Liquidation judiciaire arrêt d’activité / poursuite d’activité / nouvelle activité

Le principe est que la liquidation judiciaire emporte arrêt immédiat de l’activité.

Pour autant, ce principe essentiel, qui caractérise la liquidation judiciaire, n’est singulièrement pas expressément mentionné dans les textes.

Déjà l’arrêt d’activité n’est pas au rang des conditions d’ouverture de la procédure, les articles L640-1 et L641-1 du code de commerce prévoyant que la liquidation judiciaire est applicable à toute entreprise dont le redressement est manifestement impossible.

L’arrêt d’activité n’est pas non plus expressément mentionnée au rang des effets de la liquidation judiciaire

L’article L641-9 se contente en effet “Le jugement qui ouvre ou prononce la liquidation judiciaire emporte de plein droit, à partir de sa date, dessaisissement pour le débiteur de l’administration et de la disposition de ses biens même de ceux qu’il a acquis à quelque titre que ce soit tant que la liquidation judiciaire n’est pas clôturée. Les droits et actions du débiteur concernant son patrimoine sont exercés pendant toute la durée de la liquidation judiciaire par le liquidateur” et les dispositions relatives à l’autorisation d’exploiter en liquidation permettant de comprendre que, par différence, cette exploitation est impossible dans les autres cas.

Curieusement l’article L641-9 croit utile d’ajouter “III. – Lorsque le débiteur est une personne physique, il ne peut exercer, au cours de la liquidation judiciaire, aucune des activités mentionnées au premier alinéa de l’article L. 640-2“, (comprendre activité commerciale, artisanale ou une activité agricole définie à l’article L. 311-1 du code rural et de la pêche maritime ou  une activité professionnelle indépendante y compris une profession libérale soumise à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé.) ce qui est a priori inutile dès lors que par principe le débiteur ne peut exercer aucune activité.

Ceci étant le déroulement de la liquidation ne fait aucun doute sur l’arrêt immédiat de l’activité.

Et d’ailleurs, les salariés doivent d’ailleurs être licenciés dans les 15 jours de la liquidation judiciaire sauf à perdre la garantie AGS, et l’une des missions du liquidateur est de réaliser tous les actifs de l’entreprise.

Ainsi le principe sera l’arrêt de l’activité.

Voir pour plus de précision sur les conséquences le mot dessaisissement

Par exception le Tribunal peut autoriser la poursuite d’activité pour les besoins des opérations de liquidation (ce qui conforte dans le fait que par principe cette poursuite est impossible)

Au delà de ce premier constat diverses exceptions existent.

  • l’EIRL (statut maintenant disparu) pouvait exercer une activité sous couvert d’un patrimoine distinct de celui sous l’emprise de la liquidation judiciaire
  • L’article L681-2 modifié par la loi du 14 février 2022 dispose désormais

    “VII. – Lorsqu’une procédure de liquidation judiciaire est ouverte, l’entrepreneur individuel peut exercer une nouvelle activité professionnelle. Un nouveau patrimoine professionnel est alors constitué. Ce patrimoine professionnel n’est pas concerné par la procédure ouverte.

    Le débiteur ne peut constituer plus de deux patrimoines distincts de son patrimoine personnel.

    La faculté d’exercer une nouvelle activité professionnelle dans les conditions prévues au premier alinéa du présent VII ne s’applique pas au débiteur qui, au titre de l’un quelconque de ses patrimoines, a fait l’objet, depuis moins de cinq ans, d’une procédure de liquidation judiciaire clôturée pour insuffisance d’actif ou d’une décision de clôture d’une procédure de rétablissement professionnel.”

    Il ne semble pas y avoir de limitation en matière de domaine de la nouvelle activité, de sorte que l’entrepreneur individuel en liquidation peut reprendre la même activité. Ce qui est logique dans une perspective de rebond, et sera ponctuellement mal perçu par les créanciers impayés de la même activité soumis à la liquidation judiciaire.

    Le nouveau patrimoine professionnel n’est pas sous l’emprise de la liquidation judiciaire du précédent L681-2 .

    Reste que le texte ne détaille pas avec quels fonds la nouvelle activité est financée, et sauf subsides accordés au débiteur il conviendra que ces fonds lui soient prêtés … mais dans une configuration où par l’effet du dessaisissement il ne peut emprunter, y compris à des proches … sauf à considérer qu’avant même que la nouvelle activité ait commencé le patrimoine professionnel existe déjà.

    Le mystère plane également sur la différence entre l’exercice d’une nouvelle activité – que la loi autorise – et la poursuite de l’activité qui a donné lieu à liquidation judiciaire – c’est souvent en outre la même activité – : la frontière est ténue et rien de permet de distinguer clairement les deux situations.

    Avec certainement, pour ce qui concerne la clientèle, actif essentiel dans certaines activités, un basculement de l’une des activités à l’autre, sans égard pour les créanciers et étant précisé que dans le cadre de la liquidation le liquidateur aura réalisé les actifs – au profit d’un tiers et avec interdiction pour le débiteur de s’en porter acquéreur ou sous acquéreur – et résilié le bail qui occupait l’activité.

     

     

    Ce qui conduit à une grande incertitude pour les débiteurs mais également pour leurs éventuels contractants, exposés potentiellement à des actions en inopposabilité.

    Ce qui démontre les grandes imperfections de la loi sur ces points,  pour les besoins d’un dispositif que ni les professionnels, ni les créanciers, ni même la plupart du temps les débiteurs ne comprennent.

 

LEXIQUE 

A

C

D

I

P

R

S