Cession différents modes en procédure collective
Quelques points de la définition
Promesse ou cession sous condition
Reprise d'entreprise ou d'actif quelles procédures ?
Deux procédures collectives principalement concernées
Essentiellement deux circonstances de reprise
A partir de ces constats, deux modes de reprise principaux
Cession des actifs du débiteur
Marginalement cessions d'actifs en période d'observation ou en accessoire d'un plan
Cession d'entreprise et cession de biens les points communs
Cession d'entreprise et cession de biens: qui peut faire une offre ? Les incompatibilités
Cession d'entreprise ou cession de biens: à qui faire une offre ?
Le prix : prix symbolique exclu
Présentation détaillée des différents processus
Généralités
Le fait de « vendre ». Voir les mots "cédant" et "cessionnaire"
En redressement judiciaire (et en liquidation judiciaire lorsqu'il y a poursuite d'activité), la loi organise la cession d’entreprise, qui permet notamment le transfert de tout ou partie des contrats de travail.
En liquidation judiciaire, la loi permet également la cession des « autres biens du débiteur », aux enchères publiques ou de gré à gré, c'est-à-dire sur propositions de candidats.
Promesse ou vente sous condition
Il existe un débat assez théorique en réalité sur la possibilité de signer une cession sous condition suspensive d'autorisation de la juridiction compétente (juge commissaire ou tribunal suivant les cas). En effet en droit commun le bénéficiaire de la condition doit pouvoir y renoncer pour valider l'opération, ce qui n'est pas possible en l'état. Les puristes préféreront donc une contrat préparatoire "sous réserve de l'obtention de l'autorisation judiciaire nécessaire", étant précisé qu'en cas de non obtention l'opération est caduque et qu'en cas d'obtention elle s'impose aux parties sans rétroactivité.
Reprise d'entreprise ou d'actif, quelles procédures sont possibles ?
La reprise d'une entreprise ou la reprise des actifs d'une entreprise vont en réalité recouper plusieurs hypothèses.
En réalité en effet, deux types de procédures collectives sont potentiellement concernées, ce qui distingue deux circonstances de reprise, et deux modes de reprise.
Principalement deux types de procédures collectives concernées :
Il existe trois procédures collectives en droit Français : la sauvegarde, le redressement judiciaire et la liquidation judiciaire.
La sauvegarde a été crée en 2005 pour inciter les dirigeants à saisir le tribunal de difficultés sans qu’il y ait état de cessation des paiements. On part du principe que plus le tribunal est saisi tôt plus l’entreprise a des chances de se redresser. Parmi les « bonus » attractifs pour le chef d’entreprise, il y a justement le fait que seul le dirigeant peut décider de céder l’entreprise, et qu’il ne peut y être contraint judiciairement. Il n'y aura donc pas, en procédure de sauvegarde, de cession d'entreprise ou d'actif, dans les formes prévues ci dessous, c'est à dire ordonnées par le tribunal ou le juge commissaire.
(Il sera par contre possible en procédure de sauvegarde (et d'ailleurs également en redressement judiciaire) de céder en période d'observation des actifs "secondaires" ou même de céder une "activité" en "annexe" d'un plan de remboursement des créanciers, pour autant que l'activité principale ne soit pas compromise. Une autorisation judiciaire sera nécessaire.)
Seules les deux autres procédures – redressement judiciaire ou liquidation judiciaire - permettent la "cession de l’entreprise" en tant que solution de la procédure et que le dirigeant soit d’accord ou pas avec cette solution, et dès lors que cette cession est dans l’intérêt des créanciers.
Nous le verrons, la liquidation judiciaire organise également la cession des actifs du débiteur, ce qui permet de céder des actifs de moindre importance, ou de démembrer une entreprise qui n'a plus d'activité.
Ainsi la reprise d'une entreprise en conséquence d'une décision contraignante pour le chef d'entreprise, qui va s'imposer à lui, est une solution du redressement judiciaire et de la liquidation judiciaire, mais pas de la sauvegarde, et la reprise des actifs du débiteur est une solution de la liquidation judiciaire.
Enfin en période d'observation (et là la sauvegarde est concernée comme le redressement judiciaire) on peut par le processus d'acte de disposition étranger à la gestion courante procéder à des cessions d'actif
Essentiellement deux circonstances de reprise :
En redressement judiciaire l’activité est poursuivie.
En liquidation judiciaire, par principe l’activité est arrêtée, et en tout état la loi impose au liquidateur de licencier les salariés dans les 15 jours, c'est-à-dire dans des délais généralement incompatibles avec la mise en place d’une cession avec reprise des salariés.
Il peut par dérogation y avoir une poursuite d’activité autorisée en liquidation, sur autorisation du Tribunal. Dans ce cas, la procédure « fonctionne » comme un redressement judiciaire et d’ailleurs si une cession est envisageable, un administrateur sera désigné et c'est le tribunal qui l'autorisera. Mais une telle situation est exceptionnelle et se justifie rarement.
Or ce n’est évidemment pas la même chose de reprendre une entreprise en activité ou une entreprise qui a cessé toute activité.
Reprendre une entreprise en activité, c’est certes reprendre une entreprise, plus simplement un fonds de commerce, mais c’est aussi reprendre des salariés, des contrats. Et il faut être certain que les salariés, les partenaires dans les contrats dont on a absolument besoin ne pourront pas « se défiler ».
On ne peut reprendre une entreprise en pleine activité si le lendemain de l’acte de cession les salariés ne veulent pas travailler pour le cessionnaire (« l’acheteur »), ou si les organismes de crédit bail enlèvent les machines nécessaires, ou encore si les fournisseurs refusent de livrer.
Il faut que la loi sécurise la cession, et c'est ce qu'elle fait pour ce type de cession.
Par contre en liquidation judiciaire sans poursuite d’activité, le fonds de commerce est fermé ou sur le point de l’être, et les salariés sont licenciés : la situation sera différente. La reprise du fonds de commerce, ou de certains actifs, ne nécessite pas les mêmes précautions.
A partir de ce clivage, la loi organise deux modes de reprise :
- Pour la reprise d’une entreprise en activité, le code de commerce organise une procédure dite de « cession d’entreprise ».
Ce sont essentiellement les articles L642-1 et R641-1 du code de commerce qui vont s’appliquer.
Ce « processus » va s’appliquer systématiquement en cas de cession en redressement judiciaire (et avec désignation d'un administrateur judiciaire, au visa de l'article L631-21-1 du code de commerce qui dispose "lorsque le tribunal estime que la cession totale ou partielle de l'entreprise est envisageable, il désigne un administrateur, s'il n'en a pas déjà été nommé un, aux fins de procéder à tous les actes nécessaires à la préparation de cette cession et, le cas échéant, à sa réalisation.", et marginalement en liquidation, (surtout si on est dans un contexte de poursuite d’activité).
- Pour la reprise d’une entreprise qui a cessé ou va cesser son activité, ou de certains actifs, c'est-à-dire essentiellement en liquidation sans poursuite d’activité autorisée, le code de commerce organise une seconde procédure, allégée dans ses effets, dite de « cession des actifs du débiteur ».
Cette "cession des actifs du débiteur" permet d'ailleurs de céder la totalité des actifs en un bloc, c'est à dire finalement le fonds de commerce, mais également de manière plus "éparpillée" les actifs les uns après les autres, le cas échéant à des candidats différents.
Ce sont essentiellement les articles L642-19 et suivants et R642-38 et suivants du code de commerce qui vont s’appliquer
Marginalement des cessions d'actif peuvent intervenir en période d'observation, que ce soit en sauvegarde ou en redressement judiciaire, ou dans les mesures accessoires d'un plan de remboursement des créanciers (là encore en sauvegarde ou en redressement judiciaire)
Dans ce cas,
- durant la période d'observation il conviendra que le juge commissaire rende une ordonnance si l'acte de disposition n'entre pas dans l'activité habituelle de l'entreprise. Le code de commerce - article L622-7 II - la loi indique les actes de disposition qui n'entrent pas dans la gestion courants doivent être autorisés, et évidemment la juge commissaire n'a pas à intervenir pour les ventes qui constituent l'activité de l'entreprise: un vendeur de véhicule n'a évidemment pas besoin de l'autorisation du juge commissaire pour vendre un véhicule, mais par contre pour vendre son immeuble il faudra l'autorisation du juge.
Si le bien vendu est grevé de sûretés spéciales, par exemple un nantissement pour un fonds de commerce ou du matériel, une hypothèque pour un immeuble, le prix subit un sort particulier: en application de l'article L622-8 du code de commerce et de l'article R622-7 le prix n'est pas versé à l'entreprise mais à l'administrateur ou à défaut au mandataire judiciaire, et sera indisponible pendant la période d'observation, et jusqu'à l'adoption d'un plan ou une décision de liquidation. Ce n'est qu'après l'adoption du plan ou en cas de liquidation que les créanciers inscrits sur le bien sont payés sur le prix dans le respect de l'ordre des privilèges, ce paiement venant , en cas de plan, en déduction de leurs dividendes (article L626-22 du code de commerce)
- en accessoire d'un plan de redressement ou de sauvegarde, les cessions sont réalisées dans les formes de la cession de l'entreprise.
Globalement les cessions de biens ou cession d'entreprise ont des points communs:
- publicité identique
- même dérogation pour les textes qui organisent l'information préalable des salariés, qui ne sont pas applicables
Les textes de droit commun prévoient que au plus tard 2 mois avant la conclusion du contrat de vente, les salariés sont informés au cours d’une réunion d’information. Cependant sont expressément exclues du champ d’application de cette disposition :
- les entreprises à partir de 250 salariés ( pour lesquelles d'autres dispositifs existent)
- les transmissions réalisées dans le cadre d’une succession, d’une liquidation du régime matrimonial ou d’une cession du fonds à l'époux(se) ou partenaire de Pacs, à un ascendant ou descendant ;
- les entreprises en cours de procédure de conciliation, de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire.
Dans les deux cas, qui peut faire une offre ? (paragraphe applicable à tous les modes de cession, cession d'entreprise parfois dite plan de cession ou cession des biens du débiteur): les restrictions aux possibilité de retenir une offre
Voir le mot cession différents modes qui peut être candidat
Dans tous les cas attention aux clauses de solidarité
Voir le mot "solidarité" du lexique: certaines clauses sont écartées la loi ( par exemple la clause par laquelle le cédant reste garant du cessionnaire) mais d'autres ne le sont pas (par exemple la clause par laquelle le cessionnaire est solidaire du cédant, ce qui peut l'exposer à un complément de prix indirect puisqu'il assume les obligations du cédant.
A qui faire l'offre ?
A l’administrateur judiciaire si on est dans un cursus de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire avec poursuite d’activité. Au liquidateur en liquidation judiciaire.
Le prix de cession
La pratique qui consiste à proposer un prix dénué de toute réalité économique en contre partie d'engagements, notamment sociaux, est à bannir "que l'engagement par le cessionnaire de reprendre certains contrats de travail ne pouvait être considéré comme une contrepartie des biens cédés et en a déduit qu'en autorisant de telles cessions qui ne constituaient pas des ventes, le juge-commissaire avait statué hors la limite de ses attributions" Cass com 28 septembre 2004 n°02-11210
Dans tous les cas la cession fait l'objet d'une autorisation judiciaire
C'est suivant les cas le tribunal ou le juge commissaire qui statue
Les clauses de substitution
Le candidat a la faculté de prévoir dans son offre qu'il se substituera un autre cessionnaire. C'est généralement ce qui est prévu quand l'offre est présentée par une personne physique qui ne veut pas engager les frais de constitution d'une personne morale tant qu'il n'est pas certain d'être retenu et n'a pas encore déterminé laquelle de ses sociétés se portera effectivement acquéreur en fonction des contraintes fiscales ou sociales.
Ce processus ne pose pas de difficulté, étant précisé que la substitution ne doit pas permettre de déroger aux interdictions qui touchent au candidat . Une formulation adaptée est par exemple que le candidat se réserve la possibilité de se substituer toute personne morale constituée ou à constituer dont il serait directement ou indirectement porteur de parts majoritaire et qui ne serait pas sous le coup des interdictions légales.
La question se pose de savoir si la substitution dégage le candidat initial de toute solidarité dans l'exécution de l'offre. La réponse réside dans l'article 1216-1 du code civil : le cédant n'est dégagé que si le cédé (c'est à dire la procédure collective) y consent (c'est à dire si c'est en l'espèce mentionné expressément dans l'offre acceptée) Cass com 14 novembre 2019 n°18-18833
Présentation des différents processus:
- les actes de disposition étrangers à la gestion courante en période d'observation (redressement judiciaire ou sauvegarde)
- les cessions d'entreprise (cession dite totale en redressement ou liquidation judiciaire, cession partielle en sauvegarde ou redressement)
- les cessions de biens (liquidation)