés dans le Code de Commerce. Vous trouverez dans le bandeau de ce site un lien "trouver la loi" qui vous permettra de trouver plus facilement les textes que vous souhaiteriez consulter, sur le site LEGIFRANCE.FR
Les différentes procédures existant en droit Français:
Le droit positif (c'est à dire en vigueur) Français connait trois procédures de traitement des difficultés des entreprises :
- la sauvegarde,
- le redressement judiciaire,
- la liquidation judiciaire.
Ces procédures sont régies par la loi et plus précisément par le code de commerce.
Le domaine d'application de la loi: qui peut en bénéficier ?
Les trois procédures collectives sont applicables à toutes les « entreprises » relevant du secteur privé, qu’il s’agisse de sociétés commerciales (SA, SARL, EURL ..), de personnes exerçant des activités commerciales ou artisanales, de sociétés civiles, d’agriculteurs, de groupements, et de personnes exerçant des activités indépendantes (souvent assimilées aux « professions libérales »).
Les règles d'ouverture des procédures:
Chacune de ces procédures correspond à une des circonstances d’ouverture précises, mais les trois ont des points communs.
Il s’agit en premier lieu de prendre acte d’une situation difficile, et de rechercher quelles sont les solutions pour y mettre un terme.
Dans tous les cas, la constatation de la situation relève toujours de l’appréciation du tribunal compétent, qui est territorialement en principe celui du « siège » de l’entreprise.
- Pour les sociétés commerciales et les personnes exerçant une activité commerciale ou artisanale c’est le Tribunal de commerce qui est compétent. Rappelons que ce tribunal est composé de chefs d’entreprises élus et non pas de magistrats professionnels, ce qui leur procure une expérience permettant d’appréhender les problèmes rencontrés.
- Pour les agriculteurs, les sociétés civiles, les personnes exerçant une profession indépendante, c’est le Tribunal de Grande Instance qui est compétent. Ce tribunal est composé de magistrats professionnels.
Dans tous les cas, le Tribunal qui constate l’existence de difficultés, va ouvrir la procédure adaptée en fonction des circonstances, par un jugement.
Ce jugement est toujours « rendu » après une audience à l’occasion de laquelle le chef d’entreprise pourra s’exprimer librement, hors la présence du public (ce qu’on appelle « chambre du conseil »).
Le chef d’entreprise sera entendu par une formation de trois juges, un représentant du Procureur de la République et un greffier. Il peut s’il le souhaite être assisté.
Au fil de la procédure, le Tribunal sera amené à prendre par des décisions appelées jugement, les décisions les plus importantes, qui affectent la vie de l’entreprise.
Les intervenants:
Le juge commissaire:
Dans tous les cas, le jugement désignera un juge commissaire (et le cas échéant un juge commissaire suppléant) qui est un membre du Tribunal. Son nom est mentionné dans le jugement.
Le juge commissaire pour sa part a une mission générale de surveillance de la procédure, et prendra, par des décisions appelées ordonnances, les décisions les plus courantes.
Le dirigeant rencontrera le juge commissaire à l'occasion d'audiences, et le cas échéant à sa demande.
Notamment le juge commissaire prendra des décisions pour donner aux mandataires de justice les autorisations qui leur sont nécessaires.
Le juge commissaire pourra également recevoir le chef d’entreprise ou tout autre acteur de l’entreprise, soit à son initiative, soit à sur demande et s’il l’estime opportun.
Les mandataires de justice:
En effet en fonction de la procédure, le Tribunal désignera également un ou plusieurs mandataires de justice professionnels (administrateur judiciaire, mandataire judiciaire, liquidateur).
Les mandataires de justice seront les interlocuteurs réguliers de ces acteurs, et renseigneront le juge commissaire, le Tribunal et le procureur de la République par des rapports.
Sauvegarde, redressement judiciaire, liquidation judiciaire : combien de fois ?
La loi part du principe qu'une vie de chef d'entreprise peut conduire à rencontrer des difficultés, et le cas échéant à en rencontrer plusieurs fois. En outre le même chef d'entreprise peut être dirigeant de plusieurs entreprises, qui peuvent ensemble ou séparément rencontrer des problèmes.
Plusieurs sauvegarde ou plusieurs redressement judiciaires
Le texte n'accorde pas de conséquence particulière au fait pour la même personne ou pour le même dirigeant, de rencontrer plusieurs procédures de sauvegarde ou de redressement judiciaire, que ce soit au sein de la même entreprise qui rencontre plusieurs fois dans son existence l'ouverture de la procédure, ou au sein de différentes entreprises.
Nouvelle sauvegarde ou nouveau redressement judiciaire en cours de plan d'une précédente procédure ?
Si la même entreprise rencontre des difficultés alors qu'elle fait l'objet d'un plan de sauvegarde ou de redressement judiciaire encore en cours, que des dispositions particulières existent:
- la résolution de ce plan est encourue
- la cessation des paiements survenue en cours de plan de sauvegarde donne lieu à redressement judiciaire, et, si les conditions sont réunies ( impossibilité de parvenir à un plan) à une liquidation judiciaire
- la résolution du plan de redressement donne lieu, par principe, à liquidation judiciaire
Plusieurs liquidations judiciaires
La question intêresse essentiellement les personnes physiques: une même personne peut exercer successivement plusieurs activités, ou plusieurs fois la même, et se trouver plusieurs fois en liquidation.
Une précision: une personne physique qui est en liquidation judiciaire ne peut, tant que la procédure n'est pas clôturée, exercer une activité qui l'exposerait à se trouver une seconde fois en liquidation. Elle devra donc attendre la clôture.
Mais postérieurement à la clôture, elle peut se trouver à nouveau en difficulté.
Ce n'est pas en soi sanctionné.
Cependant si la même personne fait l'objet à titre individuel et/ ou si l'une des personnes morale dont il est dirigeant fait l'objet, en moins de 5 ans, de deux liquidations judiciaire clôturées pour insuffisance d'actif, les créanciers retrouvent , par exception, leurs droits de poursuite après la clôture (L643-11): autrement dit, une société est en liquidation et clôturée pour insuffisance d'actif, puis moins de 5 ans plus tard, son dirigeant est lui même en liquidation judiciaire clôturée pour insuffisance d'actif, ses créanciers pourront, par exemple sur des biens nouveaux reçus après la clôture, reprendre les poursuites, ce qui est l'inverse du droit commun.